Kurt Beck réélu chef du SPD en rallumant la fibre sociale du parti

Kurt Beck a été largement réélu à la tête du parti social-démocrate allemand (SPD). Son programme économique veut corriger l'héritage des réformes sociales de l'ex-chancelier Schröder, qui lui a apporté son soutien.

Avec 95,5% des suffrages, Kurt Beck a été réélu à la tête du parti social-démocrate allemand (SPD). Après ce vrai plébiscite, l'homme fort du SPD a axé son discours sur la nécessité de la proximité des sociaux-démocrates avec les citoyens allemands, dont nombreux se disent exclus de la reprise économique animant le pays.

Dans un discours devant 525 délégués du parti, Beck affiche sa volonté de voir corrigées les réformes du passé lesquelles, en revenant sur des acquis de l'Etat providence et flexibilisant le marché du travail, avaient cueilli à froid les militants de la SPD. Des milliers d'entre eux ont déserté le parti. Ces réformes ont surtout causé des désastres électoraux en série jusqu'à la défaite de la coalition avec les Verts l'automne 2005 aux élections législatives anticipées. Ces réformes ont cependant posé les jalons de l'actuelle reprise économique qui perdure depuis 2006, a rappelé Kurt Beck. Le passif au bilan est que "la reprise n'est pas encore parvenue chez tous".

Durant un discours de près de deux heures, prononcé sur fond de bannière "la croissance pour tous", Kurt Beck a défendu le besoin de revenir à un cours plus social dans la stratégie du SPD. Cela passe notamment par l'instauration d'un salaire minimal généralisé, un "signal" fort à adresser à la société. Par ailleurs, Beck a tiré à boulets rouges sur l'assouplissement accru du droit du licenciement, défendu par le CDU, le parti de droit auquel est associé le SPD dans une "grande coalition. Pas davantage le parti de gauche est-il prêt à revenir sur l'accord passé avec les fournisseurs d'énergie pour sortir de l'énergie nucléaire. Des thèmes qui reviendront pour les élections législatives qui se profilent dans deux ans.

Pour rallumer la fibre sociale du parti, Beck a défendu sa proposition de rallonger la durée des allocations chômage aux plus de 45 ans, un thème qui reçoit un large soutien dans les sondages d'opinion. Au SPD, même l'ancien chancelier Gerhard Schröder n'y trouve rien à redire. L'inspirateur des réformes aujourd'hui décriées a été très chaudement applaudi en ouverture du congrès. Gerhard Schröder a reconnu que les réformes répondant sous le label "Agenda 2010", ont été décidées pour répondre aux défis posés par la globalisation et la démographie. Elles étaient "un instrument, non un objectif". Ces mesures sont donc, selon lui, "modifiables". Gerhard Schröder juge que "le mieux est l'ennemi du bien. Mais justement le mieux, pas le plus populaire".

La question de la candidature à la chancellerie pour reprendre la tête du pouvoir à Angela Merkel ne sera pas réglée lors de ce congrès. Beck, par ailleurs président de la région de Rhénanie-Palatinat, souffre d'un manque de reconnaissance au niveau fédéral. On ne lui prête aucune chance face à Angela Merkel en 2009. A la tête du SPD, il sera entouré désormais d'un trio de vice-présidents, constitué aujourd'hui. L'un de ces trois hommes, le ministre des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, largement soutenu par 85,5% des délégués, est souvent cité comme un bon candidat possible à la chancellerie. Le deuxième, Peer Steinbrück, actuel ministre des finances et éminence économique du parti, a recueilli 75,5% des voix. Il devance de peu la représentante de l'aile gauche, Andrea Nahles, qui obtient 74,8% des voix. Celle-ci a largement inspiré le programme fondateur du parti, qui doit être approuvé dimanche. Il devra remplacer le précédent texte, adopté à l'automne 1989, peu de jours avant la chute du Mur et devenu de fait largement obsolète avec le temps.

La belle unité affichée aujourd'hui devrait céder place demain à un débat qui tiraille le parti à propos de la privatisation de la compagnie ferroviaire Deutsche Bahn. Ce projet qui doit encore passer l'obstacle législatif est mis en péril dans ses contours actuels, du fait précisément de l'opposition tenace de franges importantes du SPD. Comme cela se produit souvent dans un congrès de parti, les délégués devraient trouver là un thème pour mettre en minorité la direction du parti, prévoit l'ancien ministre des finances et membre du SPD, Hans Eichel. Ce dernier se dit favorable à la privatisation qui pourrait attirer des investisseurs stables, et s'imagine bien des participations croisées avec d'autres compagnies ferroviaires européennes, telles que la SNCF.

Violemment attaquée par Kurt Beck, la CDU a riposté. Son secrétaire général Ronald Pofalla a critiqué l'attitude du chef du SPD prompt à se rapprocher des thèses de l'extrême gauche et de son chef, Oskar Lafontaine, un ex-dirigeant du SPD.

Début novembre, doit se réunir la commission de la "grande coalition" qui réunit SPD et CDU, autour de la chancelière Angela Merkel. Les deux partis devront alors s'accorder sur des réformes, comme la révision des règles d'indemnisation des chômeurs plus âgés. Mais les oppositions sont nombreuses sur ces réformes. A tel point qu'elle pourrait rester lettre morte.

Ainsi, le ton dans la coalition devrait du reste devenir de plus en plus tendu et bloquer tous grands dessins de réformes. Car dans quelques mois se dérouleront des tests de popularité pour chacun des grands partis de la coalition lors d'élections régionales. La SPD part à la conquête de trois fiefs de la CDU, la Hesse, la Basse-Saxe et la ville hanséatique de Hambourg.

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