Roland Petit questionne Proust

Entrée gagnante au répertoire du Ballet de l'Opéra de Paris de la pièce du chorégraphe Roland Petit, "Proust ou les intermittences du coeur". Une succession de belles émotions portées par l'intelligence des choix musicaux et la qualité théâtrale des danseurs.

C'était jeudi soir, 1er mars. Quand le rideau de la salle Garnier de l'Opéra de Paris est retombé après le treizièmè et dernier tableau de "Proust ou les intermittences du coeur", oeuvre chorégraphique de Roland Petit qui faisait son entrée au répertoire du Ballet de l'Opéra, ce fut un triomphe. Public debout, Roland Petit (83 ans) tout à son bonheur, excité comme un jeune loup au milieu des danseuses et danseurs, et des saluts pendant plus d'un quart d'heure.

La naissance publique de ces "Intermittences du coeur" date de 1974, à Monte-Carlo par le Ballet de Marseille. Roland Petit, qui en est alors le directeur, tournera ensuite dans le monde entier avec cette adaptation du roman fleuve d'"A la recherche du temps perdu" de Marcel Proust, et passera par Paris, dans la salle Garnier avec cette même troupe de Marseille, en 1988.

Ce qui frappe toujours dans ce magnifique travail où le classicisme est régulièrement truffé d'éléments perturbateurs (danse moderne, notamment dans un tableau en contre-jour...) et provocateurs (corps nus...), ce sont les choix musicaux pour accompagner les "paradis proustiens" de la première partie et ses "enfers" dans la seconde. Symbiose magnifique des notes, des images et des corps.

On voyage (avec orchestre dans la fosse) entre "L'Heure exquise" (Hahn), ce désir/croyance du clan Verdurin/Guermantes d'être au centre du monde et "Rienzi" (Wagner), où c'est la mort qui frappe et ravive les vains souvenirs expressionnistes d'un passé qui s'effondre, en passant par "La mer" (Debussy) pour retrouver des jeunes filles en fleur ou encore la "Marche héroïque" (Saint-Saëns) pour descendre dans les enfers sexuels de Monsieur de Charlus.

Fortement musical, ce "Proust" de Roland Petit est également terriblement théâtral. Ce qui plait manifestement aux danseurs. L'autre soir, Eleonora Abbagnato (Albertine), Manuel Legris (monsieur de Charlus), Hervé Moreau (Proust jeune) et les autres étaient rayonnants.


"Proust ou les intermittences du coeur" à l'Opéra Garnier en alternance jusqu'au 31 mars. Réservations: 08 92 89 90 90. www.operadeparis.fr
Précision: l'école de danse de l'Opéra national de Paris dirigée par Elisabeth Platel présente à l'Opéra Garnier un spectacle les 5, 6, 10 et 11 mars ("Le Prisonnier du Caucase", "Napoli" et "Yondering"). Trois types de musique et trois esprits de danse dont nous reparlerons

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