Décentralisation : le Sénat va écrire sa propre loi avant le gouvernement

Par César Armand  |   |  612  mots
(Crédits : Maxim Shemetov)
Sans attendre la présentation du projet de loi 3D - décentralisation, déconcentration, différenciation - en cours d'élaboration par le gouvernement, le Sénat et les trois principales associations d'élus vont rédiger leur propre texte.

Le Sénat va constituer un groupe de travail rassemblant les présidents de groupe politique, le président de la commission des lois et le président de la délégation aux collectivités territoriales pour élaborer des propositions en vue du projet de loi 3D - décentralisation, déconcentration, différenciation - en cours d'élaboration par le gouvernement.

C'est le président (LR) de la Chambre haute, Gérard Larcher, qui l'a annoncé ce 13 janvier 2020 lors des vœux de Territoires unis, qui rassemble l'association des maires de France (AMF), l'assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France.

"Nous devons travailler sur une nouvelle génération de décentralisation  avec les représentants des territoires au premier chef, a-t-il expliqué. Il est temps de redonner aux collectivités la maîtrise de l'exercice de leurs compétences, de desserrer leurs contraintes et de refonder leur autonomie financière."

2019, "annus horribilis" pour les départements

Après une année 2019 "horribilis", du fait de la suppression de la taxe foncière au profit des communes, le président (ex-LR) de l'ADF, Dominique Bussereau, s'est félicité de cette annonce et espère que ce texte qui sortira du Palais du Luxembourg sera "une charte" reprise par le gouvernement. 

Le président du Sénat a d'ailleurs fait allusion à la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, principale ressource communale, compensée par la taxe foncière des départements, elle-même contrebalancée par une fraction de TVA.  "La libre administration devient un "mot" quand l'Etat impose une contractualisation financière, et l'autonomie fiscale devient théorique quand l'Etat substitue à l'impôt territorial une part des ressources nationales", a dénoncé Gérard Larcher.

Des "méthodes ultra-centralisatrices" pour les maires

C'est pourquoi au lendemain des élections municipales, le président (LR) de l'AMF a déclaré souhaiter de "sérieux débats avec l'Etat sur ses méthodes ultra-centralisatrices" au cours desquels il compte évoquer la politique du logement, "absolument prioritaire". "Une vraie crise aura lieu dans les années à venir", a martelé François Baroin.

Outre la décentralisation, réclamée à cor et à cris par les élus, le projet de loi 3D du gouvernement comportera un volet sur la différenciation. "Ce principe n'est gage d'efficacité que s'il va de pair avec une simplification de l'architecture institutionnelle locale", a déclaré le président du Sénat. "Ça n'est pas supprimer un niveau de collectivité, mais favoriser la libre organisation des collectivités".

"Des politiques publiques parfois gérées à la découpe"

Cet après-midi du 13 janvier, la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec des collectivités, Jacqueline Gourault, était, elle, à Agen, pour vendre ce texte gouvernemental, une semaine après s'être rendue à Arras dans le même but chez Frédéric Leturque, co-signataire en juin 2019 d'une tribune dans Le JDD soutenant l'exécutif.

A La Tribune, le maire (Centristes, parti d'Hervé Morin) de la préfecture du Nord confie espérer que ce texte gouvernemental lui permettra "d'avoir les manettes sur des politiques publiques parfois gérées à la découpe". "L'habitat est une pieuvre où l'Etat continue d'intervenir", précise-t-il. "Le contrat de confiance n'est pas vraiment pensé et toujours incomplet."

L'élu local espère aussi que l'Agence nationale des territoires, née au 1er janvier 2020 de la fusion de divers établissements publics d'Etat, aidera à "faire remonter les réalités locales à Paris" et apportera aux collectivités "de l'ingénierie""de l'expertise" et "des retours d'expérience" plutôt que "réinventer l'eau chaude".