Droits d'auteur : le retrait de la licence globale parasite le débat

Le retrait par le gouvernement de l'article 1 comportant les amendements sur la licence globale ont provoqué un tollé à gauche. Après la licence globale optionnelle auprès de l'internaute, le PS prône sur une taxe obligatoire prélevée chez les fournisseurs d'accès Internet.

C'est à lui seul un débat dans le débat: le retrait à la hussarde par le gouvernement de l'article 1, à la veille du début des discussions sur les droits d'auteurs à l'Assemblée nationale n'est pas passé inaperçu. Il a même occupé une grande partie de la discussion mardi soir, jusqu'à ce que le président de l'Assemblée nationale Jean-Louis Debré ne décide une suspension de séance, sans calmer pour autant les ardeurs. Jean-Louis Debré a tenté de convaincre l'Hémicycle du bienfait d'une initiative destinée à "assurer la sincérité et la clarté des débats" et surtout du droit qu'avait le gouvernement de la prendre. En vain.

Pour la gauche, le retrait de cet article est un "passage en force". "Vous dites que ce retrait est constitutionnel. C'est le Conseil constitutionnel qui en décidera. Nous allons déposer un recours sur ce point", a tonné le président du groupe socialiste, Jean-Marc Ayrault.

En retirant l'article 1, le gouvernement a voulu semble-t-il gagner du temps. Cet article comprenait les amendements votés en décembre qui ouvraient la voie à la licence globale qu'il combattait. De fait, l'article premier était encore en discussion et la procédure qui aurait pu le rendre finalement caduc promettait d'être longue et laborieuse. Une perspective à laquelle le gouvernement a préféré la méthode musclée. Du côté du Parti socialiste et du PC, on s'est alors demandé pourquoi le gouvernement n'était pas allé au bout de sa logique, en retirant l'intégralité du projet.

Le gouvernement a remplacé l'article 1 par un article additionnel, instituant quatre exceptions aux droits d'auteurs, concernant "certains actes techniques de reproduction provisoire", et en faveur des handicapés, des bibliothèques et services d'archives, ainsi que de la presse. "On nous fait encore le coup de l'amendement surprise!", s'est indigné le président de l'UDF François Bayrou, opposé au projet. Les députés de droite Christine Boutin (UMP) et Alain Suguenot ainsi que le PS ont déposé de nouveaux amendements incluant le téléchargement sur Internet dans la copie privée. Mais tous ont été rejetés à l'issue du vote.

Licence obligatoire

Les opposants au nouveau projet de loi du gouvernement sont restés campés sur leurs positions. Quoiqu'au Parti Socialiste (PS), on ait changé son fusil d'épaule. S'inspirant du fonctionnement de la télévision et de la radio, Patrick Bloche (PS) a martelé "la nécessité d'une licence globale obligatoire", et non plus optionnelle comme proposé en décembre dernier, qui reviendrait à prélever une taxe directement via les fournisseurs d'accès Internet (FAI). Une amendement sera déposé en ce sens. Ironie de l'histoire, c'est une mesure de la sorte qui était réclamée il y a deux ans à cors et à cri par l'industrie du disque, qui, en proie à la baisse de ses ventes, accusait les FAI d'incitation au piratage.

Le député socialiste a également mis en doute la pertinence du système allégé de répression de l'internaute qu'a proposé le ministre de la Culture et de la Communication Renaud Donnedieu de Vabres pour calmer les foules (lire ci-contre). "Comment interdire sans sanctionner?", s'est demandé à la tribune Patrick Bloche. "Nous demandons l'abandon de la répression qui étatise les droits d'auteur et banalise la gratuité".

La droite compte encore ses opposants. Outre Alain Suguenot, Christine Boutin reste en faveur de la licence globale optionnelle. "Concernant la soi-disant gratuité, la licence globale est une rémunération", affirme-t-elle. Elle a pointé du doigt les "artistes installés" qui profiteraient de leur position pour défendre les intérêts acquis.

Le dispositif du projet de loi consacrant les systèmes de protection des oeuvres, les DRM, et leur interopérabilité a été vivement critiqué. En obligeant les éditeurs de logiciels de "peer-to-peer" à proposer ces systèmes, on "bride l'innovation", selon Patrick Bloche. "Les logiciels libres constituent un grand enjeu d'indépendance", pour François Bayrou, qui vise en filigrane les Apple et autre Microsoft, aujourd'hui à l'origine de ces fameux DRM.

Au delà du débat manichéen entre licence globale et droit de copies, le PC a proposé une troisième voie, "celle de la mise en place d'une plate-forme de téléchargement publique financée par les FAI, l'e-commerce et les internautes". Les débats vont se poursuivre ce soir et jeudi.

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