C'est aussi de l'art...

Certains peintres utilisent les affiches de rue comme des toiles. Des oeuvres dont les prix s'envolent.

On les appelle les "décollagistes", car une grande partie de leur travail repose sur l'appropriation d'objets de la rue, le plus souvent des affiches. Ce mouvement artistique né dans les années 1950 s'est aussitôt francisé sous l'appellation de "Nouveaux réalistes", certains s'exprimant avec la compression (César), d'autres par l'accumulation (Arman), d'autres par empaquetage (Christo) d'autres encore par collage d'objets usuels (Spoerri). Une remarquable exposition leur est consacrée au Grand Palais à Paris ce printemps, et c'est pour les marchands l'occasion de relever des prix, certes chers, mais jusque là moins élevés que leurs contemporains d'outre-Atlantique..

Quatre artistes, en particulier, ont opté pour le détournement de placards publicitaires en s'autoproclamant "affichistes", avec un recours aux expositions collectives. Dans les années 1970, le mouvement s'individualise et passe de politique à poétique, avant de laisser la place aux graffitis et autres pochoirs qui, à leur tour, passent de la rue aux galeries dès les années 1990.

Les collectionneurs ont longtemps délaissé ces oeuvres particulières, souvent de grand format, difficiles à saisir et qui nécessitent un grand recul, donc beaucoup de place. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, poussés par des acheteurs souvent Américains, grands amateurs de compositions de la fin du XXème siècle et qui ont su, avant les Européens, saisir l'importance de ce mouvement particulier. Cinq signatures dominent ce marché. Raymond Hains (décédé en 2005), également photographe, s'intéresse particulièrement aux affiches politiques avant de quitter le mouvement vers 1965 pour créer des sculptures géantes d'objets quotidiens, notamment d'allumettes. Ses lacérations et arrachages s'adjugent entre 20 et 80.000 euros, des cotes que réalise également son alter ego, Jacques Villeglé, plus sensible aux couleurs et aux graphismes qu'aux messages, fortement inspiré par le show-biz dans un chaos toujours bien orchestré.

Un peu plus âgé, Mimmo Rotella, vivant entre Milan et Paris, a une préférence pour des toiles recollées recto-verso, avec, si possible, une connotation musicale ou cinématographique. Ici, les prix oscillent entre 15 et 65.000 euros. Un peu moins onéreuses sont les oeuvres lacérées de François Dufrene, qui aime jongler avec les mots, usant de calembours très appréciés des acheteurs francophiles. Enfin, l'allemand Wolf Vostel qui décollait des affiches aussi bien dans son pays natal qu'en France a adopté une technique très particulière, plus proche du réalisme que de l'évocation. Sa cote est moindre, à partir de 4.000 euros pour un petit format, mais grimpe petit à petit. A ces noms on peut ajouter Arthur Aeschabacher, Jean Jacques Beltramo ou, plus récemment, Marc Ghislain Fischa (autour de 2.500 euros).

De nombreuses enchères consacrées à l'art contemporain proposent des oeuvres de ces artistes, notamment celles organisées par Cornette de Saint Cyr, Artcurial, Charbonneaux, Tajan ainsi que dans quelques galeries spécialisées.

Attention toutefois à leur état de conservation: certaines parties de la toile, fragile, peuvent être décollées ou pire, déchirées. A éviter. C'est pour cela que les collectionneurs ont tendance à mettre ces oeuvres sous verre.

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