Le gouvernement prépare la sortie de crise. Le Premier ministre Jean Castex accompagné du ministre de l'Economie Bruno Le Maire et celui des Comptes publics Olivier Dussopt doit annoncer une commission spécialisée chargé de faire des propositions au cours du premier trimestre 2021 avec la remise d'un rapport au mois de mars. "Au sortir de la crise historique, l'impact sur les finances publiques et les comptes de la nation seront lourds et durables. Cela va nécessiter un pilotage adapté. L'idée est de prendre le soin de réfléchir pour nous faire des propositions" assure l'entourage du chef du gouvernement. La pandémie a obligé le gouvernement à mettre rapidement en oeuvre des mesures d'urgence économiques et sociales pour éviter un effondrement trop brutal de l'économie et tenter de préserver le tissu productif. Résultat, les compteurs des dépenses s'affolent depuis le printemps. Dans le PLF2021, l'exécutif anticipe une dette supérieure à 116% du produit intérieur brut et un déficit à 6,7%. A cela s'ajoutent, la mise en place du plan de relance qui est retardée par la seconde vague et l'instauration des nouvelles mesures de restriction à l'automne.
Une commission de 10 personnes présidée par Jean Arthuis
L'organisation qui "sera à pied d'oeuvre rapidement" est présidée par l'ancien ministre de l'Economie et ex-député européen Jean Arthuis. Cet ancien élu local implanté en Mayenne à Château Gontier a rejoint la République en marche pour soutenir Emmanuel Macron lors de la présidentielle de 2017. Il a été président de la Commission des budgets du Parlement européen de 2014 à 2019. Cet homme issu des rangs de la droite française sera accompagnée d'un panel de dirigeants. L'ancienne présidente du MEDEF, Laurence Parisot doit prendre part à cette commission ainsi que Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP depuis 2012.
Plusieurs économistes et universitaires doivent également participer aux travaux de ce nouvel organisme. Hélène Rey, qui est professeure de la London School of Economics et membre du cercle des économistes est une spécialiste en macroéconomie internationale. Elle sera accompagnée de Natacha Valla, doyenne de l'École du management et de l'innovation de Sciences Po Paris depuis septembre 2020. Cette ancienne économiste de la Banque centrale européenne (BCE) est passée par la banque américaine Goldman Sachs au moment de la crise des subprimes en 2008 et le groupe LVMH. Cette spécialiste des questions monétaires a occupé le poste de directrice générale adjointe pour la politique monétaire de la BCE jusqu'en janvier 2020.
Le gouvernement a également fait appel à des regards étrangers. Beatrice Weder di Mauro est professeure à l'Université de Mainz et à l'Insead. C'est une économiste Italo suisse qui a travaillé sur les crises financières et la réglementation de la finance internationale et les dettes souveraines. Elle a notamment conseillé Gerhard Schröeder et Angela Merkel. De son côté, Thomas Wieser, qui est un économiste autrichien, ancien directeur général des politiques économiques et des marchés financiers au ministère des finances autrichien est un habitué des cénacles européens. Ce chercheur a eu des responsabilités à l'échelle européenne en présidant, "au sein de l'Eurogroupe, deux organes de conseil : le Comité économique et financier (EFC) et le groupe de travail Eurogroupe (EWG)" précise Bercy. Enfin, deux hauts fonctionnaires seront également consultés dans le cadre de cette commission. Il s'agit du directeur de l'Insee Jean Luc Tavernier et Raoul Briet, président de la première chambre de la cour des comptes de 2012 à 2019. Puis, l'ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine sera également aux côtés de ce groupe de travail.
La fin du "quoi qu'il en coûte et "la sortie des déséquilibres"
Au printemps, le président de la République Emmanuel Macron avait assuré qu'il fallait sortir de cette crise "quoi qu'il en coûte". Ce discours sur un ton martial avait marqué l'opinion publique habituée à la réduction nécessaire de la dépense publique et des déficits. En Europe, la crise a suspendu les principes de l'orthodoxie budgétaire attachés au respect des 3% de déficit et des 60% de dette. Dans sa lettre de mission, le Premier ministre a dessiné les principaux objectifs et le mandat adressés à cette nouvelle commission. Il s'agit selon l'entourage du chef du gouvernement de "réfléchir à la manière dont on peut en sortir de crise et reconstruire notre trajectoire de finances publiques. Ils vont également travailler sur des règles de gestion. La Cour des comptes a produit un rapport récemment sur les enjeux de gouvernance des finances publiques. Comment donner plus de places aux managers et représentants de l'Etat dans les territoires ? Enfin, leur réflexion portera sur la gestion ordonnée et stratégique de notre dette. Le niveau de dette publique est durablement accru. Il s'agit d'avoir le temps de regarder une meilleure gestion de la dette publique."
Par ailleurs, la présidence de la Commission et la plupart de ses membres devraient prendre position pour un retour à l'équilibre budgétaire. "Il faut sortir progressivement des déséquilibres" explique Matignon. Si les proches de Jean Castex assurent que "c'est une commission équilibrée qui vise à rassembler des visions pluralistes. C'est une commission de personnes indépendantes qui ne représentent aucune école, ni vision de chapelle", la plupart des profils de la commission défendent des principes économiques attachés à l'orthodoxie budgétaire. "Ce sont des personnalités constructives. C'est une composition qui recueille l'assentiment des parties prenantes" complètent les services du Premier ministre.