Les académiciens hostiles à une réforme du 49-3

Dans un avis remis ce lundi, l'Académie des sciences morales et politiques déconseille de restreindre l'article 49-3 de la Constitution aux seuls projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Cette restriction risquerait de porter atteinte à la stabilité gouvernementale.

Un gouvernement peut engager sa responsabilité devant l'Assemblée nationale sur le vote d'un texte. Le fameux article 49 alinéa 3 (ou 49-3) de la Constitution de 1958 s'applique pour tout projet de loi. Or, parmi ses 77 propositions en grande partie reprises par le gouvernement Fillon pour réformer la Vème République, le comité Balladur propose de réduire l'application de cet article aux seuls projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Dans un avis remis ce lundi 21 avril 2008 aux pouvoirs publics et fruit de la réflexion d'un groupe de travail présidé par l'académicien Jean Foyer, l'Académie des sciences morales et politiques estime indispensable de maintenir la rédaction actuelle de l'article 49 alinéa 3 dont la procédure a été adoptée sous la IVème République. Elle est défavorable à une restriction de cette mesure aux seuls projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale.

"L'article 49 alinéa de la Constitution de 1958 est une mesure destinée à défendre le gouvernement non pas contre l'opposition mais pour avoir l'appui de la majorité", souligne le président de l'Académie François Terré, lors d'un entretien avec La Tribune. Autrement dit, la restriction proposée par le comité Balladur risquerait de porter atteinte à la stabilité gouvernementale. "Selon moi, cette proposition du comité Balladur est le problème central de la réforme de la Constitution de 1958", insiste-t-il. Sans l'utilisation de l'article 49 alinéa 3, les gouvernements Rocard, Cresson et Bérégovoy n'auraient pas pu gouverner confortablement puisqu'ils disposaient d'une majorité relative à l'Assemblée nationale.

A l'avenir, un gouvernement n'aura plus la possibilité, dans de nombreux cas, de passer en force en engageant sa responsabilité devant les députés pour obtenir l'adoption d'un texte qu'il estime primordial. Par exemple, dans les prochaines années, un gouvernement ne pourra plus faire adopter, s'il n'a pas le soutien de sa majorité, un projet de loi de modernisation de l'économie via l'article 49 alinéa 3...L'Académie des sciences morales et politiques rappelle par ailleurs que cet article n'a été utilisé qu'une seule fois sous la Vème République en matière de lois de finances par le Premier ministre Raymond Barre. Sans oublier de souligner l'efficacité de l'article 49 alinéa 3. Aucune motion de censure n'a en effet été votée depuis l'automne de 1962.

Enfin, la restriction envisagée à l'article 49 alinéa 3 pourrait provoquer un déséquilibre avec l'article 12 de la Constitution (le droit de dissolution de l'Assemblée nationale par le Président de la République). Car, selon l'Académie des sciences morales et politiques, la remarquable stabilité qu'a connue la Vème République est due à l'emploi coordonnée des articles 49 alinéa 3 et 12 de la Constitution. L'avertissement des académiciens sera peut-être entendu à Matignon et à l'Elysée.

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