Société Générale : découvrez le rapport Lagarde qui met en cause les systèmes de contrôle

Christine Lagarde a remis ce lundi le rapport sur la perte de trading de 4,9 milliards d'euros enregistrée par la banque. Il est disponible en cliquant dans notre rubrique : "pour aller plus loin". Sans surprise, le rapport met en lumière les défauts de contrôle de la banque sur les opérations de trading de ses employés et la gestion des alertes par l'établissement. Suite à ce constat, Bercy propose de renforcer les dispositifs internes de contrôle des établissements de crédit, ainsi que les pouvoirs de la Commission bancaire.

Nouvel épisode dans le feuilleton "Société Générale". La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a remis ce lundi au Premier ministre François Fillon son rapport sur la perte de trading de 4,9 milliards d'euros de la banque française (rapport disponible en cliquant ci-contre sur le lien : pour aller plus loin). Les dispositifs de contrôle, dont la déficience a été mise en évidence par cette affaire, ont été passés au crible, ainsi que la gestion de la crise par la Société Générale et son PDG, Daniel Bouton.

Dans un communiqué de Bercy, le ministère a détaillé les prinicipaux points de ce rapport demandé par le Premier ministre, au lendemain de la révélation du scandale. Le rapport "identifie plusieurs points susceptibles d'avoir été déterminants", indique le communiqué.

Parmi les points positifs, le rapport reconnaît ainsi que le débouclage sur les marchés des positions (50 milliards d'euros) à l'origine de la perte a été réalisé de manière professionnelle. Daniel Bouton avait été critiqué sur ce point, étant accusé d'avoir creusé la perte par un débouclage trop rapide des positions.

Autre point favorable pour la banque: la gestion des règles d'information du marché sur ces positions a été faite conformémement aux réglementations en vigueur. La banque, qui avait découvert la fraude le 18 janvier, ne l'avait révélée que plusieurs jours après, une fois le débouclage des positions effectué dans un contexte boursier agité.

Toutefois, le rapport souligne qu'il importera à l'avenir de mieux préciser l'articulation entre les autorités de supervision et le gouvernement dans ce type de situation. Le gouvernement ainsi que l'Elysée n'ont en effet été informés que le jeudi matin, quelques heures avant la révélation publique de la fraude. Un délai qui a pour le moins agacé les pouvoirs publics.

Surtout, le rapport met en lumière les défauts de contrôle de la banque sur les opérations de trading de ses employés. "A l'avenir, il faudra mieux identifier la lutte contre la fraude interne comme un élément à part entière de contrôle interne" est-il écrit. Et ce d'autant plus que ce n'est pas la première fois que la Société Générale est confrontée à cela. Un ancien trader français l'attaque aux prud'hommes pour "licenciement sans cause réelle et sérieuse". Guillaume Pollet - de la famille des fondateurs de la Redoute - a été évincé en décembre 2001 par la banque pour cause de délit d'initié. Or celui-ci indique qu'il a toujours agi à la demande expresse de ses supérieurs.

Suite à ce constat, Bercy propose ainsi de renforcer les dispositifs internes de contrôle des établissements de crédit, en renforcant les contraintes pesant sur ces établissements en matière de suivi du risque opérationnel. Le ministère de l'Economie suggère de fait la création de comités au sein des organes sociaux dédiés à la surveillance du contrôle des risques et au contrôle interne.

Bercy souhaite aussi augmenter le montant des sanctions que la Commission bancaire peut infliger en cas de fraudes. Enfin, la France proposera à ses partenaires que les discussions sur ces pistes de réflexion soient accélérées afin que des standards internationaux puissent s'appliquer à l'ensemble des acteurs du système financier.

Dans son communiqué, le ministère précise que le rapport "n'a pas vocation à évoquer des culpabilités ou des responsabilités alors que certains des faits évoqués font l'objet d'une information judiciaire et d'enquêtes de l'autorité des marchés financiers et de la commission bancaire".

"Mon rapport n'est pas un rapport d'enquête, il n'a pas pour objet d'établir des responsabilités", a déclaré Christine Lagarde après la remise de son rapport de onze pages à François Fillon. "Mon rapport était destiné à établir la réalité des faits tels qu'ils se sont passés depuis le début de cette affaire", a-t-elle poursuivi. "Il avait ensuite pour objet de déterminer si les contrôles avaient fonctionné et s'ils n'avaient pas fonctionné, pourquoi?".

La ministre de l'Economie a reconnu que "très clairement, certains mécanismes de contrôle interne de la Société générale n'ont pas fonctionné et ceux qui ont fonctionné n'ont pas toujours été suivis des modifications appropriées". "Il est un risque particulier, qui est le risque opérationnel, qui doit être plus sérieusement pris en compte", a-t-elle souligné.

