Les syndicats hostiles au service minimum dans les transports

Le président de la République a annoncé mercredi soir qu' "un plan de transport minimum les jours de grève" sera obligatoire dans toutes les entreprises du secteur, une mesure qui devrait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2008. Le projet de loi sera présenté le 4 juillet en Conseil des ministres. La CFDT dénonce la mise "sous tutelle du droit de grève".

La journée de jeudi risque de rester comme un mauvais souvenir pour les syndicats. Convoqués en réunions bilatérales par le ministre du Travail, Xavier Bertrand, pour une ultime concertation sur l'instauration d'un service minimum dans les transports en cas de grève, ils ont appris mercredi soir par la voix du président de la République le contenu du projet de loi. Ce texte est très différent de ce que leur avait indiqué le ministre du Travail lors de la première série d'entretiens sur le sujet début juin.

Selon les déclarations de Nicolas Sarkozy sur TF1, le projet gouvernemental instaurant un service minimum dans les transports publics prévoit que "toutes les entreprises de transports seront obligées d'avoir un plan de transport minimum les jours de grève". Xavier Bertrand avait laissé entendre aux partenaires sociaux que seule l'obligation de négocier un tel plan serait inscrite dans la loi-cadre. En fait, "le gouvernement imposera un service minimum de manière autoritaire s'il n'y a pas de négociation, au 1er janvier prochain", a indiqué le président de la CGPME, Jean-François Roubaud, qui a ouvert le bal jeudi matin des rencontres avec Xavier Bertrand.

Vote à bulletins secrets

Surtout, le projet de loi tel que l'a dévoilé le chef de l'Etat encadre l'usage du droit de grève, un droit individuel garantie par la Constitution. Ainsi, "un salarié gréviste devra le déclarer deux jours avant" la grève. Aujourd'hui, seuls les syndicats, et uniquement dans le secteur public, doivent déposer un préavis de grève au moins cinq jours avant le début de celle-ci. Si Nicolas Sarkozy affirme "ne pas croire à la réquisition", il a annoncé cependant une mesure susceptible de limiter la portée d'une grève: "les salariés non grévistes qui travaillent sur une autre ligne pourront aller travailler sur la ligne en grève si l'on a besoin d'eux".

Autre disposition encadrant l'usage du droit de grève: comme il l'avait annoncé pendant la campagne, Nicolas Sarkozy souhaite qu'"au bout de huit jours d'un conflit" soit organisé "un scrutin à bulletins secrets pour déterminer s'il y a une majorité pour ce conflit ou pas, ce qui permettra d'éviter - ce qui n'est pas admissible dans une démocratie sociale qui fonctionne - les piquets de grève". Et comme le travail doit être valorisé, "les jours de grève ne seront pas payés", a précisé le chef de l'Etat. Le non-paiement des jours de grève est déjà, notamment depuis les grèves contre la réforme des retraites de 2003, une pratique très répandue dans le secteur public.

Les réactions syndicales aux annonces du gouvernement sont globalement négatives. Très critique, la CGT estime ainsi que "l'avant-projet de loi, en l'état actuel, contient des dispositions qui vont rendre encore plus difficile l'exercice du droit de grève, moyen de se défendre et de revendiquer. Il vise à intimider, culpabiliser et sanctionner les salariés qui revendiquent, sans contraindre les entreprises à négocier réellement afin de faire baisser la conflictualité (...). La CGT considère donc que "le gouvernement doit revoir sa copie en contraignant les entreprises et les pouvoirs publics à négocier sur les causes des conflits et de leur donner les moyens pour permettre de les maîtriser", précise-t-elle dans un communiqué.

Pour Marcel Grignard, secrétaire national CFDT, "en prévoyant, par la loi, l'obligation pour les salariés qui auront décidé de faire grève d'en informer préalablement l'entreprise et en permettant à cette dernière d'organiser un vote des salariés au bout de huit jours de grève, le gouvernement met le droit de grève sous tutelle".

S'opposant aux mêmes dispositions que la CFDT, le président de la CFTC, Jacques Voisin espère quant à lui pouvoir infléchir le projet de loi d'ici le 4 juillet, date de sa présentation en conseil des ministres. "Le texte n'est pas du tout équilibré quant aux responsabilités: on parle beaucoup de la responsabilité des grévistes, on parle peu de la responsabilité des employeurs", a-t-il déploré.

Autre son de cloche du côté du patronat. De même que son homologue de la CGPME, la présidente du Medef a approuvé les grandes lignes du projet gouvernemental. "C'est un texte qui concilie ce qui apparaissait aux yeux de beaucoup comme inconciliable", a affirmé Laurence Parisot à l'issue de son entretien avec Xavier Bertrand.

A l'issue des rencontres, le ministre du Travail s'est déclaré prêt à apporter des "garanties complémentaires" à l'avant-projet de loi, notamment sur la déclaration des grévistes 48 heures avant une grève et les conditions de la consultation au bout de huit jours. "Sur un certain nombre de points, nous sommes prêts à des éclaircissements, des clarifications, des garanties complémentaires (..), notamment sur les conditions de la consultation et de la déclaration", a déclaré Xavier Bertrand qui ne paraît pas pour autant prêt à supprimer ces deux points qui, selon les syndicats, mettent à mal le droit de grève. "Ces deux points sont importants (...) pour "permettre à l'entreprise de s'organiser" pour "permettre d'avoir une vision de l'état d'esprit" de l'ensemble du personnel, a-t-il indiqué à la presse.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.