Les eurodéputés pour une libéralisation différée de la poste

L'ouverture totale à la concurrence des services postaux pourrait bien être repoussée à début 2011. Les députés européens ont en effet plaidé ce mercredi pour une libéralisation différée. Certaines dérogations ont été introduites pour contenter les pays les plus réticents.

Bientôt, les services postaux seront entièrement libéralisés. Oui, mais quand ? Ce mercredi, les eurodéputés ont bien validé le projet de directive soumettant à la concurrence les lettres de moins de 50 grammes, dernier monopole laissé aux opérateurs nationaux. Cependant, ils ont choisi de reporter la libéralisation effective de deux ans, à janvier 2011. Le temps de permettre aux Etats de parvenir à une position commune.

"L'ouverture à la concurrence du secteur postal est inéluctable. La décision remonte en réalité à 1992", a rappelé le socialiste britannique Brian Simpson. "Pour cette ultime étape, nous avions le choix entre laisser faire ou bien négocier des règles de protection sociale. Le parlement a opté pour une ouverture du marché postal contrôlée, accompagnée de garanties sociales", a-t-il souligné.

La Commission européenne tablait sur une libéralisation totale des services postaux début 2009. Un objectif louable mais trop ambitieux au vu des disparités entre les vingt-sept Etats membres. Ce mercredi, le parlement a choisi de repousser au 1er janvier 2011 cette ouverture à la concurrence. Et surtout de l'assortir de nouvelles garanties pour contenter les pays récalcitrants.

Plusieurs clauses dérogatoires

Le texte permet aux douze nouveaux Etats de bénéficier d'un délai de deux ans supplémentaires, jusqu'en janvier 2013, pour libéraliser totalement leurs services postaux. Sont aussi concernés par cette dérogation les pays dotés "d'une topographie particulièrement difficile, notamment les Etats composés de multiples îles", tout comme ceux "qui ont une faible population et une taille géographique limitée".

Restait à protéger la Suède et le Royaume-Uni, les seuls à ce jour à avoir déjà ouvert à la concurrence l'ensemble de leurs services postaux. C'est chose faite. Une clause empêche les opérateurs des pays retardataires d'aller conquérir les marchés suédois et anglais.

Le parlement a aussi insisté sur la nécessité de prévoir le bon déroulement du financement du "service universel postal". Il s'agit là de l'obligation pour les entreprises d'assurer le droit de tout citoyen de recevoir son courrier une fois par jour, cinq jours sur sept et au même tarif. Une mission de service public aujourd'hui assurée et financée en France grâce au monopole.

Des inquiétudes encore vives

Ces clauses dérogatoires ne suffiront pas à rassurer les plus inquiets. Mardi, 200 employés de la Poste française manifestaient à Strasbourg contre ce projet de directive. Ils craignent que la libéralisation totale rime avec la suppression massive d'emplois. Des craintes nourries par les précédents suédois et anglais. Entre 1990 et 2005, la libéralisation progressive des services postaux en Suède a détruit 34.000 postes. Même bilan en Grande-Bretagne: le plan de restructuration du Royal Mail évince 30.000 employés. Pour réduire les coûts, les services postaux seraient tentés de privilégier les emplois à temps partiel, synonyme de précarité pour les employés.

Face à ces inquiétudes, Bruxelles répond que "la concurrence est créatrice d'emplois" rappelant que les premières étapes de la libéralisation des services postaux ont déjà créé 100.000 emplois depuis 2003.

Les incertitudes demeurent. Une chose est sûre: il va être difficile pour les vingt-sept Etats membres de définir une position commune. Optimiste, un député européen table sur le printemps 2008. Un beau pari.

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