Le secrétaire général de la CFDT s'est sans doute senti trahi quand il a pris connaissance de la teneur du discours du Premier ministre mardi à l'occasion du soixantième anniversaire de l'Agirc, le régime complémentaire des cadres du secteur privé. François Chérèque a en tout cas dénoncé mercredi la "provocation" de François Fillon dans le journal Le Monde. "Que se passe-t-il au gouvernement? Nicolas Sarkozy nous fait des gentillesses pour nous amadouer et le Premier ministre durcit le ton", constate le leader syndical.

Le Premier ministre a annoncé que des "ajustements" du dispositif des carrières longues, qui permet depuis la réforme des retraites de 2003 à des salariés ayant commencé à travailler jeunes de partir en retraite avant l'âge légal de 60 ans, étaient envisagés par le gouvernement. La raison invoquée est le coût de cette mesure qui expliquerait, selon le Premier ministre, "presque la moitié du déficit du régime général constaté en 2007".

Or, la CFDT n'avait accepté de donner son accord à la réforme des retraites de 2003 qu'en échange de la possibilité offerte aux salariés ayant commencé à travailler entre 14 et 16 ans de cesser leur activité plus tôt que les autres avec leur retraite à taux plein. Avec la CGC, la CFDT est le seul syndicat a avoir approuvé cette réforme. Et François Chérèque sait le prix que sa confédération a payé en échange de son soutien à la réforme Fillon: environ 80.000 adhérents ont quitté la CFDT dans les mois qui ont suivi. Or, pour une organisation qui revendique la place de première confédération en France - même si la comptabilisation de ses adhérents vient d'être contestée par deux chercheurs, Dominique Labbé et Dominique Andolfatto, pour qui la CGT est le syndicat qui a le plus grand nombre d'adhérents -, cest loin d'être secondaire.

Par ailleurs, la CFDT accuse François Fillon de ne respecter "ni l'esprit ni la lettre de sa propre loi" en faisant comme si l'allongement de la durée de cotisation à 41 ans entre 2009 et 2012 était "acté". "L'augmentation de la durée de cotisation doit faire l'objet d'un examen par le Conseil d'orientation des retraites avant que le gouvernement et le Parlement ne le transcrivent éventuellement dans un décret", rappelle François Chérèque. Des éléments comme la situation générale de l'emploi, le taux d'emploi des seniors, la situation des caisses de retraite seront pris en compte. Pour la CFDT, l'issue de la négociation sur la pénibilité au travail, enlisée depuis deux ans et dont une réunion a lieu mercredi, est "elle aussi prévue par la loi de 2003".