Alain Juppé confirmé dans son titre de "vice-premier ministre"

Le seul ministre d'Etat du gouvernement Fillon se voit doté de compétences très larges, incluant la protection de l'environnement, l'énergie, l'industrie, les transports, l'équipement, l'urbanisme, etc- Au risque de devoir arbitrer entre des préoccupations tout à fait contradictoires.

Le décret définissant les attributions du ministre de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables, présenté ce matin en conseil des ministres, confirme le sentiment qu'on a pu avoir dès la nomination du gouvernement le 18 mai: le poste confié à Alain Juppé s'apparente bien à celui d'un "vice-premier ministre". C'est à peu de choses près le profil défini dans le pacte écologique de Nicolas Hulot, que Nicolas Sarkozy avait signé pendant sa campagne électorale.

Les prérogatives d'Alain Juppé ne sont cependant pas l'exacte réplique de ce que prévoit le pacte qui préconise un champ d'intervention du titulaire du poste quasi général sur le travail du gouvernement. Les compétences du numéro deux du gouvernement sont néanmoins très larges. Selon le communiqué du conseil des ministres, Alain Juppé, outre les attributions classiques dévolues au ministère de l'Ecologie (eau, traitement gestion des déchets, pollutions, protection de l'environnement...) "prépare et met en oeuvre la politique du gouvernement dans les domaines du développement durable et de l'environnement, de l'énergie et des matières premières, de la sécurité industrielle, des transports et de leurs infrastructures, de l'équipement, de l'aménagement foncier et rural, de l'urbanisme, de l'aménagement et du développement du territoire et de la mer, à l'exception de la pêche".

En d'autres termes, le ministre cumule grosso modo les tâches réservées auparavant respectivement au ministre de l'Industrie en matière d'énergie et d'approvisionnement énergétique, au ministre de l'Equipement, des transports et de l'urbanisme, au ministre de l'Aménagement du territoire et une partie importante de l'administration du précédent ministre de la Mer. Cela signifie notamment que les décisions relevant du développement et de la sécurité nucléaire incombent désormais à M. Juppé qui devra parallèlement arbitrer les décisions en matière d'énergies renouvelables. C'est donc bien lui qui décidera de la construction de nouvelles centrales nucléaires ou de leur fermeture et qui à ce titre sera la tutelle d'EDF.

Toutes les mesures touchant aux transports, à la circulation automobile, aux limitations de vitesse, au respect des normes de pollution automobile lui reviennent également. Alain Juppé décidera encore de la construction ou pas de nouvelles autoroutes, de voies de TGV, de routes nationales. Il devra également mettre en musique la taxe sur les camions préconisée par Nicolas Sarkozy, lors de sa campagne électorale.

Sur le papier, l'étendue des pouvoirs de la nouvelle administration est censée concrétiser l'importance que revêt l'environnement aux yeux du nouveau président de la République. Dans la pratique, l'exercice est périlleux car il implique que le nouveau super-ministre arbitre en permanence entre des sujets aux objectifs souvent divergents. Autoroute ou train? Incinérateur ou réduction des déchets à la source? Développement de l'urbanisme ou protection de la nature? Implantation de fermes éoliennes ou protection des paysages?...

Interrogée par La Tribune quelques jours avant son départ du ministère, la précédente ministre de l'Ecologie Nelly Olin déclarait "ne pas adhérer à une telle organisation" car elle impliquait "trop de schizophrénie" de la part du titulaire du poste. "Le ministre de l'Ecologie défend les intérêts de l'environnement, celui de l'Industrie les intérêts industriels, celui des Transports ceux des transports et le Premier ministre tranche", défendait-elle.

En revanche, l'ancienne ministre de l'Environnement de Lionel Jospin Dominique Voynet s'est toujours déclarée favorable à une architecture administrative proche de celle mise en oeuvre aujourd'hui par Nicolas Sarkozy. La réalité est sans doute encore ailleurs. Schizophrénie ou pas, intérêts divergents ou pas, c'est dans les choix qu'il fera qu'on jugera de la sincérité écologique du nouveau ministre et son gouvernement.

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