Corse : l'impôt prend le maquis

Un rapport de la Cour des Comptes critique sévèrement la manière dont l'administration collecte l'impôt sur l'île. Le ministère de l'Economie et des Finances se défend.
Nicolas Raffin
Au total, toutes ces dérogations à l'impôt représentent un manque à gagner de 78 millions d'euros pour l'Etat, souligne la Cour.
Au total, toutes ces "dérogations" à l'impôt représentent un manque à gagner de 78 millions d'euros pour l'Etat, souligne la Cour. (Crédits : REUTERS/John Schults)

La Corse et ses pratiques fiscales douteuses viennent d'être épinglées par un rapport de la Cour des comptes, publié lundi. L'institution y dépeint, sans langue de bois, une situation catastrophique dans le rapport à l'impôt : "L'État a laissé perdurer en Corse des dérogations à la règle générale parfois contraires à la loi, à la réglementation européenne et au principe général d'égalité devant l'impôt."

Le rapport dénonce toute une série de manquements : ainsi, la Corse se baserait sur un décret impérial du...24 avril 1811 pour exonérer les alcools et les métaux de taxes indirectes. Un décret qui "a perdu toute raison d'être" tranche la Cour des comptes, même si elle rappelle que la Cour de Cassation, en 1956 puis 1992 a jugé que "ces dispositions conservaient force légale et demeuraient applicables aussi longtemps qu'un texte législatif n'y mettait pas fin". Autrement dit, seule une nouvelle loi permettrait de mettre un terme à ce régime d'exception.

Un manque à gagner de 78 millions d'euros

Autre pratique difficilement compréhensible : la TVA sur les vins produits et consommés en Corse n'est pas appliquée. Pourquoi ? La Cour explique que l'île de Beauté se base sur..."un simple propos tenu par le ministre de l'Economie et des Finances" en 1967, une déclaration qui "n'a jamais été confirmée par aucun texte de nature à lui donner une quelconque portée juridique".

Le rapport note aussi que les camions de plus de 12 tonnes immatriculés en Corse et circulant exclusivement sur l'île ne payent pas la taxe spéciale sur certains véhicules routiers (TSVR). Au total, toutes ces "dérogations" représentent un manque à gagner de 78 millions d'euros pour l'Etat, souligne la Cour.

Données incomplètes

Et le réquisitoire n'est pas fini. Les magistrats notent également des "défaillances" pour ce qui concerne le contrôle fiscal. Ainsi le taux de recouvrement de l'impôt des particuliers s'élevait à 96,8% en Corse-du-Sud et 96,5% pour la Haute-Corse (moyenne 2010-2014,), un taux inférieur à celui enregistré en métropole (98,7%). Cela provient du fait que les fichiers des contribuables sont peu fiables, mais aussi que les obligations déclaratives sont moins bien respectées qu'ailleurs.

La Cour des Comptes formule enfin six recommandations à appliquer dès 2017 pour aligner la fiscalité corse sur celle du continent. Ce jugement sévère a atterri sur le bureau de Michel Sapin le 21 juin dernier, sous forme d'un référé. Mais il n'a été rendu public que lundi, la réponse du ministre de l'Economie et des Finances n'étant arrivée que le 6 septembre.

Réponse point par point

Cette dernière, cosignée par Michel Sapin et Christian Eckert, s'attache à répondre à toutes les problématiques soulevées par le rapport...hormis la non-perception de la TVA sur les ventes de vins produits et consommés en Corse. Signe que la Cour a touché juste ?

Pour le reste, Bercy persiste et signe, par exemple sur le régime de la TSVR, sans expliquer le but de cette dérogation. Concernant le recouvrement de l'impôt, les deux membres du gouvernement rappellent, en reprenant les arguments de la Cour des comptes, que « l'insularité et la faiblesse des revenus déclarés, qui, en moyenne, sont parmi les plus bas de France » constituent « un contexte exigeant pour l'exercice des missions fiscales ».

Michel Sapin et Christian Eckert affirment que l'amélioration des fichiers des contribuables « constitue d'ores et déjà un des objectifs prioritaires ». En ce qui concerne le taux de recouvrement de l'impôt des particuliers, le ministère veut voir le verre à moitié plein : « le civisme déclaratif (...) est en augmentation depuis 2012 » affirme Bercy. Enfin, en ce qui concerne les contrôles fiscaux des entreprises, le ministère reconnait certes qu'ils sont moins nombreux que sur le continent mais assure qu'ils ont « une meilleure efficience ». Bercy note par ailleurs que quatre inspecteurs ont été recrutés en 2016 pour renforcer les effectifs de contrôleurs fiscaux locaux.

Le rapport a également fait réagir Gilles Simeoni. Pour le président du conseil exécutif de Corse qui a répondu à l'AFP, l'idée selon laquelle l'île "bénéficierait de privilèges fiscaux indus (...) est totalement infondée", affirmant au passage que "des lois coloniales ont contribué à anéantir le tissu économique".

(Avec AFP)

Nicolas Raffin
Commentaires 11
à écrit le 13/09/2016 à 21:29
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Voter c'est bien, frauder le fisc c'est mieux..

à écrit le 13/09/2016 à 14:33
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On parle de la Corse il y a peut être à redire mais si l'on regardait du côté des DOM TOM là cela doit être encore plus folklo et dire qu'il y a un ministère de "l'égalité réelle" belle hypocrisie et belle fumisterie!

à écrit le 12/09/2016 à 22:48
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Retenu a la source y a rien de mieux !

à écrit le 12/09/2016 à 19:29
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En tant que "colonisateur", je le dis: qu'on leur donne leur indépendance et qu'on les laisse se démerder avec leur chèvres, leurs saucissons importés, leurs mentalités moyenâgeuses, et leur impôts. La Corse est hyperassistée de toutes les manière...

le 13/09/2016 à 15:01
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Ouais ?! Récemment sur une polémique d'attaque de requin à la Réunion, un élu répondait à un touriste continental qui évoquait le risque et une action nécessaire. Ici t'es pas chez toi ! Pour un élu de la République, vis à vis d'un compatriote...

le 14/09/2016 à 14:59
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@Qu'on les libère : L'ignorance est mère de toutes les inepties, vous en êtes l'exemple parfait.! Oui la France s'est comportée et continue a le faire comme un pays colonialiste envers la Corse, c'est un fait incontestable. Votre roitelet de pacoti...

à écrit le 12/09/2016 à 18:09
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77 millions... On aimerait d'abord que l'état récupère les 80 milliards d'euros annuel que nous coûte l'évasion fiscale des grandes fortunes de notre pays et ensuite on pourra parler de "principe général d'égalité devant l'impôt." Merci

à écrit le 12/09/2016 à 17:23
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j'avais lu il y a quelque temps que c'est en Corse qu'il y a le plus de RMI et qu'il y a le plus de 4/4 proportionnellement au nombre d'habitants. Faut il faire une relation ?

à écrit le 12/09/2016 à 17:14
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.. et rajoutons à cette excellente liste: l'impôt sur les successions, l'Arlésienne, dont on se demande pourquoi il n'est pas appliqué sur les mêmes bases que sur le continent.. Ah oui, Napoléon était corse..

à écrit le 12/09/2016 à 15:21
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Parce qu'on paie des impôts en Corse? Manquerait plus que les continentaux nous demande de travailler ? Lisandru, remets moi un petit verre d'Aghione !!

le 13/09/2016 à 1:38
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l'impôts qui engraisse le fonctionnaire et le politique et qui ruine celui qui travaille !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

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