Christine Lagarde a également annoncé qu'elle réunirait "les présidents des comités d'audit des banques de la place de Paris pour partager avec eux ce rapport et les amener eux aussi à en tirer les enseignements".

Outre le rapport, la ministre de l'Economie était aussi auditionnée ce lundi matin devant la Commission des Finances du Sénat. Elle a ainsi reconnu que le débouclage par la Société Générale des 50 milliards d'euros de positions engagées par le trader Jérôme Kerviel sur les marchés a "contribué" à la chute des Bourses européennes mais ne l'a pas causée.

"On ne peut pas affirmer valablement que les opérations de débouclage de la Société Générale ont causé les baisses des marchés européens", a affirmé la ministre. Mais "qu'elles y aient contribué comme toute opération de marché quelle qu'elle soit, bien entendu", a-t-elle ajouté.

De son côté, la Société générale a déclaré ce lundi ne faire aucun commentaire sur le rapport de la ministre de l'Economie et des Finances, Christine Lagarde, consacré à sa perte de trading record, estimant seulement qu'ils ne mettaient pas en cause "ses systèmes de mesure et de gestion des risques de marché".

"La direction de la Société générale n'a pas de commentaire à faire sur les parties du rapport consacrées aux faits", indique la banque dans un bref communiqué. "Les systèmes de mesure et de gestion des risques de marché ne sont pas mis en cause par le rapport. S'agissant des contrôles qui ont été successivement contournés par cette fraude, les mesures qui auraient permis de la détecter et d'y mettre fin sont mises en oeuvre ou le seront à court terme", conclut la banque.

La Société Générale devrait lancer cette semaine, selon les informations de La Tribune, son augmentation de capital à hauteur de 5 milliards d'euros. La banque se doit de renforcer ses fonds propres alors que des menaces d'OPA de la part de ses concurrentes, et notamment de BNP Paribas, se profilent.

Par ailleurs, de l'autre côté de l'Atlantique, le gendarme de la Bourse américaine (SEC) et le département de la Justice auraient ouvert une enquête sur les ventes d'actions d'un des administrateurs de la Société Générale, Robert A Day, selon le Wall Street Journal de ce lundi dans son édition en ligne.

A Paris, l'avocat d'une centaine d'actionnaires de la Société Générale avait déposé la semaine dernière une plainte contre X pour "manipulation de cours" et "délit d'initié", suivi par l'Association des petits porteurs actifs (APPAC) qui avait également déposé une plainte pénale contre X et demandé l'ouverture d'une instruction judiciaire pour délit d'initié. Cette plainte visait notamment Robert A. Day, ancien patron de la société de gestion d'actifs américaine TCW, aujourd'hui propriété de la Société générale, qui a vendu 85,7 millions d'euros d'actions de la banque le 9 janvier. Deux fondations auxquelles il est "lié" selon l'AMF, la Robert A. Day Foundation et la Kelly Day Foundation, ont également vendu respectivement le 10 janvier pour 8,63 millions d'euros et 959.066 euros d'actions.


La Société Générale affronte également l'affaire "Sentier 2"
Les hasards du calendrier font parfois très mal les choses. Déjà ébranlés par la perte de 6,9 milliards d'euros imputée à un trader - pour 4,9 milliards - et à la crise des "subprimes" - pour 2 milliards au quatrième trimestre - , la Société Générale et son PDG, Daniel Bouton, sont jugés en correctionnelle à Paris à partir de ce lundi pour "blanchiment aggravé" de capitaux. Daniel Bouton s'expliquera sur le rôle de sa banque dans un circuit de chèques entre France et Israël. Ce circuit aurait servi à blanchir le produit de fraudes fiscales, de vols ou des fonds détournés d'entreprises.
Dans ce dossier, ouvert en juillet 1998 et baptisé "Sentier II", seront jugées trois autres personnes morales: la Société Marseillaise de Crédit, filiale de la HSBC, la Banque Nationale du Pakistan, et la Barclays, ainsi que 137 personnes physiques. La Société Générale a rappelé dimanche sa position dans l'affaire dont les audiences devant le tribunal correctionnel concernant la Société générale se dérouleront les 28 et 29 mai, précise la banque dans un communiqué. La banque, dit ce texte, "a rigoureusement respecté ses obligations légales et les usages de place connus et admis par les autorités de tutelle en ce qui concerne le traitement des chèques". Elle estime que "ne peut constituer un comportement répréhensible le fait, notamment, de n'avoir pas mis en place un contrôle systématique des chèques et ainsi de n'avoir pas détecté et rejeté les chèques considérés comme frauduleux". A cette époque, rappelle-t-elle, "aucune disposition ne prévoyait une obligation de vérification des chèques à des fins de lutte contre le blanchiment. De telles obligations n'ont été imposées aux banques qu'en avril 2002". "Ni la banque, ni ses collaborateurs n'ont sciemment ou intentionnellement participé à des opérations de blanchiment", conclut le texte.

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