Début de polémique à Paris après la libération des infirmières et du médecin détenus à Tripoli

Les infirmières bulgares et le médecin d'origine palestinienne sont arrivés ce mardi matin à Sofia à bord d'un avion de la présidence française. Les efforts conjugués de Paris et Bruxelles ont payé. En France, un début de polémique se fait jour.

Joli succès diplomatique pour Paris et l'Union européenne! Les cinq infirmières bulgares et le médecin d'origine palestinienne, condamnés à mort pour avoir prétendument inoculé le virus du sida à des centaines d'enfants libyens, sont arrivés ce mardi matin à Sofia à bord d'un avion de la présidence française. Le président bulgare Guéorgui Parvanov les a graciés immédiatement.

Le Haut-Conseil judiciaire libyen avait commué la semaine dernière en prison à vie la condamnation à mort des six détenus depuis 1999. Cette décision a ouvert la voie à leur rapatriement en vertu d'un accord de 1984 sur les échanges de prisonniers. "Le président de la République française, monsieur Nicolas Sarkozy, et le président de la Commission européenne, monsieur José Manuel Barroso, se félicitent de l'accord qui a enfin permis cette libération et ce retour en Bulgarie des infirmières détenues depuis plus de huit ans, et du médecin palestinien, ainsi que de la mise en place d'un dispositif amélioré pour assurer les soins délivrés aux enfants victimes du sida en Libye", souligne un communiqué de la Commission européenne et de l'Elysée.

La commissaire européenne aux Affaires extérieures, Benita Ferrero-Waldner, l'épouse du président français, Cécilia Sarkozy, et le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, qui s'étaient rendus dimanche en Libye pour finaliser les discussions, se trouvent aussi à bord de l'avion français. Nicolas Sarkozy et José Manuel Barroso "saluent le geste d'humanité de la Libye et de son plus haut dirigeant et s'engagent à tout faire pour aider les enfants atteints du sida", poursuit le communiqué qui mentionne la "médiation" accomplie dans ce dossier par l'émir du Qatar.

"Ce dénouement n'aurait pas été possible sans les efforts et la détermination de la Commission européenne, et plus particulièrement du membre de la Commission européenne chargée des relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner, tout au long du processus, et sans l'engagement personnel de madame Cécilia Sarkozy", conclut le communiqué. Le porte-parole de la Commission européenne, Johannes Laitenberger, a précisé que José Manuel Barroso s'était entretenu au téléphone avec Mouammar Kadhafi lundi.

"Les négociations ont duré toute la nuit", a déclaré de son côté David Martinon, porte-parole de l'Elysée, sur RTL. "Le président de la République est resté debout toute la nuit. Il est resté au téléphone avec les négociateurs sur place et le président Barroso", a-t-il précisé, ajoutant: "Ça aura été dur jusqu'au bout."

De source libyenne proche du dossier, contactée d'Alger par l'agence Reuter, on déclare que l'accord conclu prévoit une aide médicale européenne à la Libye ainsi qu'un chapitre sur les relations politiques. "Il y a eu un accord sur l'équipement de l'hôpital de Benghazi et sur les soins à apporter aux enfants (...) Toutes les questions politiques ont été réglées", a-t-on précisé. L'UE, a-t-on ajouté de même source, a accepté d'améliorer ses relations avec Tripoli et de mettre en place un partenariat, notamment commercial. Vendredi dernier, l'UE avait laissé entendre que les relations commerciales et politiques avec la Libye pourraient bénéficier d'une résolution satisfaisante de la crise.

Les cinq infirmières bulgares et le médecin d'origine palestinienne ont été condamnés à mort en décembre 2006 après avoir été reconnus coupables d'avoir inoculé sciemment le virus du sida à 426 enfants libyens lorsqu'ils travaillaient dans un hôpital pour enfants de la ville de Benghazi au début des années 1990. Ils ont nié en bloc les accusations portées contre eux, affirmant que les conditions d'hygiène déplorables à l'hôpital de Benghazi étaient à l'origine de la contamination. Ils affirmaient en outre que leurs supposés aveux leur avaient été extorqués sous la torture.

Les familles des enfants contaminés ont reçu des indemnités s'élevant à plusieurs centaines de millions de dollars la semaine dernière, des sommes tirées d'un fonds mis en place par la Fondation Kadhafi. Nicolas Sarkozy entame un voyage au Sénégal et au Gabon jeudi, mais il se rendra d'abord en Libye ce mercredi.

Un début de polémique s'est fait jour assez vite dans la journée de mardi à Paris. Socialistes et communistes se sont réjouis de la libération des prisonniers en Libye mais ont demandé des précisions sur la façon dont les négociations avaient été menées par la France. "Il s'agit là, avant tout, d'un succès de l'Europe", estime le PS dans un communiqué, en saluant l'action de la Commission européenne et des présidences successives de l'Union. "La France s'est elle aussi impliquée dans cette libération, en particulier au moment de la finalisation de la négociation (...) Le PS, tout en se félicitant de ce résultat, s'interroge sur la conduite et l'organisation de la diplomatie française. Il souhaite que soient précisés le rôle et la responsabilité de chacun (...) Le PS demande que la clarté soit faite sur les conditions de ces discussions, et notamment sur les contreparties demandées et obtenues par le colonel Kadhafi. Le parlement devra, le moment venu, en être informé: le PS y veillera".

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