JO : la Chine accepte de rouvrir certains sites internet

Tensions avant même l'ouverture des JO de Pékin. Après le risque de manque d'électricité, le dopage, la pollution, l'atteinte à la liberté d'information a été au centre des polémiques. La Chine ne comptait en effet fournir qu'un accès limité à internet, et ce malgré les vives réactions des médias du monde entier. Mais vendredi et samedi, Pékin a lâché un peu de lest.

"Je suis heureux de l'accès rétabli au site de la BBC, de Wikipédia et de sites des droits de l'homme", a déclaré samedi 2 août Jacques Rogge, président du CIO, précisant que "le CIO a exigé l'accès le plus complet possible et c'est ce que le Bocog [le comité d'organisation des Jeux olympiques de Pékin] s'est engagé à fournir".

Pourant, ce n'était pas gagné. La Chine avait déclaré : "nous fournirons un accès Internet suffisant pour les journalistes". Sun Weide, le porte-parole du Comité d'organisation des Jeux, joue sur les mots. La Chine a reconnu, mercredi 30 juillet, qu'elle va censurer l'internet utilisé par les médias pendant les JO. Mais elle nie avoir promis une liberté totale. "Notre promesse était que les journalistes pourraient se servir d'internet pour leur travail pendant les jeux Olympiques". "Et nous leur avons donné suffisamment d'accès pour cela."

Pourtant, le CIO, Comité international olympique, à commencer par son président Jacques Rogge, avait annoncé qu'il n'y aurait aucune censure durant les Jeux pour les quelques 20.000 journalistes attendus. "Pour la première fois, les médias étrangers pourront faire des reportages librement, les transmettre librement en Chine. Il n'y aura pas de censure sur internet", avait assuré Jacques Rogge, lors d'un entretien à l'AFP (Jeux Olympiques) il y a deux semaines. Certains sites comme les groupes pro-tibétains ou toute page Web ayant trait au mouvement spirituel Fa Lun Gong, interdit en Chine, ou encore à la répression du mouvement démocratique de Tiananmen en 1989 sont encore bloqués.

Vendredi 1er août, après avoir reconnu mercredi 30 juillet que la Chine n'avait, en fait, jamais envisagé de lever toutes les restrictions concernant l'accès internet pour les journalistes, le CIO essayait d'aplanir les difficultés. "Ils (les responsables chinois) ont toujours fait clairement savoir que l'accès à certains sites posait problème et nous travaillons avec eux pour nous assurer que les médias aient le moins de restrictions possibles", a expliqué à l'AFP Giselle Davies, la porte-parole du CIO. Selon elle, le CIO pensait que la Chine se contenterait de bloquer l'accès aux sites pornographiques et portant atteinte à la sécurité nationale.

"Il serait incorrect de dire que nous savions à l'avance que la Chine allait restreindre l'accès à certains sites, et nous poussons pour que ces restrictions soient levées", a ajouté Giselle Davies. "Le CIO a des discussions régulières avec le Bocog (le comité d'organisation chinois, NDLR) pour fournir aux médias l'accès à internet et autres installations nécessaires pour couvrir les Jeux".

Cette censure a soulèvé de vives réactions dans le monde des médias. A commencer par le président de l'association des journalistes de Hong Kong, Jackie Sam, selon lequel "la Chine doit se conformer à sa promesse de permettre une libre circulation de l'information. Le monde entier observe la performance de la Chine, pas seulement aux Jeux Olympiques, mais dans ses relations avec le reste du monde".

"C'est inacceptable", a réagi pour sa part le porte-parole de la Fédération des journalistes allemands (DJV), Hendrik Zörner. "Cela montre que les Chinois ne sont pas prêts à tenir parole" et qu'ils sont loin "de garantir la liberté de la presse", a-t-il souligné. "Nous espérons que la pression internationale les fera changer d'avis". Il faut dire que la radio-télévision allemande internationale Deutsche Welle, fait partie des sites censurés.

Pour le directeur du quotidien français Le Monde, Eric Fottorino, "c'est une décision regrettable. (...) On peut plus être aujourd'hui pour ou contre Internet. Internet, c'est un véhicule majeur de l'information. On ne peut pas élever une muraille de Chine contre Internet".

Daniel Bilalian, patron des sports de France Télévision qui retransmet les JO, a déclaré que "la seule chose" qui ferait renoncer France Télévision aux JO serait que les images ne soient pas diffusées en direct. "S'il y avait un incident sur le direct, il a toujours été dit que nous rentrerions".

Plus globalement, la Fédération Internationale des Journalistes, qui affirme représenter 600.000 journalistes dans plus de 120 pays, a demandé à la Chine de garantir un libre accès des journalistes à internet.

A Genève, l'organisation de défense des journalistes Presse Emblème Campagne (PEC) regroupant 35 associations et syndicats d'une centaine de pays a rappelé "les autorités chinoises à leurs obligations pour un accès libre et sans entraves des journalistes à tout le territoire chinois".

A Paris, Reporters sans Frontières a appelé à manifester le 8 août, jour de la cérémonie d'ouverture des JO, devant les ambassades de Chine à Londres, Madrid, Berlin, Paris, Washington, Bruxelles, Montréal, Rome, Stockholm, ainsi que devant le musée olympique de Lausanne.

A Genève, l'organisation de défense des journalistes Presse Emblème Campagne (PEC) regroupant 35 associations et syndicats d'une centaine de pays a rappelé "les autorités chinoises à leurs obligations pour un accès libre et sans entraves des journalistes à tout le territoire chinois".

Côté dirigeants, l'ancien président tchèque Vaclav Havel et seize autres personnalités comme l'évêque sud-africain Desmond Tutu, le militant chinois pour la démocratie Wei Jingsheng et le philosophe français André Glucksmann, ont invité le CIO à assurer la liberté d'information pendant les jeux.

Plus tempérée, la Maison Blanche a juste tenté de rassurer Pékin en affirmant que la Chine n'avait rien à craindre d'un accès plus grand donné à la presse et à internet.

Face à cette vague internationale de réactions, la Chine avait déjà levé, vendredi 1er août, la censure sur plusieurs sites internet comme celui d'Amnesty International. Mais beaucoup restent toujours fermés. Un journaliste de l'AFP a pu constater que les sites d'Amnesty International ou de Reporters sans frontières étaient accessibles tandis que ceux de la BBC en chinois, de dissidents et de pro-tibétains ou ceux consacrés au mouvement spirituel Falungong, interdit en Chine, ne pouvaient être consultés.

D'ailleurs, en dépit de la polémique soulevée, la Chine a réaffirmé, jeudi 31 juillet, qu'elle ne reviendrait pas sur son contrôle d'internet pendant les JO. Mais le président chinois Hu Jintao, pour couper court à toute discussion, a demandé aux étrangers, ce vendredi 1er août, de ne pas politiser l'évènement et aux médias de travailler dans la légalité et l'objectivité.

Dans un entretien avec la presse étrangère, il a affirmé que "politiser les jeux Olympiques" n'était pas une réponse à la divergence de points de vues "inévitable" entre "les peuples de différents pays et régions du monde". Sans compter que ce serait "contraire à l'esprit olympique ainsi qu'aux aspirations partagées partout dans le monde". Il conclue : "Bien sûr, nous espérons aussi que la presse étrangère se conformera aux lois et règlements chinois. Nous espérons qu'elle fournira des informations objectives sur ce qui se passera ici".

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