Rétention de sûreté : Vincent Lamanda accepte la mission Sarkozy tout en s'inscrivant dans la ligne du Conseil constitutionnel

Le plus haut magistrat français annonce accepter le principe d'une mission sur la récidive que souhaite lui confier le président Sarkozy. Dans le même temps, il souligne qu'il "est hors de question de remettre en cause la décision du Conseil constitutionnel" sur la non rétroactivité de la loi.

Le premier président de la Cour de cassation, Vincent Lamanda, sollicité par l'Elysée sur l'éventuelle application rétroactive de la loi de rétention de sûreté, "accepte le principe d'une mission sur la récidive mais il est hors de question de remettre en cause la décision du Conseil constitutionnel qui, comme le dit la Constitution, s'impose à toutes les juridictions, y compris la Cour de cassation", a déclaré ce lundi Vincent Vigneau, chargé de mission à son cabinet qui s'exprimait au nom du plus haut magistrat français.

Cette mission de l'Elysée, évoquée par des "contacts informels" entre Vincent Lamanda et l'Elysée, va être formalisée dans un courrier du chef de l'Etat, a dit l'UMP. Le Conseil constitutionnel a validé jeudi dernier le principe de la "rétention de sûreté", permettant de maintenir indéfiniment emprisonnés certains criminels supposés dangereux, après leur sortie de prison, mais a interdit quasiment toute application aux personnes déjà condamnées et à celles qui le seront pour des faits commis avant la publication de la loi.

"Il y a un problème pour ceux qui ont déjà été condamnés (...) J'ai souhaité demander au président Lamanda son avis parce que mon devoir c'est de protéger les victimes", avait précisé en fin de semaine Nicolas Sarkozy, parlant de la menace de "monstres en liberté".

Dans plusieurs interventions lundi, la ministre de la Justice, Rachida Dati, a parlé d'une "prise en charge" des détenus après leur libération, puis "d'encadrer, ajuster, modifier les modalités (de la loi-NDLR) par la voie d'une circulaire, d'un décret ou peut-être par la loi".

Après l'annonce du magistrat, l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) se félicite que Vincent Lamanda "ait rappelé très logiquement et très fermement au président et au Garde des sceaux qu'il n'était pas possible de déroger à une décision du Conseil constitutionnel". Son secrétaire général, Laurent Bedouet, ajoute que le syndicat entend être "vigilant" sur les suites de la mission.

La loi sur la "rétention de sûreté" prévoit que les criminels condamnés à quinze ans de réclusion et plus pour "assassinat, meurtre, torture ou actes de barbarie, viol, enlèvement ou séquestration" pourront être enfermés à leur sortie de prison. Selon une étude du ministère, 32 détenus bientôt libérables répondent à ce profil. Applicable réellement dans une quinzaine d'années, en raison du principe de non rétroactivité de la loi, réaffirmé par le Conseil constitutionnel, la "rétention" serait prononcée pour une période d'un an renouvelable indéfiniment, sur décision de justice, après un avis d'experts sur la dangerosité des personnes concernées.

Le seul cas d'application rétraoctive autorisé par le Conseil constitutionnel interviendrait quand un détenu libéré sous "surveillance judiciaire" (avec bracelet électronique, traitement obligatoire) violerait ses obligations. Même limité, ce texte inédit en droit français est critiqué surtout à gauche. L'ancien ministre PS de la Justice, Robert Badinter, déplore qu'il soit possible d'être enfermé sur "une présomption de culpabilité d'un crime virtuel".

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