Sarko aux profs : la "revalo" des salaires contre une "refondation de l'école"

Dans une lettre aux enseignants, le président de la République envisage une baisse du nombre d'heures de cours. Il critique aussi le collège unique.

Nicolas Sarkozy s'emparerait-il des idées de Lionel Jospin modèle 1988? Sa "lettre aux enseignants" que le président de la République vient de lire, aujourd'hui, lors de la visite d'un collège à Blois pour présenter sa vision de la réforme de l'école le laisse imaginer. Comme en 1988, Nicolas Sarkozy propose une "refondation" de l'école contre une "revalorisation" des salaires des enseignants. Le mot revalorisation est identique. C'est, en effet, l'urgence. En 1988 comme en 2007, l'Ecole se trouve à la croisée des chemins. En 1988, il fallait atteindre l'objectif de 80% d'une génération au niveau bac. En 2007, l'Ecole doit fournir les ouvriers de l'"économie de la connaissance" alors que les indicateurs internationaux soulignent, année après année, la baisse régulière des performances de l'Ecole française.

Aujourd'hui, le président de la République de 2007 demande une "refondation" de l'école où "les conditions d'enseignement" seront adaptées "aux difficultés des enfants". En échange, Nicolas Sarkozy propose une nécessaire "revalorisation" du métier enseignant. Nicolas Sarkozy insiste sur les nouvelles perspectives de carrière et l'amélioration des conditions de travail des profs. Il ne chiffre pas le budget disponible pour cette "revalorisation". En 1988, Lionel Jospin avait mis 3 milliards de francs sur la table pour obtenir un changement des manières d'enseigner. Toutefois, à presque vingt ans d'intervalle, deux différences se relèvent.

La première porte sur l'évolution du nombre d'enseignants. En 1988, Lionel Jospin avait augmenté sans limite ce chiffre. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy prévoit la suppression de 11.200 postes dans l'Education nationale par le non-remplacement d'une partie des départs à la retraite. Elle s'ajoute aux 12.000 suppressions d'emplois enregistrées depuis 2004. En vingt ans, l'état des finances publiques s'est sérieusement dégradé.

Pour compenser les suppressions de postes d'enseignants, Nicolas Sarkozy pense à "une réforme de structures" et se demande s'il n'a pas "trop d'heures de cours". Il envisage une école où "les moyens seront mieux employés parce que l'autonomie permettra de les gérer davantage selon les besoins". Notamment, le président de la République plaide pour l'"interdisciplinarité" et la "fécondation réciproque des différentes disciplines". Il rouvre ainsi le chantier de la bidisciplinarité, qui conduit un même prof du secondaire à enseigner deux matières différentes. Le Snes, majoritaire dans le secondaire, rejette cette réforme.

Seconde distinction entre les deux hommes, la vision qu'ils ont du collège unique. Ce dispositif, créé en 1975 pour donner à tous les élèves un enseignement identique, était un symbole à ne pas toucher sous Jospin. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy, tout en admettant que ce collège unique n'avait pas "que des désavantages", critique violement son principe. Il souhaite que l'on "adapte les conditions d'enseignement aux difficultés des enfants" et à leurs mérites. Bref, le collège unique, c'est le collège inique.

Plus globalement, Nicolas Sarkozy pousse aussi à une ouverture de l'école sur l'extérieur, à la culture, à la technique "et, bien sûr au monde de l'entreprise". Le fait religieux, lui même, ne doit pas "rester à la porte de l'école". Il prône une école du respect où l'on apprend aux élèves "la hiérarchie des valeurs".

Comme Jospin, Sarkozy déclenche aujourd'hui une bronca syndicale. Gérard Aschieri, président de la puissante FSU, principale fédération de l'Education nationale, souligne que le discours "brille" mais ne répond pas aux enjeux de l'Ecole de demain. "Par exemple, le poids des inégalités sociales à l'Ecole est complètement absent", relève le syndicaliste. Il s'inquiète aussi: "si M. Sarkozy ne prononce pas le mot 'sélection', il a des formules qui laissent penser que la porte est ouverte à la sélection à l'entrée en sixième et en seconde". En 1988, les professeurs avaient refusé les 3 milliards de francs proposés par le gouvernement de l'époque. Nicolas Sarkozy réussira-t-il a faire avaler la pilule de sa refondation aux enseignants ?

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