Coup de frein sur la croissance française au premier trimestre

Par Grégoire Normand  |   |  766  mots
Ce coup de mou de la croissance ne remet toutefois pas en cause à ce stade l'"acquis de croissance" pour 2018 -- c'est-à-dire le niveau que le PIB atteindrait si l'activité stagnait d'ici à la fin de l'année. Selon l'Insee, ce dernier se maintient à 1,2%, en raison de la dynamique héritée de l'année 2017, marquée par une croissance soutenue (2,2%, soit le plus haut niveau depuis 10 ans).
La croissance a ralenti au premier trimestre à 0,2%, après 0,7% au dernier trimestre 2017, provoquant quelques inquiétudes. Le gouvernement d'Édouard Philippe, dans son programme de stabilité budgétaire publié mi-avril, a dit parier sur une croissance de 2% cette année. Les derniers chiffres montrent que les prévisions de l'exécutif pourraient être bien optimistes.

Le ralentissement de l'économie française se confirme. Selon les derniers chiffres de l'Insee publiés ce mercredi 30 mai, le produit intérieur brut en volume a ralenti pour s'élever à 0,2% sur les trois premiers mois de l'année, après 0,7% au dernier trimestre 2017. L'institut de statistiques a ainsi révisé ses chiffres de croissance à la baisse par rapport à sa première estimation. L'augmentation du PIB de la France était initialement prévue à 0,3%. Cette baisse est à mettre en regard d'une croissance encore plus robuste qu'estimée pour les trimestres précédents. Si la croissance du dernier trimestre 2017 a été confirmée à 0,7%, les trois autres trimestres ont connu des révisions favorables à 0,8% pour le premier trimestre et à 0,7% pour les deux suivants). Ce freinage apparaît très brutal, mais il représente plutôt "un contrecoup, une respiration après une fin d'année 2017 très dynamique", a estimé le directeur général de l'Insee, Jean-Luc Tavernier, mercredi matin lors d'une audition par la commission des finances de l'Assemblée.

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Baisse de l'investissement

Ce coup de mou s'explique par un ralentissement de l'investissement des entreprises et  de la consommation des ménages. Dans le détail, les dépenses de consommation des ménages ont progressé de 0,1% entre janvier et mars, alors qu'elles avaient augmenté de 0,2% lors des trois mois précédents.

La consommation en biens est "en léger repli" pour le deuxième trimestre consécutif tandis que celle en services "ralentit légèrement", précise l'organisme public, qui qualifie les dépenses des ménages d'"atones". Les investissements des entreprises se sont de leur côté effondrés, pour atteindre +0,1% au lieu du 0,5% jusque-là annoncés. "Ce ralentissement est principalement dû au repli de l'investissement en biens manufacturés (−1,3% après +1,6% au dernier trimestre 2017)", précise l'Insee.

D'après l'institut public, l'investissement des ménages a lui aussi marqué le pas, avec une croissance de 0,2% contre +0,6% au trimestre précédent, "en raison d'un ralentissement dans le secteur de la construction". Le commerce extérieur, qui s'était fortement redressé entre octobre et décembre, a quant à lui eu un effet nul sur la croissance: les exportations ont ainsi en effet reculé de 0,3% (après +2,3%), mais les importations ont connu une dynamique similaire (-0,3%, après +0,1%).

La consommation de biens recule en avril

L'institut de statistiques a également expliqué que les dépenses de consommation des ménages en biens ont reculé au mois d'avril de 1,5%. La consommation d'énergie s'est nettement repliée tout comme les achats alimentaires. En ce qui concerne l'énergie (−5,4 % après −0,9 %), les dépenses de chauffage ont nettement baissé en raison de températures supérieures aux normales saisonnières en avril, après des mois de février et mars froids. Du côté des produits raffinés, les dépenses en gazole ont diminué alors que celles en essence ont progressé.

Tendance baissière du chômage

La tendance du chômage reste à la baisse en France malgré la remontée de son taux au premier trimestre, a déclaré mercredi le directeur général de l'Insee, Jean-Luc Tavernier. L'institut a fait état la semaine passée d'une remontée de 0,3 point du taux de chômage au sens du Bureau international du travail au premier trimestre en France métropolitaine, à 8,9%, après une baisse historique de 0,8 point au dernier trimestre 2017. En incluant les départements d'Outre-mer (hors Mayotte), il a rebondi de 0,2 point à 9,0%.

"Il y a eu une petite hausse inattendue au troisième trimestre et une très forte baisse au quatrième, historique. Ça appelait une petite correction, une remontée au premier trimestre qui ne nous inquiète pas", a dit Jean-Luc Tavernier lors d'une audition devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale.

"On continue de penser que la tendance sur le chômage est baissière, au-delà des aléas de l'enquête au trimestre le trimestre", a-t-il ajouté en soulignant que le rythme des créations d'emploi dans le secteur privé, un autre chiffre diffusé par l'Insee, était resté dynamique au premier trimestre.

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Jean-Luc Tavernier a reconnu que l'enquête de l'Insee sur l'emploi, à partir duquel le taux de chômage est calculé chaque trimestre, était "un peu chahutée" au vu des dernières publications, "pour des raisons que nous n'avons pas encore identifiées tant du point de vue de la collecte que de l'exploitation des données".

(Avec agences)