Nelly Kroes réaffirme la nécessité de scinder les groupes d'énergie

La commissaire européenne à la Concurrence Nelly Kroes a souligné à Berlin les carences du marché européen de l'énergie en termes de transparence et d'ouverture à la concurrence. Elle plaide pour la scission entre production et distribution, que refuse la France. Elle s'en est prise également aux propos de Nicolas Sarkozy souhaitant davantage de protectionnisme.

"Nous avons décidé de libéraliser le marché de l'énergie au siècle dernier, mais les pays membres (de l'Union européenne) ne réagissent pas comme attendu. Les marchés restent cloisonnés. Une frontière reste une frontière en ce qui concerne la situation des marchés de l'énergie", a martelé la commissaire européenne à la Concurrence Nelly Kroes, à l'issue d'une rencontre à huis clos tenue sur deux jours à Berlin entre les vingt-sept pays de l'Union sur la politique de l'énergie en Europe.

La commissaire a souligné les carences du marché européen de l'énergie en termes de transparence et d'ouverture à la concurrence. Tout en félicitant l'Allemagne pour son engagement sur ce dossier depuis le début de sa présidence de l'Union, elle a souligné la ferme volonté de la Commission d'obtenir d'ici deux ans des avancées concrètes pour parvenir à un marché unique de l'énergie en Europe.

Un objectif partagé par l'Allemagne, le désaccord entre Berlin, les autres pays membres et Bruxelles étant centré sur les mesures à prendre pour y parvenir. Le secrétaire d'Etat au ministère allemand de l'Economie, Joachim Wuermeling, a souligné de son côté que chaque citoyen et chaque entreprise devraient avoir la possibilité d'acheter son énergie partout en Europe. Et de souligner qu'un marché ouvert permet de contribuer davantage à la protection de l'environnement, à la sécurité des approvisionnements et à des prix maîtrisés. La discussion actuelle lui semble trop concentrée sur la question sensible de la scission des groupes d'énergie entre leur outil de production et le réseau de transport de l'énergie, voulue par Bruxelles.

Si la France est vent debout contre cette idée, Berlin semble plus nuancé dans la critique: "le gouvernement français a une position plus ferme. Nous pensons qu'il ne faut rien exclure de manière définitive, mais estimons que d'autres mesures peuvent être prises" pour satisfaire l'objectif d'améliorer l'efficience des marchés de l'énergie sur le continent, a indiqué Joachim Wuermeling à La Tribune en marge de la conférence de presse.

L'Allemagne "met la pression" en matière de politique énergétique durant sa présidence européenne, a-t-il affirmé plus tôt. Plutôt que d'envisager un dépeçage des groupes d'énergie comme le souhaite Bruxelles, il souhaite que "beaucoup d'autres mesures" soient prises telles que le fait de garantir l'accès de tout opérateur aux réseaux de distribution et l'obligation d'investir dans la sécurité et la qualité des infrastructures, tout comme la mise à disposition de capacités de production pour faciliter les échanges d'énergie entre pays membres.

Nelly Kroes considère encore la scission des groupes d'énergie comme la solution la plus efficace pour renforcer la concurrence en Europe et réduire les écarts de prix encore importants entre pays, citant la différence de près de 30% en plus sur les tarifs d'énergie à subir par les consommateurs et industriels allemands par rapport aux clients britanniques. Une différence qui s'explique surtout par le niveau des taxes, affirment les grands de l'énergie en Allemagne.

Le commissaire à l'Energie Andris Piebalgs soutient également le projet visant à rompre la maîtrise verticale du secteur de l'énergie, comme elle est pratiquée par les opérateurs EDF en France et les quatre grands groupes allemands d'énergie dont E.ON et RWE.

Nelly Kroes a indiqué que la Commission à Bruxelles espère présenter après l'été un paquet législatif pour la politique énergétique européenne. Une adoption de directives est visée dans les deux années à venir, selon Wuermeling. La meilleure coopération entre autorités de régulation et la coordination entre opérateurs de réseaux seront des aspects également visés par ces textes européens.


Nelly Kroes fustige les propos protectionnistes de Sarkozy sans le nommer
La commissaire à la Concurrence Neelie Kroes s'en est prise vivement, sans le citer, à Nicolas Sarkozy lors de la conférence de presse sur l'énergie tenue ce matin à Berlin. "J'ai été choquée de lire dans le Financial Times qu'un candidat à l'élection présidentielle en France se prononce pour davantage de protectionnisme" en matière de politique industrielle, a-t-elle lancé. Neelie Kroes a jugé ces propos "archaïques" et rappelé que la France détenait en 2005 le second rang des nations en termes d'investissements à l'étranger, avec un total de 115 milliards de dollars (88,5 milliards d'euros). "J'espère que ce ne sont là que des propos de campagne électorale", a conclu sur ce chapitre la commissaire. L'édition du Financial Times de vendredi rapporte des propos de Nicolas Sarkozy lors d'un meeting, où il a regretté qu'on ait laissé le groupe franco-luxembourgeois Arcelor passer sous contrôle de l'indien Mittal. "Si je suis président, la France aura une réelle politique industrielle", est-il cité dans l'article titré "Sarkozy résolu à bloquer les acquisitions de l'étranger".

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