"Gilets jaunes" : le commerce traverse une mauvaise passe

Par Grégoire Normand  |   |  758  mots
Les commerces ont été fortement impactés par le mouvement des "Gilets jaunes". (Crédits : Reuters/Piroschka Van De Wouw)
A l'issue d'une réunion avec les représentants des commerçants et des artisans ce mercredi soir, la secrétaire d'Etat Agnès Pannier-Runacher a signalé que 3.200 dossiers avaient été déposés par les entreprises pour faire une demande de report de cotisations sociales et fiscales. Elle a précisé que le gouvernement fera un nouveau point dans 15 jours avant d'entamer un déplacement à Toulouse ce jeudi pour faire le point avec les commerces de la ville.

Les élus des grandes villes et métropoles et les fédérations professionnelles et associations de commerçants ont été reçus au ministère de l'Economie ce mercredi 13 février. Objectif : faire un état des lieux de l'impact économique du mouvement des "Gilets jaunes" et l'effet des mesures proposées en réponse par le gouvernement. Plus de deux mois après le début des mobilisations sur l'ensemble du territoire, les collectivités locales et les organisations professionnelles avaient réclamé cette réunion d'urgence à l'exécutif.

Face aux multiples attentes exprimées, la secrétaire d'Etat Agnès Pannier-Runacher a invité "les commerçants à saisir leur chambre de commerce et d'industrie, les collectifs de commerçants ou directement les services de l'Etat pour les aider à passer ces caps de trésorerie. Il y a une vraie inquiétude collective de voir les Français ne plus venir chez les commerçants. Il faut redire aux Français que s'ils ont un service à rendre aux commerçants, c'est de se rendre dans les commerces pour manifester leur soutien". En déplacement à Toulouse ce jeudi 14 février, la membre du gouvernement doit rencontrer les artisans et les commerçants pour faire un point sur les difficultés rencontrées.

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Une catastrophe selon le patronat

Le secteur du petit commerce serait dans la tourmente. Selon la confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), "la situation devient de plus en plus catastrophique pour des milliers de commerçants à travers tout le territoire. Pour éviter les dégradations et pillages, nombre d'entre eux préfèrent baisser le rideau se privant ainsi de ce chiffre d'affaires dont ils ont tant besoin." Sur l'ensemble des 5.000 établissements concernés par le chômage partiel, 93% seraient des PME d'après l'organisation.

Au niveau macroéconomique, les répercussions d'un tel mouvement sur la croissance sont bien plus difficiles à évaluer. En décembre, l'Insee avait expliqué que cette mobilisation pourrait ôter 0,1 point à la croissance du PIB au quatrième trimestre 2018, sans doute à travers les secteurs d'activité principalement touchés. C'est une estimation qui "est néanmoins soumise à beaucoup d'aléas, ne serait-ce que sur la durée du mouvement."

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Le réseau des CCI mobilisé

Depuis le début du mouvement des "gilets jaunes", le réseau des chambres de commerce et d'industrie (CCI) s'est mobilisé. Des cellules de veille ont ainsi été mises en place. Les chambres "ont été les premières à tirer la sonnette d'alarme en demandant la création d'un fonds d'indemnisation pour les commerçants touchés partout en France", explique son président Pierre Goguet. Le réseau consulaire évoque "la complexité du montage des dossiers et leurs délais de traitement" parmi les difficultés rencontrées par les commerçants. "Si on veut éviter une crise économique grave, il faut aller plus loin, martèle le président Goguet et envisager rapidement une exonération 'ciblée' de charges sociales pour les entreprises impactées."

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Des reports de cotisations

D'après des chiffres communiqués par le gouvernement, près de 5.000 entreprises ont fait des demandes de chômage partiel pour environ 72.000 salariés. Ce qui représente environ 38 millions d'euros d'indemnités à verser. L'administration a également reçu 3.200 dossiers relatifs à des demandes de reports de cotisations. Sur ce total,  2.800 reports de charges avec échéances et 450 reports de charges sans échéances ont été recensés par Bercy.

En effet, depuis le mois de janvier, le gouvernement a mis en place un dispositif "qui permet d'étaler les charges sociales et fiscales des commerçants afin de leur donner des facilités de trésorerie en allant jusqu'à l'abandon de créances sociales et fiscales sur 20 ans" a précisé la secrétaire d'Etat lors du point presse. Agnès Pannier Runacher a également ajouté que "les assurances ont traité plusieurs milliers de dossiers avec un montant proche de 100 millions d'euros sur la question des remboursements liés aux dégâts occasionnés chez les commerçants et les artisans".

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