Covid : le prix Nobel d'économie Paul Krugman vante la capacité de résistance de la France

Ce n'est pas tous les jours qu'un prix Nobel d'Economie vante la capacité d'adaptation de notre économie. Selon lui, la France est le pays « vedette » de cette pandémie. Voici pourquoi.
Fanny Guinochet
Photo d'illustration : le prix Nobel d'économie 2008, Paul Krugman, lors du World Business Forum à New York, le 7 octobre 2009.
Photo d'illustration : le prix Nobel d'économie 2008, Paul Krugman, lors du World Business Forum à New York, le 7 octobre 2009. (Crédits : Reuters)

D'habitude, notre pays est plutôt pointé du doigt pour le niveau de ses dépenses sociales, sa rigidité, sa dette, etc. Cette fois, Paul Krugman souligne notre formidable résilience. Dans un tribune publiée par le New York Times, le célèbre économiste néokeynesien tresse les lauriers de notre gestion de la crise. Il fait de la France, pourtant souvent moquée outre-Atlantique, le pays « vedette », « star » dans l'appréhension de la pandémie.

Le fameux « quoi qu'il en coûte », une stratégie gagnante

Et de vanter les mérites des aides distribuées par l'État dans cette période, et notamment la panoplie de mesures de soutien du fameux « quoi qu'il en coûte »: exonération des cotisations, fonds de solidarité, prêts garantis par l'État...

Selon lui, la France a réussi la prouesse d'éviter une chute massive de l'emploi. Il est vrai que, contre toute attente, le niveau de chômage est plus bas en ce moment qu'avant la pandémie : en un an, il y a eu 500.000 chômeurs de moins inscrits à Pôle Emploi, un taux de chômage autour de 8% de la population active, bien meilleur qu'avant crise. La reprise a encouragé les embauches. Et c'est sans compter les créations d'entreprises qui se sont envolées - près de 1 million, l'an dernier, un record !

Pour Paul Krugman, il faut donc saluer la stratégie du gouvernement dans son soutien aux entreprises. Cela a évité les faillites en cascade: preuve en est, le nombre de défaillances de sociétés n'a jamais été aussi bas depuis 35 ans : 28.000 enregistrées l'an dernier, alors que, depuis 10 ans, la France en comptabilisait plutôt 50.000 en moyenne annuelle.

Grâce aux aides d'État, les sociétés même les plus fragiles, dans des secteurs très exposés à la crise comme l'hôtellerie, la restauration et le tourisme, ont pu conserver leur appareil de production, leur trésorerie mais aussi leurs équipes.

La tactique coûteuse mais payante du chômage partiel

D'ailleurs, parmi les dispositifs déployés par l'exécutif pendant cette période, Paul Krugman vante tout particulièrement la mise en place massive du chômage partiel. Au plus fort de la crise, au printemps 2020, près de 9 millions de salariés étaient concernés par ce dispositif. Cette mesure, bien que coûteuse pour les finances publiques, a permis de garder la relation, le lien entre employeurs et salariés.

La France a ainsi évité le mouvement de "grande démission", comme aux États-Unis où le gouvernement a distribué des chèques de soutien aux employés, mais où près de 4 millions d'Américains actifs sont sortis du marché du travail après avoir rompu leur contrat avec leur patron.

Selon Paul Krugman, la France est bien armée pour profiter à plein de la reprise. Elle affiche d'ailleurs une des meilleures croissances européennes de 2021, au-delà de 6,5%, et bien au-delà de la moyenne européenne, qui tourne plutôt autour de 5%.

Le pari gagnant des écoles maintenues ouvertes pendant la pandémie

Autre satisfecit pour la France, la politique du maintien des écoles ouvertes. Selon Paul Krugman, cela fut déterminant pour que les parents, et surtout les mères, puissent reprendre leur poste, et faire tourner l'économie.

Au passage, l'économiste souligne le système de garde d'enfants, très développé dans l'Hexagone comparé à d'autres voisins européens.

