"Sots Art", l'art russe hautement corrosif

En consacrant une exposition à l'art politique en Russie depuis les années 70, la Maison rouge n'a jamais aussi bien porté son nom. Tout un courant à découvrir à travers 200 oeuvres subversives et décapantes.

Avouons-le, au premier abord, le titre de la nouvelle exposition de la Maison rouge n'a rien de très sexy: "Sots Art: Art Politique en Russie de 1972 à aujourd'hui". Il serait dommage de s'arrêter là, car le voyage proposé est loin d'être rébarbatif.

Petit rappel historique. Le terme "Sots" - construit sur les mots "art" et "socialisme" - caractérise tout un groupe d'artistes de l'avant-garde moscovite qui, dans les années 70 et 80, exposaient chez eux à défaut d'avoir accès aux expositions officielles. De la même façon que le Pop Art américain l'avait fait vis-à-vis de l'aliénation consumériste, le Sots Art s'est mis à dénoncer l'oppression idéologique en détournant les slogans et figures de la propagande.

L'exposition de la Maison rouge ne se limite pas aux grandes années 70-80. Les quelque 200 oeuvres exposées montrent que ce courant continue de nourrir les artistes russes contemporains, pas moins subversifs que leurs aînés. On en veut pour preuve l'interdiction d'exportation de 19 oeuvres par le ministère russe de la Culture, comme cette photo de 2005 du collectif "Blue Noses" montrant deux policiers s'embrassant de manière plus que lascive.

Parmi les peintures, sculptures, vidéos et autres installations, reviennent sans cesse les figures de Staline, Lénine, Brejnev, Poutine... conviés pour participer à la mise en boîte de la Russie et de ses grands mythes, si possible avec le plus d'absurdité et d'enfantillages possibles.

Ainsi ce bronze de Kosolapov représentant Lénine, Jésus Christ et Mickey Mouse marchant fièrement main dans la main vers un futur qu'on imagine glorieux ou encore "La Tribune du congrès du parti" d'Ilya Kabakov, tribune de bois grandeur nature qui, lorsqu'on la contourne, dévoile ses secrets, soit un bar largement fourni en alcool... C'est bien connu, un long discours assèche la gorge. La palme de l'absurde revient aux potaches déjà cités de "Blue Noses" avec leurs séries de très courts métrages totalement idiots (mais honteusement drôles) qui concluent avec malice le parcours passionnant de l'exposition.


"Sots Art", jusqu'au 20 janvier à la Maison rouge - Fondation Antoine de Galbert. 10 boulevard de la Bastille, Paris. Tél: 01.40.01.08.81. www.lamaisonrouge.org
Ouvert du mercredi au dimanche de 11h à 19h. Nocturne le jeudi jusqu'à 21h.
Fermeture le 25 décembre et le 1er janvier.

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