Sakhaline 2 : le Japon et l'UE mettent la Russie en garde

Le gouvernement japonais avertit le Kremlin que le retrait par les autorités russes de l'autorisation accordée à Shell pour exploiter le champ gazier de Sakhaline 2 pourrait tendre les relations entre les deux pays. De son côté, la Commission européenne déclare prendre l'affaire "très au sérieux".

Les relations diplomatiques entre Tokyo et Moscou pourraient pâtir de l'annulation prononcée par les autorités russes des droits du géant pétrolier Shell sur le projet de développement du gisement pétrolier et gazier de Sakhaline 2. C'est en substance ce qu'a laissé entendre dans la nuit Shinzo Abe, le porte-parole du gouvernement japonais, indiquant qu'une telle décision pourrait avoir "un impact négatif" sur les relations entre les deux pays. Shell est en effet accompagné dans ce projet par deux partenaires minoritaires japonais.

"Le gouvernement japonais craint que tout retard dans les projets de coopération majeurs entre la Russie et le Japon, tel que le symbolique Sakhaline 2, ait un impact négatif sur les relations russo-japonaises en général", a averti le numéro deux du gouvernement nippon, pressenti pour succéder à l'actuel Premier ministre Junichiro Koizumi. "Nous avons fait part de nos inquiétudes à la Russie et réclamé un processus transparent ainsi que l'assurance que le projet sera mené à bien sans accroc", a-t-il ajouté.

Pour sa part, la Commission européenne a déclaré ce matin prendre la décision russe "très au sérieux". Pour faire en sorte que "les compagnies soient disposées à investir dans des projets énergétiques de plusieurs milliards d'euros, il est nécessaire de leur offrir, en Russie comme dans l'UE ou dans tout autre pays, un climat d'investissement sûr et prévisible", estime Andris Piebalgs, le commissaire à l'Energie. Ce dernier appelle en outre
la Russie à "identifier clairement" les problèmes à l'origine du retrait du permis environnemental accordé au pétrolier Shell.

Détenu à 55% par la compagnie anglo-néerlandaise Royal Dutch Shell, et à 45% par deux groupes de négoce japonais Mitsui et Mitsubishi Corporation, le consortium Sakhaline 2, projet situé sur l'île du même nom en Extrême-Orient, est avec 20 milliards de dollars le plus important investissement mondial privé jamais réalisé dans le secteur énergétique. C'est également le plus gros investissement étranger en Russie.

Restant optimiste, le ministre japonais de l'Economie, du Commerce et de l'Industrie, Toshihiro Nikai, a indiqué qu'il allait s'entretenir prochainement avec l'ambassadeur de Russie au Japon, Alexandre Lossioukov. "Je crois qu'il y aura moyen de sortir de cette impasse en négociant patiemment", a-t-il souligné, en promettant d'"activer ses contacts pour que le problème soit résolu calmement et rapidement".

Engagé en 2003, le projet vise à exporter par bateau, à partir de l'été 2008 et sur une durée de 20 ans, du gaz naturel liquéfié (GNL) aux grandes compagnies japonaises d'électricité et de gaz. Mais hier, le Parquet général russe a annoncé qu'il annulait par décret une expertise écologique aux conclusions positives qui donnait toute latitude à Shell pour développer ses activités. De fait, cette annulation entraîne pour le moment l'arrêt pur et simple des travaux. Les observateurs interprètent cette mesure comme une préoccupation avant tout d'ordre politique, servant la volonté du Kremlin d'accroître son contrôle sur le secteur énergétique devenu hautement stratégique.

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