Depuis la crise, les grandes fortunes revoient leur allocation d'actifs

La clientèle fortunée manifeste de plus en plus d'aversion au risque et s'inquiète de la hausse de l'inflation.
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Qui a dit que les grandes fortunes étaient téméraires ? Les clients très aisés sont demandeurs d'une politique de gestion conservatrice. La crise a accentué la tendance, renforçant leur traditionnelle réserve dans la prise de risques.

« L'aversion au risque est beaucoup plus marquée qu'avant, ce qui implique plus d'adaptation, notamment à la volatilité des marchés. Cela demande d'anticiper par exemple les conséquences des événements géopolitiques, et de mettre en oeuvre des politiques de gestion adaptées à ces évolutions majeures », confirme Daniel Truchi, directeur de Société Générale Private Banking. C'est ce que reflète aussi l'étude que la banque a réalisée avec Forbes Insights. Elle montre que les effets de la crise affectent encore les décisions d'investissement des grandes fortunes.

« Nous conseillons différemment le client, si son patrimoine est totalement monétisé ou si la personne est encore en activité ou possède encore des titres de son entreprise », précise Patrick Folléa, directeur de la filiale française de la banque. Un grand client privé, qui fait fructifier son entreprise, souhaitera ainsi mettre à l'abri les fruits de son travail, et aura souvent un profil d'investisseur plus conservateur. Mais plus le patrimoine est liquide, plus les stratégies d'investissement peuvent être agiles. Les grandes fortunes ont alors tendance à privilégier leur marché d'origine, qu'ils connaissent bien. Et les plus hardis réallouent une partie de leurs actifs financiers vers les pays émergents, en particulier en Asie-Pacifique indique Forbes.

Les clients fortunés émettent aussi des inquiétudes au sujet de la reprise de l'inflation. Certains ont même confié à Forbes leur intention d'abandonner le dollar. « Nos grands clients sont soucieux de se prémunir contre les risques inflationnistes. Pour cela, ils sont souvent à la fois créditeurs et débiteurs, et investissent dans l'immobilier de rendement », confirme Jean-Marie Turquais, directeur de l'ingénierie patrimoniale et financière chez Société Générale Private Banking France.

« Multi-family office »

L'étude révèle également que depuis la crise, de nombreuses grandes fortunes revoient les relations avec leurs conseillers, notamment parce qu'ils estiment que certains n'ont plus l'expertise correspondant à leurs nouveaux objectifs d'allocations. Le rôle des « family offices » devrait s'accroître, notamment en Asie où les problématiques de transmission de patrimoine sont fortes. « Les grands clients peuvent faire appel à un conseiller ou un ?multi-family office?, qui jouent un rôle d'interface entre le client et nous. En Asie, certains entrepreneurs disposent même au sein de leur entreprise d'une équipe dédiée à leur gestion d'actifs, qui nous demande ensuite d'intervenir », explique Daniel Truchi. Un métier qui pourrait faire de l'ombre aux banquiers privés, même si ceux-ci s'en défendent.

Moi, 74 ans, homme d'affaires, milliardaire français

Mon premier est un homme dans 92 % des cas. Mon deuxième atteint un âge moyen de 74 ans, soit le plus élevé du monde. Mon troisième a hérité et fait fructifier cette manne dans la moitié des cas. Mon tout est le profil type d'une grande fortune française. C'est ce que révèle une étude Forbes réalisée avec Société Générale Private Banking, qui recense 12 personnes ayant une fortune comprise entre 1,1 et 27 milliards de dollars dans l'Hexagone.

Contrairement à leurs homologues russes, qui ont tous construit leur fortune par eux-mêmes, les grandes fortunes françaises sont considérées comme « self-made » à 33 % et héritées à 67 %. Les clients fortunés exercent néanmoins une activité professionnelle dans 58 % des cas. Ce qui reflète bien le profil des 175 familles gérées par Société Générale Private Banking en France, majoritairement constituées d'entrepreneurs. Ainsi, les clients de la banque privée sont pour la plupart issus des secteurs de l'industrie, de la distribution et de l'immobilier, et l'origine de leur patrimoine provient à 48 % de leur activité professionnelle. Mais les Français ne sont pas les plus actifs. Ils arrivent loin derrière les Russes, qui travaillent à temps plein pour 93 % d'entre eux ou encore les Chinois (85 %).

« Rajeunissement »

« Nous avons observé un rajeunissement important de la clientèle fortunée, probablement dû au secteur des nouvelles technologies », constate aussi Patrick Folléa, directeur de Société Généralecute; Générale Private Banking France. Souvent multibancarisés, ses clients se situent plus dans une fourchette de 41-65 ans qu'auparavant, même si plus de la moitié de sa clientèle dépasse les 65 ans. Le banquier remarque aussi qu'ils recourent davantage à des family offices ou à un conseiller en gestion de patrimoine.

Un autre phénomène a été observé par Forbes : alors que les grandes fortunes américaines (52 %) ou moyen-orientales (74 %) n'hésitent pas à se lancer en politique, les Français sont beaucoup moins nombreux à prendre cette voie (17 %). Ils sont néanmoins parmi les plus philanthropes, et distribuent des dons à des oeuvres de bienfaisance au travers de fondations pour 58 % d'entre eux, alors que seuls 7 % des clients fortunés chinois le font, à cause de barrières culturelles.

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