Syndicats et patronat se divisent sur le principe de la TVA sociale

La CGT et FO, et dans une moindre mesure la CFDT, sont hostiles au projet de basculer sur la TVA une partie du financement de la Sécu. A l'inverse, la CGC défend cette idée depuis des années, et la présidente du Medef se félicite d'une éventuelle réduction du coût du travail.

Comme sur les heures supplémentaires, le projet de TVA sociale du gouvernement divise les partenaires sociaux. A une différence près: les confédérations ne sont pas unanimes sur le sujet. Trois syndicats, CGT, CFDT et FO, sont globalement hostiles à l'idée qu'une partie de la protection sociale soit à l'avenir financée par la taxe sur la valeur ajoutée, l'impôt sur la consommation, mais à des nuances près. En revanche, la CGC préconise depuis dix ans au moins la mise en place d'une cotisation sur la consommation affectée au financement de la protection sociale, ce qui revient à la TVA sociale.

La CGT est "tout à fait défavorable" à l'instauration d'une TVA dite sociale. Pour Pierre-Yves Chaunu, responsable CGT interrogé par l'AFP, "c'est le travail qui doit financer la protection sociale et non un impôt sur la consommation qui pèserait sur l'ensemble des ménages". Une analyse partagée par FO, pour qui la création d'une TVA dite sociale, "en substituant au salaire différé représenté par les cotisations un prélèvement social sur la consommation", "ne fera que fragiliser la pérennité des ressources de la protection sociale collective".

Le syndicat de Jean-Claude Mailly rappelle que la TVA est "l'impôt le plus lourd et le plus injuste car déconnecté des revenus". L'augmentation de cet impôt, "si elle a lieu, se fera au détriment du pouvoir d'achat, de la consommation, et par conséquent de la croissance et de l'emploi", estime FO. La CGT redoute également la "spirale inflationniste" en cas d'augmentation de la TVA.

"Tasse de thé"

De son côté, la CFDT estime que la TVA sociale n'est pas sa "tasse de thé" sans pour autant y être clairement opposée. "Il est hors de question que la TVA, un impôt sur la consommation, participe au financement des retraites et et de l'assurance chômage qui doivent être alimentés par les cotisations", indique Gaby Bonnand, son secrétaire national en charge de la protection sociale. Pour autant, la CFDT se dit prête à "discuter de l'introduction d'une part de TVA dans le financement de risques comme la maladie, mais elle ne doit en aucun cas se subsituer à la CSG et aux cotisations des employeurs".

Si quelques points de TVA étaient affectés aux recettes de la Sécurité sociale, ce serait compensé par la baisse des cotisations patronales sur les salaires. Pour le gouvernement, il s'agirait, en réduisant le coût de la main d'oeuvre pour les entreprises, d'éviter les délocalisations et donc de préserver l'emploi. Ce qui réjouit déjà la présidente du Medef, "impatient (e) de participer au groupe de travail annoncé" par le gouvernement. Mais "la TVA sociale ne peut avoir d'intérêt que si elle permet de transférer vers la TVA une partie des charges des entreprises, notamment les cotisations familiales", explique Laurence Parisot dans Le Figaro jeudi. Même souhait à la CGPME, qui propose d'expérimenter sur deux ans la TVA sociale.

Les trois principales confédérations ne croient pas à la baisse du coût du travail pour préserver l'emploi. "L'argument des délocalisations n'est pas valable dans la mesure où il existe déjà des exonérations de charges pour un montant de 25 milliards d'euros", rappelle Pierres-Yves Chanu. C'est ce que verse chaque année l'Etat aux entreprises au titre des allègements de cotisations sociales patronales sur les bas salaires (jusqu'à 1,6 Smic). Selon ce responsable CGT, "le problème des délocalisations est plutôt lié à des défauts de spécialisation, notamment dans le domaine industriel, et non au coût du ravail".

Modulation des cotisations

Ce point de vue est partagé par la CFDT. "Il ne faut pas tout focaliser sur le coût du travail: c'est avant tout le manque de qualification des salariés et les performances des entreprises dans certains secteurs qui sont en cause", constate Gaby Bonnand. FO pointe pour sa part un risque: que "cette mesure ne s'apparente, une fois de plus, à un processus de dumping fiscal et social avec le risque d'enclencher, entre pays européens, une course vers le fond dont personne ne sortirait indemne".

Pour autant, les syndicats ne sont pas hostiles à des évolutions dans le mode de financement de la protection sociale. La CGT, qui réclame depuis des années la modification de l'assiette des cotisations sociales pour préserver le système de protection sociale, serait plutôt "favorable à une modulation des cotisations patronales en fonction du comportement des entreprises en faveur de l'emploi".

La CGC défend en revanche depuis longtemps l'idée d'une cotisation sur la consommation affectée au financement de la Sécu, compensée par une baisse des cotisations patronales sur la maladie. L'un des arguments mis en avant par le syndicat des cadres est, comme le gouvernement, la lutte contre les délocalisations. Et pour la CGC, une telle cotisation aura un effet neutre pour le consommateur, car la baisse des cotisations patronales entraînera une baisse des prix hors taxes. Mais rien ne dit que les employeurs répercuteront la baisse de leurs cotisations sur le prix de leurs produits à la vente. Divisés sur le principe d'instaurer une TVA sociale, les partenaires sociaux risquent de l'être encore plus sur les modalités de sa mise en oeuvre.

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