Un plateau nu rectangulaire. Sur sa bordure, une femme dans une robe élégante court. Son visage est dissimulé par un voile léger. Elle court, elle court alors que le centre de cette scène de couleur rouge sang s'étend à tout l'espace. Course folle d'une inconnue comme pour échapper à quelqu'un, à un piège alors que l'on entend des voix d'homme appelant une certaine Anne au téléphone. Ils laissent des messages injurieux, menaçants du genre "sale petite pute", des messages pornos, des messages de proches plus familiers.

Cette Anne, qui prendra d'autres consonances comme Annie ou encore Anya, est l'héroïne cachée de la pièce du Britannique Marin Crimp, "Atteintes à sa vie", que met en scène Joël Jouanneau au Théâtre de la Cité Internationale à Paris dans le cadre du Festival d'Automne. L'auteur a construit sa pièce comme une enquête. Il propose 17 scénarii qui peuvent faire croire à une prostituée, une terroriste, à une personne engagée dans une oeuvre humanitaire, une artiste plasticienne, etc. Une identité qui fuit à chaque fois que les hommes cherchent à reconstituer un puzzle qui ne se laisse pas faire. Des hommes qui jouent eux-mêmes les "contacts" supposés d'Annie.

A cette vaine recherche de vérité qui peut énerver - dans ce monde, nous sommes tous porteurs d'identités multiples, semble se demander l'auteur -, Jouanneau préfère mettre en éveil nos sens par une mise en scène très sophistiquée qui fonctionne très bien, reconnaissons-le. Le plateau devient ring, espace de tournage de film (des images étonnamment cadrées sont projetées en direct), lieu d'habitation ou salle d'exposition. La troupe, excellente, chante et parfois danse. Il y a parfois une ambiance "Blues Brothers", très rock. Mais on cherche toujours la femme.


Jusqu'au 3 décembre au Théâtre de la Cité Internationale à Paris à 20h30, 15h le dimanche, relâche le mercredi. Tél: 01 42 74 22 77/01 53 45 17 17.