Le clan Piëch veut contrôler Volkswagen

Différents scénarios sont actuellement à l'étude pour s'assurer à terme le contrôle sur le premier constructeur européen. Bruxelles doit toutefois d'abord faire tomber la loi Volkswagen.

Que veut réellement Porsche? C'est la question qui occupe depuis plusieurs semaines tous les observateurs. En début de matinée, mercredi, l'action Volkswagen a encore gagné plus de 5%, grimpant jusqu'à 86,6 euros sur des rumeurs d'OPA du constructeur le plus rentable au monde sur son fournisseur. "Il y a une rumeur qui circule sur une offre à 105 euros par action qui serait formulée par Porsche en association avec des fonds de capital-investissement", a indiqué un trader.

Une hypothèse toutefois démentie formellement par un porte-parole du constructeur de voitures de sport. Celui-ci est le premier actionnaire de Volkswagen. Il détient aujourd'hui 27,4% du capital et a annoncé son intention de monter à 29,9%. Hier déjà, il avait démenti vouloir fusionner à moyen terme avec les marques haut de gamme de VW, que sont Audi, Lamborghini, Bugatti et Bentley.

Et pourtant, un tel projet a un sens. Ne serait-ce que pour les économies de coûts qu'il pourrait apporter. D'un point de vue positionnement, les marques sont assez complémentaires. Audi comme marque premium mais avec des volumes importants à côté de Porsche, spécialiste de la voiture de sport, et les trois autres marques sur leur créneau très spécifique. Au total, naîtrait un nouvel ensemble avec plus d'un million de ventes annuelles et une rentabilité supérieure à celle de ses concurrents BMW et Mercedes.

Aujourd'hui, Audi est lié à Seat et Lamborghini. Ferdinand Piëch, à la fin de son mandat à la présidence du directoire de Volkswagen, avait estimé que les trois marques pouvaient représenter un pôle sport. Mais Seat n'a jamais réussi à changer son image et Martin Winterkorn, le président d'Audi et du pôle sport, qui deviendra président du groupe au 1er janvier, a laissé entendre qu'une de ses premières décisions allait être la réorganisation des marques au sein du groupe. Seat va donc être rattachée à l'avenir à VW et Skoda, formant un ensemble de marques généralistes produisant plus de 4 millions d'unités par an, les marques premium formant l'autre sous-groupe.

Une réorganisation que certains analystes voient comme en premier pas en vue d'un regroupement entre Porsche et Audi. Porsche en aurait les moyens puisqu'il va demander à ses actionnaires en janvier de le laisser augmenter le capital social à 22,75 millions d'euros, soit 8,75 millions de nouveaux titres, ordinaires ou à dividende prioritaire qui vont apporter dans les caisses quelque 8 milliards d'argent frais. Le résultat du vote ne fait guère de doute, puisque la famille Porsche a tous les droits de vote.

Porsche pour l'instant assure qu'il n'a pas le projet d'avaler Audi. Il est clair qu'une telle opération n'est pas faisable dans les prochains mois. Le nouveau patron de Volkswagen doit d'abord réorganiser le groupe. Porsche doit également attendre que Bruxelles fasse enfin sauter la loi Volkswagen s'il veut à l'avenir pouvoir imposer ses vues. Celle-ci bloque à 20% les droits de vote d'un actionnaire. Une nouvelle audition sur le sujet est prévue le 12 décembre au Luxembourg, le jugement étant attendu au printemps 2007.

Pas de raison donc pour Porsche de dévoiler aujourd'hui ses cartes. D'autant que le chemin sera long. Ne serait-ce que pour persuader les syndicats et éviter de déstabiliser un groupe qui aujourd'hui vit d'Audi. Autant dire que la marque Volkswagen doit avant aussi retrouver sa compétitivité. Pour le Land de Basse Saxe, qui détient 14,9% du capital (mais 18,1% des droits de vote) mais est opposé au clan Piëch-Porsche, l'opération pourrait avoir un certain charme aussi puisque la scission d'Audi (dont les usines sont installées essentiellement en Bavière et au Bade-Wurtemberg) et le rachat ensuite par Porsche des titres, apporterait de l'argent frais dans ses caisses.

Les analystes sont persuadés que le président de Porsche, Wendelin Wiedeking, est en train de passer au crible actuellement avec Ferdinand Piëch, le président du conseil de surveillance de Volkswagen et détenteur avec le reste de sa famille de la totalité des droits de vote de Porsche, tous les scénarios possibles pour façonner un nouveau géant européen de l'automobile dominé par le clan Porsche. Le grand-père de Ferdinand Piëch, après tout, a inventé la Coccinelle et son père a été longtemps responsable de l'usine de Wolfsburg. Wendelin Wiedeking avait annoncé l'an dernier qu'il avait mis en place une équipe de quelque dix personnes pour gérer de Stuttgart le dossier Porsche.

Une autre alternative également évoquée par les experts serait le rachat par Porsche de la holding Porsche basée à Salzbourg. Propriété des deux familles, c'est l'une des plus grosses entreprises privées autrichiennes, distributeur exclusif notamment des marques du groupe VW en Autriche et dans une bonne partie des pays de l'Est. Porsche utiliserait à cet effet l'argent récupéré par l'augmentation de capital. L'opération aurait l'avantage de donner des liquidités au clan Piëch qui pourrait ensuite monter directement dans le capital de Volkswagen et s'assurer nettement en plus des 29,9% de Porsche sa majorité absolue.

Car il est clair que d'une manière ou d'une autre, Ferdinand Piëch, qui a toujours rêvé grand pour Volkswagen, n'hésitant pas même à mettre des milliards pour récupérer pendant quelques années la marque Rolls-Royce, veut faire rentrer Volkswagen dans sa galaxie. L'homme, dont on dit qu'il a de l'essence dans les veines, s'est toujours fixé comme objectif de rester dans l'Histoire. Avec son grand-père, à l'origine de la création de Volkswagen.

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