La réforme du dialogue social proposée par le CES divise patronat et syndicats

La réforme du dialogue social proposée par le Conseil économique et social (CES) est aussi radicale que non consensuelle. En proposant une modification des règles de validation des accords collectifs et de représentativité des organisations syndicales, l'instance consultative des pouvoirs publics sur les questions économiques et sociales a mis en évidence le fossé qui sépare les partisans du changement et les adeptes du statu quo. D'un côté, la CGT et la CFDT, les deux principales organisations syndicales, ainsi que l'UPA, le patronat de l'artisanat, se prononcent en faveur d'une représentativité des syndicats fondée sur les résultats d'une élection organisée au niveau national et à laquelle tous les salariés pourraient participer. Cette représentativité nationale remplacerait la représentativité irréfragable figée par une loi de 1950 et un arrêté de 1966, et qui donne le privilège à cinq syndicats (CGT, CFDT, FO, CFTC et CGC) de négocier des accords interprofessionnels au niveau national et de présenter des candidats au premier tour des élections professionnelles notamment. Pour le CES, qui a adopté en commission ce projet d'avis, il s'agit d'appliquer les "mêmes critères et les mêmes principes de représentativité" à l'ensemble des organisations syndicales à partir du moment où elles sont légalement constituées et indépendantes. Cette position a bien sûr les faveurs de l'Unsa et de Solidaires (syndicats Sud), les deux nouveaux venus dans le paysage syndical depuis la mise en place des règles actuelles de représentativité.Outre la modification des règles de représentativité syndicale, CGT, CFDT et UPA plaident pour une réforme de la validation des accords tendant vers une majorité d'engagement, même si celle-ci est relative dans un premier temps (cela signifie que les syndicats signataires doivent représenter un nombre de salariés supérieur à celui que représentent les non-signataires). Cette règle s'appliquerait aux trois niveaux de contractualisation - national, branche et entreprise -, alors qu'aujourd'hui prévaut la règle du droit d'opposition ou de la validation par une majorité d'organisations syndicales, même si celles-ci sont minoritaires en voix.C'est cette réforme qualifiée d'"ambitieuse" par la CFDT, visant à rendre le dialogue social "plus efficace et plus démocratique" que conteste FO, la CFTC, la CGC et le groupe des entreprises privée au CES, à savoir le Medef et la CGPME. Pour Denis Gautier-Sauvagnac (Medef), le projet d'avis oriente les représentants des salariés "d'un syndicalisme d'adhésion vers un syndicalisme de représentation où l'onction électorale dispense de rechercher prioritairement des adhérents". Pourtant, le texte indique que "la légitimité des organisations syndicales repose avant tout sur leur capacité à élaborer des propositions collectives (...)", et "cette capacité se manifeste d'abord par leur nombre d'adhérents". Le Medef et la CGPE ont annoncé qu'ils ne prendraient pas part au vote. Dès lors, étant donnée la profonde division des principaux intéressés, il semble peu probable que le gouvernement, qui a saisi le CES sur ce thème mais a déjà déposé sa propre réforme du dialogue social à l'Assemblée nationale - elle prévoit d'inscrire dans la loi l'obligation pour le gouvernement de consulter les partenaires sociaux avant certaines réformes relatives au droit du travail - "donne une suite effective" à ce texte, comme l'a demandé la CFDT. Il n'est même pas sûr que les candidats à la présidentielle reprennent à leur compte une telle réforme, alors même que nombre d'acteurs et de rapports estiment dépassé le système actuel de relations sociales en France.
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