La fraude massive chez SG soulève d'épineuses questions

Après le trader fou de Calyon, Société Générale est victime d'une fraude exceptionnelle. Elle en dit plus sur son auteur- De nombreuses questions demeurent.

La conférence de presse tenue en fin de matinée par la banque a permis d'en savoir plus sur le profil du trader responsable d'une fraude massive d'un montant de 4,9 milliards d'euros. Opérant à Paris dans la salle des marchés actions, ce trader - "un opérateur de base gagnant moins de 100 000 euros (fixe et bonus compris)" - d'une trentaine d'années était employé depuis 2000 par la banque. Il a rejoint le front-office mi-2006 après avoir exercé des fonctions back/middle, où il a "découvert et appris l'ensemble des procédures de contrôle", ont expliqué les dirigeants de la banque. Un savoir qui lui a permis de "construire une sorte d'entreprise dissimulée" en camouflant ses positions grâce à un montage élaboré de transactions fictives. La fraude aurait été découverte lors d'un contrôle des risques de contrepartie en fin de semaine dernière. Il aura fallu de longs mois à la banque pour démasquer le subterfuge, le trader connaissant très bien le calendrier des contrôles.

"Le système du contrôle des risques n'est pas en cause", a affirmé Daniel Bouton PDG de Société Générale. Un argument qui ne convainc pas tout le monde. "SocGen semble dire que le trader connaissait les faiblesses du système. Or, le problème est bien là, il n'aurait dû y avoir aucune faiblesse", relève un managing director d'une grande banque européenne d'investissement sous couvert d'anonymat. De quoi mettre un peu plus la pression sur les équipes en charge des contrôles.

Les banques vont-elles renforcer leurs équipes de gestion des risques et de contrôle ? "La situation va évidemment susciter des réflexions dans ce sens, analyse Vincent Picard, associé en charge du département Banque et Finance de marché du cabinet de recrutement FED Finance. Le mouvement d'embauche sur ces fonctions s'est beaucoup développé ces deux dernières années et continue sur un rythme soutenu." Au point qu'il est aujourd'hui difficile de trouver les bons profils sur le marché... Société Générale a précisé que les effectifs de ses équipes de back-middle avaient été augmentés de 50 % en 2007 pour atteindre 2 000 personnes au total.
Sera-t-il plus difficile de passer du middle au front-office ? L'histoire de cette fraude rappelle celle du trader Nick Leeson, qui avait brutalement quitté son bureau à la Barings Bank de Londres après avoir perdu 1,60 milliard d'euros. Lui aussi avait débuté sa carrière en middle-office. "Cette mobilité du middle vers le front est très rare et risque, à la suite de cet évènement, d'être rendue encore plus difficile, craint Cécile Cousteix, consultante sur les métiers de la Banque pour le cabinet de chasseurs de têtes Lincoln Associés. Aujourd'hui, environ 5 % des professionnels qui travaillent sur les risques et les contrôles passent sur le poste de trader, généralement car ils ont une formation solide, de bonnes connaissances en maths, travaillent bien avec le Front..."

Quelles conséquences pour les employés de SG ? Les syndicats de la banque ont été convoqués ce jeudi 24 janvier à 8 heures par la direction qui leur a annoncé la nouvelle. Ils se sont aussitôt réunis en intersyndicale face à la "panique". Leur priorité est de "pérenniser l'entreprise et les emplois avant tout", a déclaré une source syndicale à l'AFP. La direction a assuré que la situation financière de la banque était "restaurée" et a loué "le potentiel formidable de ses équipes".

"Dans l'immédiat, l'employé mis en cause ainsi que toute la ligne hiérarchique de supervision, jusqu'au responsable mondial des marchés actions du groupe, vont quitter le groupe ainsi qu'un ou deux autres responsables", a indiqué Daniel Bouton, soit "quatre à cinq personnes". Côté rémunération, Daniel Bouton a donné le ton en indiquant que Philippe Citerne, administrateur, directeur général délégué, Jean-Pierre Mustier, directeur de la BFI, et lui-même avaient renoncé à leur partie variable au titre de l'année 2007 ainsi qu'à leur fixe jusqu'en juin 2008. Jean-Pierre Mustier aurait également refusé de toucher un bonus au titre de l'année 2008.

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