Dialogue social : le patronat grogne après l'adoption de la loi par l'Assemblée

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  662  mots
Le ministre du Travail François rebsamen a parvenu à faire voter en première lecture son projet de loi sur le dialogue social
Le projet de loi modernisant la représentation des salariés dans les entreprises a été adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Les organisations patronales sont défavorables aux évolutions apportées au texte par divers amendements.

Avec son adoption en première lecture par l'Assemblée nationale, mardi 2 juin, une étape est franchie pour le projet de loi sur la modernisation du dialogue social. Le texte va maintenant partir au Sénat où il sera examiné à compter du 22 juin. Son adoption définitive par le Parlement devrait intervenir avant la fin juillet.

A l'Assemblée, le texte n'a pas provoqué de psychodrame à gauche, comme cela avait été le cas avec le projet de loi « Macron » sur l'économie. Il a en effet rassemblé 301 voix pour (socialistes, radicaux de gauche et près de la moitié des écologistes) contre 238 (Les Républicains, UDI et Front de gauche) et 13 abstentions, dont l'autre moitié des écologistes et l'ancienne ministre PS Delphine Batho.


Grogne des organisations patronales

Si, globalement, le projet de loi est plutôt bien perçu par la CFDT, il est critiqué par les autres syndicats, notamment la CGT, qui craignent que les représentants du personnel perdent une partie de leurs moyens actuels (notamment les heures de délégation). Quant aux organisations patronales, elles ne sont pas contentes du tout. Elles critiquent notamment le fait que soient créées des commissions paritaires (regroupant des représentants des employeurs et des représentants des salariés) régionales pour assurer la représentation des 4,6 millions de salariés travaillant dans les TPE de moins de 11 salariés. Au départ, ces commissions devaient avoir un simple rôle de « conseil » et ne devaient pas pouvoir entrer dans les entreprises. Mais un amendement qui a fait hurler la CGPME, le Medef et l'UPA a été adopté, qui permet à ses commissions de « visiter » une entreprise où il y a un problème pour assurer une « médiation », à la condition que l'employeur ait donné son accord.La CGPME voit là une première étape vers la possibilité pour les syndicats de s'implanter dans les PME. Ce que conteste fermement le gouvernement.

Un autre amendement a également provoqué l'ire du Medef : des administrateurs salariés seraient obligatoires dans les entreprises de plus de 1.000 salariés, contre 5.000 actuellement. "On va juste recréer un seuil et non pas en supprimer un", selon le président du Medef, Pierre Gattaz.

La "délégation unique du personnel" rendue davantage possible

Par ailleurs, le projet de loi étend le principe de la délégation unique du personnel (DUP) aux entreprises de 300 salariés (contre 200 jusqu'ici), pour "lisser" les seuils sociaux, autre objectif initial de la loi. Cette « DUP » permettra de regrouper dans une instance unique les délégués du personnel, le comité d'entreprise et le CHSCT (comité hygiène sécurité et conditions de travail). En fait, ce n'est pas vraiment une instance unique puisque chacune des trois institutions garde ses compétences. Mais il n'y aura plus qu'une seule élection et les représentants élus "changeront" de casquette en fonction des dossiers à traiter.

A noter que dans les entreprises de plus de trois cent salariés, un accord majoritaire (signé par un ou des syndicat(s) représentant plus de 50% des salariés permettra d'organiser librement la représentation du personnel. Il pourra donc y avoir une fusion totale ou partielle des instances ou un maintien en l'état.
Le projet de loi comprend nombre d'autres chapitres : sécurisation du régime des intermittents du spectacle ; ébauche de création du compte personnel d'activité ; fusion de la prime pour l'emploi et du RSA-activité en une prime d'activité.

D'autres dispositions ont également été introduites par amendements. Il en va ainsi de de la suppression de « l'expérience » du CV anonyme et de la simplification de la mise en place du compte-pénibilité (suppression des fiches individuelles d'évaluation) et du début de reconnaissance comme maladie professionnelle du « burn out ».
En deuxième lecture, le texte va encore s'enrichir, puisqu'il devrait comprendre une partie des mesures qui seront annoncées le 9 juin par le Premier ministre pour favoriser l'emploi dans les PME.