Défiscalisation des "heures sup" : une mesure à contre temps, selon les entreprises

La plupart des entreprises affichent une attitude maussade face à la défiscalisation des heures supplémentaires, qui entre en vigueur aujourd'hui. Même si certaines d'entres elles pensent s'en servir pour faciliter leur recrutement.

Après les félicitations adressées au gouvernement, lors de l'annonce de la défiscalisation des heures supplémentaires, la plupart des entreprises affichent une mauvaise grimace une fois les détails de la mesure connus et décortiqués et les calculettes éteintes. Le dispositif, qui entre en vigueur ce lundi, leur semble aller à contre temps de la réalité de l'heure. Même si certaines d'entre elles constatent que des heures supplémentaires moins coûteuses les aideront à résoudre leurs difficultés de recrutement.

- Une croissance en berne
Les prévisions macroéconomiques ne sont pas au beau fixe. Les entreprises scrutent avec inquiétude leurs carnets de commande. Comment, alors, pourraient-elles accroître le nombre de leurs heures supplémentaires, même si celles-ci leur coûtent moins cher ? Pire, certains DRH (directeurs des ressources humaines) ont calculé que l'avantage financier ne serait pas gigantesque pour l'entreprise. Pas de quoi, en tout cas, l'inciter à travailler plus.

- Un détricotage des 35 heures déjà réalisé
Le dispositif vise, par effet induit, à glisser un peu de souplesse dans la loi des 35 heures. Or, les entreprises, notamment dans l'industrie, ont signé des accords d'annualisation du temps de travail pour adapter le temps de travail au rythme de l'activité sans payer d'heures supplémentaires. Un peu plus de la moitié des branches sont concernées, dont l'automobile ou la distribution. Pour elles, cette mesure est au mieux improductive, au pire contreproductive. A côté, les secteurs qui emploient majoritairement des cadres, employés au forfait, ne sont pas concernés. Les SSII, les banques, les assurances trouvent un intérêt limité à cette mesure.

- Un vrai effet négatif
Les entreprises de moins de 20 salariés soulignent à l'envie que, en raison de la majoration des heures supplémentaires à 25% pour elles, le coût du travail s'accroît pour les employés recevant 1,3 fois le Smic. Le gouvernement confirme l'analyse même s'il place le seuil à 1,45 fois le Smic.

- Une aide au recrutement
En revanche, les entreprises qui manquent de personnel, comme le BTP, l'hôtellerie-restauration ou les services à la personne affichent un sourire satisfait. Ces secteurs, dont l'activité est souvent bridée par la difficulté de trouver du personnel voient leurs difficultés résolues. Ces secteurs, à la faible attractivité, disposent dès aujourd'hui d'un argument sonnant et trébuchant pour convaincre de potentiels salariés de "travailler plus pour gagner plus". Chez elles.

La CGPME, globalement satisfaite, émet des réserves
La Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) a réaffirmé lundi son soutien aux nouvelles dispositions en faveur des heures supplémentaires tout en soulignant son "surcoût" pour les chefs d'entreprises de moins de 21 salariés. "Inciter financièrement les salariés à travailler plus rompt enfin avec la logique du toujours moins qui prévalait depuis l'entrée en vigueur des 35 heures", se félicite l'organisation patronale. "Pour autant, il est regrettable que la Confédération, qui a appelé à de multiples reprises l'attention des pouvoirs publics sur le surcoût engendré par le nouveau dispositif pour les chefs d'entreprises de moins de 21 salariés, n'ait pas été entendue", poursuit-elle. "En effet, la majoration de la rémunération des heures supplémentaires non plus au taux de 10% mais au taux de 25%" fera perdre aux entreprises de moins de 21 salariés "l'avantage compétitif dont elles bénéficiaient jusqu'à présent", estime la GCPME. Selon elle, la déduction forfaitaire de cotisations patronales de 1,5 euro par heure supplémentaire, qui entre en vigueur ce lundi, ne couvre en effet "le surcoût engendré que pour les salariés dont la rémunération n'excède pas 1,3 SMIC". Selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), le salaire moyen dans les entreprises de 20 salariés ou moins est égal à 1,33 fois le salaire minimum. Environ 75% du contingent d'heures supplémentaires effectuées chaque année en France (environ 900 millions au total) est réalisé dans ces petites entreprises, toujours selon l'OFCE.

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