L'ex-directeur financier de Sagem DS défend sa gestion

Soupçonné d'écritures comptables inexpliquées, Denis Fercoq, l'ex-directeur financier de Sagem Défense Sécurité, filiale de Safran, a été licencié en novembre 2006. Silencieux jusqu'ici, il a décidé de se défendre publiquement, après sa mise en cause par la direction de Safran.

Soupçonné d'écritures comptables inexpliquées, Denis Fercoq, l'ex-directeur financier de Sagem Défense Sécurité, filiale de Safran, a été licencié en novembre 2006. Safran a été l'objet les derniers de 2006 d'une guerre des chefs sans merci entre les ex-Sagem et les ex-Snecma.

Silencieux jusqu'ici, Denis Fercoq, a décidé de se défendre publiquement, après sa mise en cause par la direction de Safran. Dans un long texte adressé à La Tribune, il répond point par point sur le dossier des "écritures inexpliquées" sur les comptes 2006 de Sagem DS, filiale de Safran, ainsi que sur les accusations d'un "prétendu effacement" de son disque dur avant son départ. Salarié depuis février 1981, Denis Fercoq a été licencié de Sagem DS en novembre par le PDG Jacques Paccard, lui-même mis en cause par Safran, puis licencié en novembre. Nous publions intégralement son droit de réponse.

DROIT DE REPONSE DU DAF DE SAGEM DS

Tout d'abord et pour prévenir toute critique qui pourrait être formulée à l'encontre du présent document, je précise que toutes les informations qu'il comporte sont aujourd'hui publiques et diffusées sur le site de Safran.

Le communiqué de presse de SAFRAN du 8 décembre 2006 , cite des écritures comptables dites "inexpliquées" que j'aurais passées et dont la correction pourrait avoir un impact de 100 Millions d'Euros sur les comptes 2006 de Sagem DS.

Par courrier adressé le 13 décembre par le biais de mon conseil, j'ai demandé au Président du Directoire M.Béchat d'être informé par écrit du détail des griefs qui m'étaient opposés.
Sur la demande du Président de SAGEM DS, M.Herteman j'ai pris contact avec les cabinets Constantin et Deloitte, Commissaires Aux Comptes de SAGEM DS et le premier rendez vous a été organisé le 8 Janvier 2007. Le cabinet KPMG s'est joint à nos réunions qui se sont poursuivies à un rythme moyen de 3 réunions hebdomadaires, et ceci pendant tout le mois de Janvier.

L'objectif de ces réunions était double, en premier lieu de recueillir mes explications sur les analyses de risques sur valeurs d'exploitation qui avaient conduits à l'arrêté des comptes de décembre 2005, et d'autre part la vision du management de Sagem DS sur un certain nombre de grands programmes, à la date du départ de M. Paccard et de moi-même. M. Paccard a répondu à une invitation à participer à une de nos réunions.

A fin Janvier, j'avais donc fourni toutes les réponses aux questions posées par les 3 cabinets. Le terme "d'écritures inexpliquées" devenait un abus de langage ou dénotait, comme celui du prétendu effacement de mon disque dur, sauvegardé avant mon départ, une volonté de dénigrement. Je rappelle à ce propos que j'ai déposé plainte pour diffamation auprès de la 17ème chambre correctionnelle, un premier jugement du 16 février ayant fixé le calendrier des audiences.

Le 14 février, les comptes de SAFRAN ont été publiés. A leur lecture, et dans le respect des clauses de confidentialité qui me lient, je ne peux que réagir à ce qu'ils insinuent, à la fois par leur aspect à nouveau diffamant et par l'étonnement qu'il suscite en l'ancien directeur financier de SAGEM DS que j'étais encore en novembre dernier.

La direction de SAFRAN communique de façon récurrente sur le fait que l'arrêté des comptes de SAGEM DS a été établi par deux cabinets "indépendants", à savoir Ernst & Young et KPMG, insinuant que les deux cabinets de commissariat de SAGEM DS, seuls habilités à certifier les comptes, ne le seraient pas. Je laisse à ces derniers le soin d'apprécier ce sous entendu. J'ajouterai cependant que dés l'été 2006, un audit des comptes de SAGEM DS avait été mené sous la houlette de KPMG , et qu'en accord avec leurs conclusions de l'époque , la direction financière de SAFRAN nous avait demandé d'en impacter les comptes de juin d'un montant que l'on pourrait qualifier d'être "dans l'épaisseur du trait".

