Croissance : la Banque de France baisse encore ses prévisions

Par Grégoire Normand  |   |  782  mots
"La consommation des ménages a été faible au premier semestre 2018, dans un contexte de hausse temporaire de l’inflation totale. Elle rebondirait néanmoins à partir du second semestre avec l’accélération des gains de pouvoir d’achat" explique la Banque de France. (Crédits : Charles Platiau)
La croissance de l'économie française devrait ralentir à 1,6% en 2018 et les deux années à venir selon des prévisions publiées par la Banque de France. La banque centrale explique cette révision à la baisse pour 2018 par "un contexte international tendu" et une consommation en repli au cours du premier semestre.

Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour le gouvernement. La Banque de France a revu une nouvelle fois à la baisse ses prévisions de croissance pour 2018, à 1,6% pour 2018 comme 2019. L'institution bancaire abaisse ses projections de 0,2 point et 0,1 point respectivement par rapport à ses précédentes estimations. Elle avait révisé une première fois ses projections à la baisse au mois de juin, voyant la faiblesse de la croissance (0,2%) enregistrée au premier trimestre comme un "contrecoup temporaire" après son effervescence de fin 2017 (+0,7%). Pour l'exécutif qui tablait en début d'année sur une croissance autour de 2% pour 2018, les perspectives se compliquent à quelques jours de la présentation du budget. Les objectifs en matière de réduction du déficit public deviennent très difficiles à remplir.

Baisse de la consommation

La banque centrale explique ce coup de frein par plusieurs facteurs. Sur le plan international, l'organisation souligne une demande extérieure qui marquerait le pas. La demande adressée à la France serait à un rythme un peu inférieur à 4%, plus faible que celui recensé  en 2017 (5%). Les incertitudes se multiplient sur la scène internationale avec la montée des tensions sur le commerce mondial. Dans une note du conseil d'analyse économique (CAE) publiée au début de l'été, plusieurs économistes avaient expliqué que le scénario "d'une guerre commerciale totale" pourrait faire baisser le PIB de 3% représentant une perte annuelle moyenne de 1.125 euros par Français. En France, le montant mensuel du Smic s'élève actuellement à 1.170 euros net. En revanche la Banque de France anticipe tout de même une contribution positive du commerce extérieur à la croissance française en 2018 alors que cet agrégat contribue régulièrement de manière négative au PIB.

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Les experts expliquent également ce coup de mou de la croissance par un ralentissement de la consommation des Français au cours du premier semestre. La hausse du prix de l'énergie (pétrole), de la fiscalité sur le tabac et la hausse de la CSG pour les retraités ont plombé le pouvoir d'achat des Français. Pour la fin de l'année, le gouvernement espère que la suppression de la taxe d'habitation pour une grande majorité de Français et la fin des cotisations sociales des salariés pour l'assurance chômage vont doper la croissance.

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Baisse des créations d'emploi

Dans le contexte d'un ralentissement de la croissance du PIB, les créations d'emploi devraient également être moins importantes pour 2018 et les années à venir. Après une année exceptionnelle en 2017 (330.000 emplois), le rythme des créations devrait tomber à 245.000 en 2018, 140.000 en 2019 pour repartir à 160.000 en 2020. Lors des rencontres de Grenelle organisées au ministère du Travail mardi dernier, la ministre du Travail Muriel Pénicaud a rappelé que l'emploi salarié avait stagné au cours du deuxième trimestre après une hausse de 0,2% sur les trois premiers mois de l'année.

Pour tenter de rassurer l'auditoire, Mme Pénicaud a expliqué que "oui, il a des signaux de ralentissement, mais la situation du marché du travail reste bien orientée. Comparé à cinq ou dix ans, on est quand même dans une dynamique de création d'emplois". Avec la baisse importante des emplois aidés, le nombre d'emplois publics s'est réduit depuis le début de l'année avec 11.800 postes en moins au cours du second trimestre.

D'après le service de statistiques du ministère (Dares), il s'agit du plus fort recul enregistré dans ce secteur depuis fin 2011. En revanche, les emplois du secteur marchand continuent de progresser à un rythme plus modéré qu'au premier trimestre. (0,2% soit 26.400 postes contre 0,3% au trimestre précédent). En dépit de ce ralentissement dans les créations de postes, la banque centrale anticipe une baisse du chômage passant de 9,1% au second trimestre 2018 à 8,3% à la fin de l'année 2020. Ce qui serait "son plus bas niveau depuis la fin de l'année 2008."

Une inflation en repli jusqu'à l'automne 2019

 Après avoir connu une hausse à 2,6% en au cours de juillet et août qui repose principalement sur la forte augmentation des prix de l'énergie et de la fiscalité du tabac, les prévisionnistes anticipent une baisse des prix jusqu'au troisième trimestre 2019 autour de 1,6%. Si l'on exclut les prix de l'énergie et de l'alimentation soumise à une volatilité plus importante (inflation sous-jacente), la Banque de France projette une tendance haussière de l'inflation "en lien avec la baisse du taux de chômage et l'accélération des salaires, se dessinerait."