Birmanie : malgré les menaces du pouvoir, les manifestations ne faiblissent pas

Ce mardi encore, environ 100.000 personnes ont défié la junte birmane dans les rues de Rangoon et d'autres villes. L'opposante Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix, aurait été emprisonnée à nouveau. La communauté internationale essaie de faire pression sur le régime.

Alors qu'en Birmanie, l'opposante Aung San Suu Kyi, prix nobel de la paix, aurait été emprisonnée à nouveau, environ 100.000 personnes, dont quelque 30.000 moines bouddhistes, ont défilé ce mardi dans le centre de Rangoon aux cris de "démocratie" malgré les mises en garde d'une junte militaire qui semble se durcir. Le cortège des bonzes a été acclamé par des habitants de la capitale sans qu'on n'aperçoive ni policiers, ni soldats, et aucun incident n'a été signalé lors de cette manifestation, la plus importante en vingt ans contre les militaires au pouvoir depuis 1962.

Dans la matinée, les généraux ont prévenu dans des messages diffusés par haut-parleurs qu'ils étaient en droit de disperser les manifestations par la "force militaire". "Les gens ne doivent pas suivre et encourager ces défilés, ni y prendre part. Des mesures seront prises contre ceux qui contreviennent à cet ordre", a averti la junte. Cela n'a pas empêché des manifestations dans d'autres villes que la capitale économique du pays.

Les moines bouddhistes, dont certains brandissaient le drapeau aborant un paon combattant, emblème des étudiants en 1988, sont à la pointe du mouvement de contestation actuel, né il y a plus d'un mois en réaction à une forte hausse du prix des carburants. Le ministre des Affaires religieuses, le général Thura Myint Maung, cité par la radio nationale, a déclaré lundi soir que des mesures seraient prises contre la hiérarchie religieuse si elle ne ramenait pas les moines dans le droit chemin. Les généraux devaient tenir mardi une réunion d'urgence à Naypyidaw, nouvelle capitale bâtie dans la jungle à 450 km au nord de Rangoon, a indiqué un diplomate.

Signe inquiétant, l'Union nationale Karen (KNU), milice ethnique en guérilla depuis 1949 contre le pouvoir central, a déclaré que des militaires de la 22ème division s'étaient retirés de l'Etat Karen pour retourner à Rangoon. Cette 22ème division avait été à la pointe de la répression du soulèvement de 1988.

Les observateurs étrangers estiment désormais que seul les Etats proches du gouvernement birman pourraient, en usant de leur influence, éviter un bain de sang. Pékin, avec qui le régime birman entretient les plus étroites relations, a souhaité "la stabilité et le développement économique" du pays et affiché jusqu'alors une position de non- ingérence dans les affaires de son voisin.

De son côté, l'Union européenne a appelé les dirigeants birmans à faire preuve de la "plus grande retenue", par la voix de Cristina Gallach, porte-parole du représentant diplomatique de l'UE, Javier Solana. Pour sa part, le président Bush annonce ce mardi à l'ONU de nouvelles sanctions américaines contre la junte militaire birmane, notamment des mesures punitives visant des personnalités du régime. La Birmanie est sous le coup de sanctions américaines depuis que le président Bill Clinton a décidé d'interdire les investissements américains dans le pays en mai 1997.

Enfin, la compagnie pétrolière Total, dont les activités en Birmanie suscitent les critiques, a affirmé ce mardi que sa conduite en terme d'éthique "ne dépendait pas des gouvernements en place". "Nous suivons de très près l'évolution de la situation. Les manifestations n'ont pas affecté la conduite de nos opérations, ni le programme social-économique que nous menons, qui bénéficie aux populations", a commenté une porte-parole du groupe. Sur son site Internet, Total affirme qu'il "partage les préoccupations de la communauté internationale sur la situation politique et des droits de l'homme en Birmanie" mais qu'il est "convaincu que sa présence a des retombées positives durables pour la région".

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