Une stratégie vaccinale qui s'est révélée efficace

Enfin, dernier bon point distribué, la campagne de vaccination qui, malgré ses débuts poussifs, s'est finalement déployée dans le pays de façon efficace. Une stratégie là encore qui a permis à la France de préserver sa population, moins violemment affectée par les variants. Et donc de maintenir un niveau d'activité élevé. Et, même si l'hexagone compte ses mouvements antivax, "ils n'ont pas autant de poids politique que leurs homologues américains", note-t-il.

Travailler moins, un choix de société, plus qu'un problème

Quant aux grincheux, qui souligneraient les dépenses françaises qui dérapent, la dette qui se creuse, et les rigidités de notre système productif, l'économiste leur répond : oui, le PIB par tête français est inférieur de 25% par rapport à celui des Etats-Unis, mais c'est parce que les Français travaillent moins. Ils partent à la retraite plus tôt et s'accordent aussi beaucoup plus de jours de vacances.

Ce sujet du temps de travail des Français promet d'être au coeur des programmes de certains candidats à l'élection présidentielle. Et si Emmanuel Macron postule à sa réélection, nul doute qu'il proposera de décaler l'âge de départ à la retraite. Le chef de l'État, qui regrette de ne pas avoir fait la réforme des retraites durant ce quinquennat, a souvent jugé que ses compatriotes ne travaillent pas assez.

Reste que, pour Paul Krugman, il ne faut pas y voir un problème mais un CHOIX de société. L'économiste dit ne pas vouloir idéaliser la France, mais la regarder comme un modèle. Sous-entendu, pour lui, qui aux États-Unis est classé à gauche, c'est un modèle dont devraient s'inspirer les démocrates américains.

En attendant, il évite dans sa tribune de pointer ce qui sera le plus délicat : sortir du « quoi qu'il en coûte », retrouver une forme de normalité, et se pencher sur la réduction des déficits et le remboursement de la dette qui atteint les 115% du PIB.

Il n'empêche, dans cette période de morosité, ce satisfecit venu d'outre-Atlantique fait du bien. Il nous invite, sans naïveté béate, à considérer peut-être un peu plus nos atouts et nos forces plutôt que de ressasser nos faiblesses. De quoi illustrer aussi le fameux proverbe "quand je me regarde, je me désole, quand je me compare, je me console ! ".

Fanny Guinochet
Commentaires 25
à écrit le 28/01/2022 à 15:39
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Et la dette qui explose ainsi que les déficits publics et commerciaux il en parle l'économiste en carton de Black rock McKinsey ? Il faut sauver le soldat Macron ?

à écrit le 27/01/2022 à 22:36
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J’abonde dans le sens d'EFFIX, j’ajoute que dans tous les pays de la zone Euros et en dehors on a des courbes ascendantes de la dépense publique qui ont été identiques depuis 2019, je vous donne les références « insee statistiques 2381414 » et l'étud...

à écrit le 20/01/2022 à 21:05
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Apparemment, il a bel et bien gagné le "fake news award" décerné par Trump, ce qui laisse entendre sa sympathie pour les Biden/Macron et autres démocrates de gauche... son appréciation est de facto de peu d'importance (surtout si on considère qu'il t...

à écrit le 20/01/2022 à 12:32
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On peut être admiratif, en effet; nous sommes un pays incapable d'équilibrer ses comptes depuis cinquante ans, grâce en soit rendue à nos élus qui ne sont pas si intègres qu'ils le prétendent. Nous trainons un taux de chômage qui montre que nous somm...

à écrit le 20/01/2022 à 10:19
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Avec l'obligation de paralyser l'économie du pays en effet mais étions nous vraiment obligés de paralyser l'économie ? Je suis loin d'en être sûr et je sent bien que tout sera fait pour que cette question soit oubliée, ce qui est idiot car elle revie...

à écrit le 20/01/2022 à 9:33
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Approche purement économico-financière mais est-elle durable??, J'aurais préféré que l'on adopte la vision de notre prix Nobel Maurice Allais..

à écrit le 20/01/2022 à 9:07
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Mais mais les économistes experts commentateurs ici disent que notre PR il est nul....

à écrit le 20/01/2022 à 8:44
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il n y a que moi que ca choque quand je lis qu on a laisse les ecoles ouvertes pour permettre aux meres d aller travailler ? le but de l ecole c est pas d etre une garderie gratuite (si c est ca on peut faire pour bien moins cher: leur ditribuer des ...