Comment expliquer que 6 mois plus tard, le même cabinet réputé plus indépendant parvienne à des corrections avoisinant les 200 millions d'euros ?

Je passerai rapidement sur les écarts de Chiffre d'Affaires 2006 de SAGEM DS, arrêté dans un premier temps à 1400 M€ +ou- 40 M€ (sic !) et qui termine finalement à 1445 M€ (la plus forte croissance du groupe à 17%), il est vrai que ce type d'approximation se retrouve dans une autre branche où l'impact négatif de l'A380 a évolué de 28 M€, sans autre forme de procès.

La lecture de la correction des comptes fait toujours apparaître une ligne d'écritures dites "inexpliquées", dont j'ai relevé ci-dessus l'abus de langage. Leur impact est réparti rétroactivement sur le bilan d'ouverture de 2005, sur la clôture 2005 et sur l'ouverture 2006. Comment peut on arriver à une telle précision dans la répartition de ces corrections si on ne dispose pas d'explications précises sur les hypothèses de ces arrêtés, ce qui invalide par nature la notion "d'écritures inexpliquées".

Il est toujours possible de revisiter à posteriori les décisions de management résultant des analyses de risque. D'une part on est bien mieux armé pour prévoir le futur antérieur et il devient facile de reconstituer des analyses précises comme a du le faire le management actuel pour affecter à posteriori les corrections aux exercices antérieurs.

La définition d'inexpliqué devient alors : "non-conformité avec ce que l'on voudrait aujourd'hui que les hypothèses aient été alors". Outre la grande créativité comptable que dénote cette pratique, cela introduit un débat sémantique dont la finalité est évidente. Les hypothèses d'analyses doivent être évaluées à date et validées en leur temps par les Commissaire aux Comptes, seuls habilités à le faire. On comprend fort bien qu'ils puissent émettent des réserves pour 90 M€ sur les 106,6 M€ de retraitement des comptes proposé aujourd'hui. Ils auraient d'ailleurs pu en émettre sur une grande partie des 55 M€ de la ligne "correction d'erreurs", qui présente une grande analogie avec les 90 M€ précédents.

Pour être plus technique, ce débat sémantique, peut s'appuyer formellement sur l'application des divers chapitres des normes IFRS, qui font le miel des experts comptables. Il avait déjà eu lieu lors de l'audit de juillet 2006, opposant les mêmes experts dits "indépendants". Il est cependant curieux de constater qu'ils ne donnent pas lieu aux mêmes conclusions 6 mois plus tard quand les auteurs des hypothèses initiales ne sont plus là pour apporter leur éclairage.

Il est certain que ce n'est pas en quelques semaines et avec des intentions qui restent à éclairer que l'on peut avoir la même appréciation qu'en combinant les décennies d'expérience de M.Paccard et moi-même sur des business qui n'ont cessé de croître profitablement.

Je réagis également au résultat négatif de 101 M€ de 2006. Il ne fait l'objet que d'un vague commentaire. Je remarque que le Cash Flow Libre de SAGEM DS à fin 2006 est positif de 53 M€, ce qui dénote une activité très rémunératrice de la société. Il devient facile d'en conclure que le résultat 2006 n'est finalement constitué que de nouvelles provisions, s'ajoutant aux "corrections" pratiquées sur les exercices antérieurs et sur des hypothèses excessivement pessimistes au point d'être irréalistes.

Je terminerai par une remarque sur la très forte baisse du résultat net du groupe, commenté par la direction financière de SAFRAN comme étant la conséquence d'une provision pour redressement fiscal sur les années 2003 et 2004. Ce redressement est imputé à SAGEM DS par réincorporation de provisions que le management actuel ne sait (ou ne veut) justifier. Comment peut-on trop provisionner pour l'administration fiscale, et pas assez pour la direction de SAFRAN ?

CHERCHEZ L'ERREUR !!!!

En tant qu'actionnaire, comme la plupart des salariés SAGEM, je ne voterai pas l'approbation des comptes 2006 tels que présentés, et qui d'ailleurs font l'objet de réserves de la part des Commissaires aux Comptes.

DENIS FERCOQ
Ex Directeur Administratif et Financier
De SAGEM DEFENSE SECURITE

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