Croissance : l'Insee confirme le coup de frein

Par Grégoire Normand  |   |  927  mots
Le ralentissement de la croissance n'est pas favorable à l'emploi. En moyenne au deuxième trimestre, le nombre de personnes inscrites en catégorie A a légèrement augmenté (+4.600) par rapport au premier trimestre. (Crédits : Philippe Wojazer)
La croissance de l'économie française au second semestre a bien été de 0,2%, soit le même rythme qu'au premier trimestre. Pour le gouvernement, ce ralentissement devrait accroître les difficultés pour remplir des promesses budgétaires difficilement tenables.

Les difficultés s'accumulent pour le gouvernement. Après la démission surprise du ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot, l'Insee a confirmé ce 29 août que la croissance avait progressé au même rythme qu'au premier trimestre à savoir 0,2%. Après une croissance très favorable à 2,3% en 2017, les derniers chiffres de l'institut de statistiques public souligne une véritable rupture dans le rythme de croissance du PIB après une série de cinq trimestres avec une croissance comprise entre 0,6% et 0,8% par trimestre.

Ce net ralentissement ne devrait pas faciliter la tâche du gouvernement. Dans un entretien accordé au Journal du Dimanche le week-end dernier, le Premier ministre Édouard Philippe a révisé la prévision de croissance du gouvernement pour cette année à 1,7% contre 2% auparavant. L'équation budgétaire pour 2019 devrait être plus compliquée pour l'exécutif qui devrait faire face à des rentrées fiscales moins importantes pour l'année 2019.

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Le commerce extérieur pèse sur la croissance

La production totale de biens et services a légèrement accéléré au cours du second trimestre (+0,2% après 0,1%). Elle baisse de nouveau dans les biens (-0,3% après -0,6%) alors qu'elle continue de croître dans les services (+0,4% après +0,3%). L'examen des différents agrégats indique le commerce extérieur à contribué de manière négative à la croissance du PIB.

Si les importations ont rebondi ce trimestre (+1% après -0,4%) ainsi que les exportations (+0,2% après -0,4%), le solde extérieur pèse à hauteur de -0,3 point après une contribution nulle au premier trimestre.

La consommation des ménages en berne

Outre le commerce extérieur, les dépenses de consommation des ménages fléchissent légèrement (-0,1% après +0,2%). Au cours du mois de juillet, les dépenses de consommation des ménages en biens ralentissent : +0,1% en volume après +0,3% en juin et 1,1% en mai. Cette faible progression s'explique notamment par un repli de la consommation d'énergie, qui a effacé une légère hausse de la consommation alimentaire, précise l'institut de statistiques national. Sur le mois de juillet, la consommation d'énergie a ainsi reculé de 0,2%, avec une forte baisse des achats de carburants (−1,3%), "principalement en raison de la baisse de la consommation de gazole", précise l'Insee. La météo favorable du printemps a réduit la consommation d'énergie et les grèves dans les transports ont diminué les dépenses dans les transports.

Mais malgré les soldes et la Coupe du monde, il semble que les Français ont moins consommé ces derniers mois alors que la consommation représente un moteur traditionnel de la croissance française. Ces mauvais résultats marquent une rupture. Depuis le troisième trimestre 2016, c'est la première fois que la consommation recule. La baisse du pouvoir d'achat des Français a donc été particulièrement visible au cours du des derniers mois.

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En revanche, les dépenses de consommation des administrations publiques se sont améliorées au cours du second trimestre (0,3% contre 0,1% au premier trimestre). Pour la fin de l'année, le gouvernement compte sur la suppression progressive de la taxe d'habitation et la suppression des cotisations salariales maladie et chômage pour favoriser le pouvoir d'achat des actifs.

L'investissement des entreprises en forme

L'une des rares bonnes nouvelles parmi les composantes de la croissance est l'investissement des entreprises qui a accéléré (+1,3% après +0,1% au premier trimestre), quand celui des ménages s'est tassé (−0,1% après +0,3%). Le redressement du taux de marge des entreprises a pu contribuer à favoriser l'investissement. Au total, l'acquis de croissance - c'est-à-dire le niveau que le PIB atteindrait si l'activité ne progressait pas d'ici la fin de l'année - atteignait fin juin 1,3%. L'organisme public prévoit 1,7% de croissance pour l'ensemble de l'année.

Un ralentissement défavorable au budget

Pour faire face à ce coup de mou de l'activité, le gouvernement a revu ses ambitions budgétaires à la baisse. Cette croissance moins favorable que prévu devrait affecter les recettes des finances publiques et pourrait ainsi peser sur le déficit public. Au printemps dernier, la Commission européenne avait recommandé la fin de la procédure de déficit excessif engagée contre la France il y a neuf ans. La France avait réussi à ramener son déficit public sous la barre des 3% du PIB l'an passé, à 2,6%.

Mais lundi dernier, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a indiqué devant l'Association des journalistes économiques et financiers (AJEF) que le gouvernement ne pourra pas tenir ses objectifs en matière de réduction du déficit. L'exécutif avait, en effet, annoncé un déficit à 2,3% du PIB cette année, en baisse de 0,3 point par rapport à 2017, mais le locataire de Bercy a reconnu que le coup de frein aurait un impact sur l'évolution du déficit.

"Nous étions [sur un déficit public] à 2,3% du PIB. La moindre croissance va nous amener autour de 2,5 point de déficit. Il faut y ajouter la reprise de la dette de la SNCF Réseau, qui représente 0,1 point", a calculé le ministre, évoquant le chiffre de 3,5 milliards d'euros. "Cela nous met à 2,6%."

Pour autant, le gouvernement maintient "sa trajectoire" des 3% de déficit public (du PIB) - la limite fixée par les règles européennes.

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