à écrit le 20/01/2022 à 8:01
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Bravo au Président, qui devant se mur a su arbitrer entre laisser mourir les métiers directement touchés ( tourisme, hôtellerie, restaurants, etc) et d'autres qui ne risquaient rien. (salariés, fonctionnaires, retraités, etc ..) Le quoi qu'il en cou...

le 20/01/2022 à 8:35
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" les métiers directement touchés ( tourisme, hôtellerie, restaurants, etc) " Faut savoir ,je croyais que le pass machin allait les sauver et ferait revenir les gens chez eux et on apprend qu'ils vont être encore aider. Des explications ?

le 20/01/2022 à 12:27
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C est sur que vous vous avez les compétences et la crédibilité de cet économiste …ne serait ce pas prétentieux ?

à écrit le 19/01/2022 à 20:47
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Il n'a pas soulevé le tapis ..

à écrit le 19/01/2022 à 20:13
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wow!!! un mec qui dans son bouquin sur les crises souveraines t'explique qu'il faut etre keynesien et embaucher des gens pour creuser des trous et d'autres les reboucher, c'est un gars dont la prestance intellectuelle laisse de marbre chaque paysan q...

à écrit le 19/01/2022 à 19:19
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Une constante, lorsqu'il y a un problème économique grave, on en revient toujours aux solutions Keynésiennes.

à écrit le 19/01/2022 à 18:44
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En parlant de la France, a-t on des nouvelles des décrets de déchéance de la nationalité et d'interdiction des bureaux de vote pour les non vaccinés ? Idem sur l'ouverture des camps de rééducation et des équipements de neutralisation associés ?

à écrit le 19/01/2022 à 17:53
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"Le fameux « quoi qu'il en coûte », une stratégie gagnante" quand les premiers de cette classe, se félicitent.

le 20/01/2022 à 10:37
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vu ce que les 1ers de la classe se sont mis dans les poches grâce au quoi qu'il en coute, on comprend qu'ils se félicitent. Ce monsieur a t'il bien regarder l'évolution de la Dette ?

à écrit le 19/01/2022 à 16:28
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Il a raison sur le fait que travailler moins pour gagner moins peux être un choix de société mais en France ce n'est pas le cas. Ici l'on veut certes travailler moins et moins longtemps mais en exigeant de gagner plus en salaire et en retraite. On cr...

à écrit le 19/01/2022 à 16:26
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Le Prix Nobel n’a pas dû voir à quel prix ces résultats avaient été obtenus : un accroissement exponentiel de la dette !

à écrit le 19/01/2022 à 16:07
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la France est le pays vedette en général, pas que de la période pandémique : niveau d’investissement public/privé élevé, stock de capital public par habitant particulièrement important, explosion de l’entrepreneuriat, explosion des projets industri...

le 20/01/2022 à 7:00
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"rémunérations après inflation qui grimpent plus que dans les autres pays OCDE," it's a joke?

à écrit le 19/01/2022 à 15:33
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Ce n'est pas ce prix Nobel qui va payer la facture qui sera colossale, mais les français. Taxes , impôts, non indexation des salaires et des retraites, facture énergétique etc.... Note dette abyssale va nous condamner à réduire notre niveau de vie....

à écrit le 19/01/2022 à 15:30
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Ça sent le cirage de pompe avant la présidentielle.Paul Krugman étant un fidèle de Biden."il y a eu 500.000 chômeurs de moins inscrits à Pôle Emploi ",euh oui mais liquidés pour beaucoup par les réformes successives de ce gouvernement depuis 2017,com...

à écrit le 19/01/2022 à 14:46
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Si les économistes servaient à quelque chose, ça se saurait... Des voyants diplomés de grandes écoles, qui théorisent du vent, et prédisent le soleil quand il pleut et la pluie quand il fait beau. Alors leurs avis sur la gestion de la crise Française...

à écrit le 19/01/2022 à 14:38
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ça va en agacer certain, c'est sûr. Mais il n'y a que la vérité qui blesse.

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