Les dangers de la rhétorique anti-Bruxelles

De Barcelone, où il était venu s'entretenir avec le Premier ministre espagnol Jose Luis Zapatero, Dominique de Villepin n'a pas hésité à tancer Bruxelles. A quelques semaines de la réunion ministérielle de l'OMC à Hong Kong censée relancer les négociations commerciales internationales, "l'Europe doit maintenir sa cohésion", a souligné le chef du gouvernement français. "Cela suppose que les négociateurs européens respectent leur mandat, en particulier pour préserver la Politique agricole commune", et "suivent les procédures de consultation qui ont été prévues". "Ces exigences n'ont pas été respectées la semaine dernière, sur le sujet très sensible de l'accès aux marchés agricoles", a jugé Dominique de Villepin.Alors qu'au même moment, dans les colonnes du Monde, le commissaire européen au Commerce Peter Mandelson réclamait des Etats membres "une certaine latitude tactique", la réponse lui est ainsi apparue clairement: c'est non.La fermeté française sur la PAC n'est pas nouvelle. Elle est même une constante depuis la mise en application de la politique agricole commune avec la création du FEOGA en 1962. Elle a incontestablement assuré la survie d'une agriculture française puissante. Elle est aussi une source croissante de problèmes. D'abord au sein de l'Union, où les négociations sur le budget 2007-2013 achoppent depuis que les Britanniques ont déclaré n'accepter une réduction de leur "chèque" que si l'enveloppe de la PAC était réduite. Ensuite entre l'Europe et les Etats-Unis, qui viennent de proposer de diminuer leurs subventions agricoles de 60% si l'Union Européenne acceptait de réduire les siennes de 80%... Enfin entre l'UE et les Etats-Unis d'une part, et les pays en développement d'autre part qui ne cessent de clamer, non sans raison, que le marché mondial des produits agricoles leur restera de facto fermé tant que les pays riches continueront de soutenir à ce point leurs agriculteurs.Bref, la question n'est pas tant de savoir si la PAC va devoir être révisée que de déterminer comment. On voit mal en quoi l'avalanche de critiques à l'égard de la Commission émises ces dernières semaines depuis l'Elysée ou Matignon peut faire avancer les choses. La Commission n'est que l'exécutant des Etats membres. Et elle ne fait que refléter à un instant T le rapport de force entre les 25.Mieux vaudrait donc ne pas se tromper de combat et de cible. Et ne pas oublier les leçons du référendum du 29 mai, où le refrain maintes fois entonné du "c'est la faute à l'Europe" a contribué à produire un "non" qui résonne encore.
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