Bénin, un art royal

En 280 objets exceptionnels, l'histoire d'un des plus influents royaumes africains est ici racontée, avec une scénographie - et des explications - de haut niveau. A découvrir.

"Se souvenir" en langue ebo au sud du Nigeria se traduit par "couler un motif en bronze". Le ton est donné, ou presque. Le Royaume du Bénin, et ses artistes, ont dominé une grande partie de la culture africaine entre le XVème et le XIXème siècle, grâce à des sculptures métalliques d'une qualité exceptionnelle, sculptures reflétant les règles très établies d'une Cour fortement hiérarchisée.

Cette civilisation, déjà très développée dès le XIIème siècle, a su profiter des échanges avec l'Europe, les premiers portugais, célébrés avec faste, ayant débarqué en 1486. Poivre, ivoire, lin, raphia, mais aussi traite des noirs et plus tardivement caoutchouc ont fait la fortune du royaume et de son chef, l'Oba, mais ont aussi rempli un rôle de métissage intellectuel, unique dans le continent noir.

La splendeur des objets travaillés, essentiellement en fer, laiton, ivoire et bois, a de tout temps suscité l'admiration des spécialistes qui ont longtemps cherché à s'en emparer, et la destruction du palais de Benin City en 1897 par les Anglais a entraîné une déplorable dispersion de la plupart de ces reliques. Une grande partie a pu être progressivement récupérée par différents musées, notamment allemands, et se trouve momentanément exposée au Musée du Quai Branly. La présentation y est remarquable, grâce à une scénographie par thème, en fonction d'usages ou de contextes, chaque fois très bien mis en valeur. A noter que les explications sont très claires et très lisibles, ce qui est loin d'être toujours le cas dans les expositions actuelles.

Dans une succession de vitrines, s'aligne avec fierté une trentaine de plaques de métal en relief évoquant la vie du palais, représentant quelques notables européens, mettant en scène des musiciens. D'autres vitrines offrent toutes leurs faces au visiteur, mettant en avant les objets rituels, les ornements, les bijoux, les sièges, les attributs des dignitaires. Ainsi, les tenues cérémonielles de l'Oba étaient entièrement constituées de somptueuses perles de corail, perles que l'on retrouve sur son chasse mouches ou son fourreau d'épée. Impressionnantes également sont les têtes figuratives en bronze des 17 reines mères dont quelques unes, au regard altier, sont étonnantes de finesse.

Il s'agit là de la première exposition de cette importance consacrée aux oeuvres du royaume du Bénin. Sa mise en valeur réussie permet de mieux saisir l'influence culturelle - et politique - du rayonnement régional de cette civilisation. Aujourd'hui encore, les traditions royales du Bénin sont perpétuées et le descendant dynastique continue de jouir d'un immense prestige dans toute l'Afrique noire. Au vu de cette remarquable exposition, on comprend pourquoi.


"Bénin, Cinq siècles d'art royal", jusqu'au 6 janvier, Musée du Quai Branly.
Renseignements: www.quaibranly.fr
Epais catalogue riche en documentation et illustrations: 545 pages, 55 euros

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