Après Fillon évoquant "l'Etat en faillite", Trichet évoque "les finances publiques en très grande difficulté"

Répondant à des demandes d'aides en Corse, le Premier ministre a dépeint une conjoncture financière plus que difficile, évoquant une "situation de faillite". Une "image", selon lui. Et il s'est engagé "à ramener le budget de l'Etat à l'équilibre avant la fin du quinquennat".

La France est-elle en faillite comme l'avait affirmé vendredi, lors d'un déplacement en Corse le Premier ministre François Fillon ? Ce dimanche, le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes Jean-Pierre Jouyet a jugé que François Fillon avait eu "raison" de vouloir "provoquer un électrochoc" en parlant d'un Etat en "situation de faillite", car la série de réformes permettant le rétablissement des comptes est urgente. Des propos tenus au Journal du Dimanche.

"Le mot est trop fort et je ne l'emploierai pas", a-t-il toutefois poursuivi. "Le Premier ministre veut dire que si nous ne faisons rien pour arrêter la dégradation des comptes et l'accumulation des déficits depuis vingt ans, alors oui nous risquerions de mettre, d'ici dix ans, la France en +état de défaut+, c'est le terme exact", a expliqué le secrétaire d'Etat.

"Le Premier ministre sait qu'il faut rompre ce cercle vicieux, qui s'est aggravé en 2002 et 2003, et qui fait que l'impôt sur le revenu sert à payer le service de la dette. Il faut inverser la dynamique mais tant qu'il y a des actifs, et la France est dotée d'un gros potentiel, elle ne peut pas être en faillite", a-t-il conclu.

Et dimanche soir, c'est le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, invité sur Europe 1; qui a jugé que les "finances publiques françaises sont en très grande difficulté" et que le premier ministre français avait eu "raison de le souligner".

François Fillon avait affirmé, ce vendredi, à Calvi "être à la tête d'un Etat qui est en situation de faillite" devant des exploitants du monde agricole corse. "Je suis à la tête d'un Etat qui est depuis quinze ans en déficit chronique, je suis à la tête d'un Etat qui n'a jamais voté un budget en équilibre depuis vingt-cinq ans. Cela ne peut pas durer", a martelé le chef du gouvernement face à de nombreuses demandes d'aides.

Il s'est une nouvelle fois engagé "à ramener le budget de l'Etat à l'équilibre avant la fin du quinquennat", sinon, a-t-il mis en garde, "on ne pourra rien bâtir de solide ni pour la Corse, ni pour aucune autre partie du territoire national".

Dans l'après-midi, en visite à la mairie d'Ajaccio, il est revenu sur cette déclaration, affirmant avoir eu recours à une "image". "Parfois, il faut utiliser des images. C'est ce que j'ai fait devant des agriculteurs qui demandaient toujours plus, toujours plus à l'Etat. Je leur ai dit que si la France était une entreprise, un ménage, elle serait en cessation de paiement", a-t-il déclaré. La France "s'endette, et il faut que tous les Français prennent conscience qu'il est temps de mettre un terme à des solutions de facilité qui ont été employées depuis vingt-cinq ans et qui placent notre pays dans une position de faiblesse", a-t-il ajouté.

Il n'en fallait pas plus pour faire réagir Dominique de Villepin. "La France n'est pas en faillite", a affirmé vendredi l'ancien chef du gouvernement, qui estime toutefois qu'il "ne faut pas faire de procès" à François Fillon, qui cherche à être "pédagogique" pour justifier les réformes. "J'ai laissé un Etat qui était dans une situation meilleure que celle d'aujourd'hui. (...) Depuis, on a dépensé beaucoup d'argent, plus de 15 milliards qui ont aggravé la situation financière", a déclaré sur Europe 1 l'ex-Premier ministre, évoquant le "paquet fiscal" voté par le parlement.

A gauche, aussi, on tire à boulets rouges sur les propos de François Fillon en assurant que le gouvernement actuel a une grande part de responsabilité dans la situation économique de la France. Fraçois Bayrou pour le Modem (centre) a lui aussi fustigé ce qu'il qualifie d'aveu.

La polémique n'éclate pas par hasard. Cette semaine, le gouvernement présente coup sur coup le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2008 et le projet de budget ou loi de finance également pour 2008. Avec dans le premier cas des recherches d'économies et de nouvelles recettes pour réduire le trou de la sécu - par exemple en faisant payer les cotisations sociales sur les stock-options - et dans le second cas la volonté de réduire le train de vie de l'Etat (avec moins de crédits pour les emplois aidés ou la fin des 20 euros de ristourne pour les déclarations de revenus sur Internet pour les mesures qui ont déjà filtré).

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