Menaces écologiques pour George W. Bush

Le documentaire d'Al Gore sur le réchauffement climatique rencontre un réel succès aux Etats-Unis et fragilise les arguments du président américain contre le protocole de Kyoto. Un autre film sur la manière dont les lobbies pétroliers et de l'automobile ont étouffé dans l'oeuf la voiture électrique pourrait avoir les mêmes effets.

L'administration Bush, on le sait, ne veut pas entendre parler du protocole de Kyoto qu'elle juge incompatible avec le maintien de la compétitivité de l'économie américaine. Dans sa presque totalité, le camp républicain fustige ce traité qui vise à faire diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans les principaux pays industrialisés. Qualifié de "frein à la croissance", l'accord ratifié notamment par l'Union européenne, le Canada, le Japon et la Russie, est aussi critiqué parce qu'il n'impose aucune contrainte à des pays émergents tels que la Chine ou l'Inde. Longtemps, surtout dans les zones industrielles, l'administration Bush a su faire passer avec une réussite certaine le message suivant: "le protocole de Kyoto tue les emplois américains".

Mais les temps, comme le climat, changent. Les bouleversements météorologiques, les ravages des ouragans (la saison qui débute à peine risque encore une fois de déstabiliser le sud-est américain) et quelques films catastrophe ont provoqué une vraie prise de conscience dans l'opinion publique. Dernier signe en date de cette mutation, le succès - plus que d'estime - qu'enregistre actuellement le documentaire réalisé par Al Gore, ancien vice-président de Bill Clinton de 1992 à 2000 et candidat malheureux à la présidentielle de 2000 face à Bush.

Intitulé "La vérité qui dérange" ("An inconvenient truth"), ce film démontre l'impact désastreux des changements climatiques et les liens de causalité entre les émissions de gaz carbonique et le réchauffement de la planète. Salué par la majorité des critiques, accueilli avec bienveillance par les groupes écologistes, le documentaire se classait à la mi-juin à la onzième place du box-office américain avec une recette moyenne par écran de 12.000 dollars. Une performance notable dans un pays où "l'entertainment" est roi.

L'audience de ce documentaire a été telle, en fait, que plusieurs lobbies proches du camp républicain ont été forcés de réagir en diligentant des campagnes publicitaires sur le thème du "le carbone, c'est la vie" (!). Dans le même temps, les commentateurs pro-Bush ont immédiatement avancé l'hypothèse d'une candidature de Gore aux présidentielles de 2008. "Je ne suis pas candidat", a répliqué Gore qui, tout en dénonçant l'administration Bush ("une bande de renégats extrémistes de droite", selon lui), a assuré qu'il entendait faire de l'écologie et de l'énergie propre son principal combat.

Conscient de l'inquiétude des Américains, mais aussi de leur grogne vis-à-vis des prix de l'énergie (le prix de l'essence a pratiquement doublé entre 2000 et 2006), le président américain ne cesse de répéter qu'il entend développer les énergies alternatives aux hydrocarbures. Mais là aussi, le discours va désormais passer moins facilement car, déjà, un autre film documentaire se profile.

Réalisée par Chris Paine, cette enquête sort cette semaine sur les écrans américains et s'intitule "Qui a tué la voiture électrique?" ("Who killed the electric car?"). Le sujet concerne la EV-1, voiture électrique construite par General Motors au début des années 1990 pour accompagner la législation anti-pollution californienne. Avec un moteur totalement électrique et une autonomie de 200 kilomètres, ce modèle a été vendu à près de 1.000 unités avant de disparaître, "tué" par plusieurs mains. Celles du lobby pétrolier mais aussi des constructeurs eux-mêmes (à commencer par General Motors qui a joué un double-jeu dans le drame en sacrifiant un modèle qui ne pouvait guère lui rapporter en vente de pièces de rechange). Le tout avec la bénédiction du pouvoir politique.

En sortant de la salle de cinéma, ceux qui auront vu ce documentaire auront du mal à croire George W.Bush lorsqu'il assurera oeuvrer pour la fin du tout hydrocarbures aux Etats-Unis...

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