"Une sous-valorisation chronique de Lafarge pourrait attirer des fonds d'investissement"

latribune.fr.- Lafarge a terminé en baisse de 7,40% après la publication de ses résultats semestriels, jeudi 8 septembre. Cette réaction vous semble-t-elle justifiée?Rafic El Haddad.- La réaction du marché semble un peu excessive. Elle traduit un manque de confiance dans les perspectives du groupe sur le reste de l'année 2005. En outre, le marché a été très surpris, car le groupe avait déjà publié un chiffre d'affaires semestriel assez bon. Il a fait une erreur de communication en ne prévenant pas en juillet lors de la publication de son chiffre d'affaires que ses résultats semestriels allaient sans doute être pénalisés dans certains pays. En outre, les causes du fort recul du résultat opérationnel sont connues depuis le premier trimestre. En effet, le marché allemand est plus difficile que prévu et Lafarge souffre aussi d'une guerre des prix au Brésil, en Malaisie et en Corée du Sud. Sans prendre en compte ces éléments, qui ont coûté 89 millions d'euros au résultat opérationnel, soit l'écart par rapport aux attentes du marché, Lafarge aurait affiché un résultat quasiment en ligne avec ceux de ses concurrents que sont Holcim et Cemex, car dans les autres pays la hausse des prix compense la hausse des coûts.Le groupe a également revu ses ambitions à la baisse...En effet, la sanction du marché traduit également une baisse dans les prévisions du groupe. Celui-ci anticipe désormais une croissance organique du résultat opérationnel dans le bas d'une fourchette comprise entre 6 et 8%. Le marché pour sa part tablait sur une progression de 8%! L'abaissement de cette prévision devrait avoir un impact négatif de 5% sur la progression du bénéfice net par action. Ce qui explique en partie la baisse du titre. D'autant que le marché redoute que le groupe ne soit pas en mesure d'atteindre cet objectif de croissance proche de 6%, qui implique une croissance de 17% au second semestre.Ces difficultés sont-elles liées à une mauvaise conjoncture du marché du ciment?Non. Le marché global est bien orienté. Mais, pays par pays, il y a de nombreuses disparités. L'Amérique du Nord affiche une très bonne croissance. En revanche l'activité en Europe de l'Ouest est quasiment stable, avec un fort dynamisme en France et en Espagne tandis que l'Allemagne est dans sa onzième année consécutive de récession. Dans les pays émergents, le Moyen Orient et l'Afrique sont de leur côté en forte croissance. L'Amérique du Sud se porte bien en volumes, malgré une guerre des prix au Brésil. Quant à l'Asie, la situation est disparate en fonction des pays. Or, ceux où Lafarge est implanté affichent certaines difficultés. C'est le cas en Corée du Sud, dans les Philippines et en Malaisie. D'autres pays où il est présent, comme la Chine et l'Inde, affichent à l'inverse une bonne croissance. Mais dans l'ensemble, le "mix" pays du groupe en Asie est assez défavorable.Dans ce contexte, en Bourse, quelle est la perspective du titre?Le titre a reperdu la confiance du marché et il manque de catalyseur. Les investisseurs vont à présent attendre de voir les résultats du deuxième semestre et les perspectives 2006 avant de revenir sur le titre. Le retour de la confiance risque de prendre du temps car le marché n'a pas oublié les difficultés et les erreurs du groupe en 2002 et 2003. En outre, Lafarge affiche depuis deux ans une stratégie de croissance externe molle. Il avait pourtant levé des fonds, malheureusement au plus bas du marché, dans une optique d'acquisition. Mais il reste toutefois timide dans ce domaine et ne semble pas avoir de projets de grande envergure d'ici la fin de l'année. Des projets sont peut-être envisageables à partir de 2006.La faiblesse du titre Lafarge fait-elle du groupe une proie?Lafarge est davantage un prédateur qu'une proie. Toutefois, il est vrai qu'une sous-valorisation chronique pourrait attirer des fonds d'investissements. D'autant que le capital de la société est très éclaté et que Lafarge a perdu son statut de première capitalisation boursière de l'industrie cimentière au profit de Cemex.
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