La réalité réinventée

Dans "Les Falsificateurs", Antoine Bello imagine un monde où les grands moments de l'histoire seraient des canulars. Un roman à l'atmosphère délicieusement paranoïaque.

Et si Laïka, la première chienne envoyée dans l'espace, n'avait en fait jamais existé ? Et si les archives de la Stasi recélaient des destins factices ? Et si les grandes découvertes de l'histoire n'étaient que des supercheries fomentées par un seul et tentaculaire organisme secret, le CFR (Consortium de Falsification du Réel) ?

Dans "1984", George Orwell imaginait un "Parti" qui réécrivait l'histoire à son bon vouloir. Antoine Bello - qui s'était fait remarquer il y a neuf ans avec son précédent roman, "Eloge de la pièce manquante" - reprend le concept de façon ingénieuse en s'appuyant sur des faits réels.

Exemple : la tribu africaine des Bochimans menacée par l'Etat bostwanais pour permettre l'exploitation de diamants (l'affaire est revenue sur le devant de la scène récemment à l'occasion du film "Blood diamond" avec Leonardo di Carpio). La tribu, les diamants... tout serait faux, monté de toutes pièces. Pourquoi ? Bello laisse planer le mystère.

"Les Falsficateurs" a la veine de ces romans anglo-saxons qui mêlent habilement les genres, où le récit d'espionnage se ponctue de références scientifiques et philosophiques, où la trame principale n'hésite pas à s'effacer sur plusieurs chapitres pour laisser place à des récits secondaires passionnants. Même s'il n'atteint pas toujours la force narrative escomptée, on reste accroché tout au long des 500 pages du roman qui s'achève sur un "A suivre" prometteur. Espérons que Bello ne nous fera pas attendre de nouveau neuf ans.

Renseignements pratiques
"Les Falsificateurs" d'Antoine Bello (Gallimard, 510 pages, 21 euros)

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