Grand débat : les chefs d'entreprise sont dubitatifs

Par Grégoire Normand  |   |  856  mots
"Exprimant peu d’attentes vis-à-vis du Grand débat national, les chefs d’entreprise ne sont pas convaincus par sa capacité à offrir une issue à la crise des "Gilets jaunes", souligne le sondage.
Interrogés au mois de janvier par OpinionWay pour CCI France/La Tribune/LCI dans le cadre de "La grande consultation", 77% des patrons déclarent ne pas vouloir participer au Grand débat lancé par le gouvernement.

C'est une mauvaise nouvelle pour le gouvernement. D'après la dernière grande consultation réalisée par OpinionWay pour CCI France, La Tribune et LCI, 77% des patrons interrogés n'ont pas l'intention de participer au Grand débat national. À l'inverse, seulement 23% ont la volonté de prendre part à cet événement. À titre de comparaison, les Français sont relativement partagés sur la question de la participation. 52% ont déclaré vouloir y participer et 47% ne veulent pas intervenir pendant ces réunions ou apporter leur contribution en ligne.

Ces résultats soulignent un désintérêt des milieux dirigeants pour cette initiative lancée par l'exécutif il y a quelques semaines. Pourtant, plusieurs organisations patronales comme le Medef ou la CPME ont lancé des appels à se mobiliser à plusieurs reprises au cours du mois de janvier. Le réseau des chambres de commerce et d'industrie (CCI) a également fait des efforts en ce sens. Face à cette démobilisation, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a exhorté les chefs d'entreprise à s'engager dans cette concertation nationale.

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Peu d'espoir dans le Grand débat national

Les chefs d'entreprise apparaissent peu optimistes sur la finalité du Grand débat. 53% des personnes consultées déclarent ne rien en attendre, un résultat similaire à celui exprimé par la population française (54%). Parmi les patrons qui déclarent des attentes, 30% espèrent avant tout des réponses concrètes, 10% estiment que c'est un moyen de faire passer un message aux pouvoirs publics et enfin, seulement 5% indiquent que c'est l'occasion d'échanger et de rencontrer des citoyens. Il existe cependant quelques disparités, comme le soulignent les auteurs de l'enquête d'opinion :

« Les chefs d'entreprise de moins de 10 salariés sont les plus nombreux à ne rien attendre du Grand débat national (54% contre 39% pour les TPE). Les dirigeants d'entreprises de taille plus importante attendent avant tout des propositions concrètes (41% contre 29% des chefs d'entreprise de moins de 10 salariés)."

Du côté des Français qui espèrent des attentes du Grand débat, 39% considèrent ce moment comme un moyen de faire passer une idée aux pouvoirs publics. Interrogés sur les débouchés possibles du Grand débat, les dirigeants paraissent également défaitistes. Ils sont 69% à signaler que cet échange ne permettra pas une sortie de crise des "Gilets jaunes" et ils sont 69% à juger qu'il ne permettra pas de faire émerger des solutions efficaces pour l'avenir du pays.

Les chefs d'entreprise approuvent le prélèvement à la source

Un mois après le lancement du prélèvement à la source, les chefs d'entreprise semblent satisfaits du dispositif. 78% des interrogés estiment que c'est une chose favorable. Il existe tout de même quelques disparités en fonction du secteur et de la taille de l'entreprise. Ils sont par exemple 85% à apprécier ce nouveau mode de collecte dans l'industrie contre 74% dans la construction. Enfin, ils sont 86% à approuver la retenue à la source dans les entreprises de 10 salariés contre 78% dans les entreprises de 0 à 9 salariés.

Ce contraste peut s'expliquer en partie par des moyens juridiques et financiers renforcés dans les entreprises plus importantes. Malgré un bilan "sans bug" revendiqué par le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, 68% des patrons expriment des craintes sur les possibles dysfonctionnements dans l'application des taux de prélèvement. 22% ont exprimé des difficultés sur la mise en oeuvre de ce mode de collecte.

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Les dirigeants peu optimistes sur l'avenir

La prolongation du mouvement des "Gilets jaunes" et le contexte politique actuel suscitent de la morosité chez les chefs d'entreprise. Après avoir connu son niveau le plus bas en décembre dernier depuis 2015, l'indicateur qui mesure l'optimisme des dirigeants s'est légèrement redressé en janvier passant de 84 à 90. Il demeure à des niveaux bien moins élevés que l'année précédente. Dans le détail, « les dirigeants d'entreprises de moins de 10 salariés, malgré une hausse de 6 points, affichent toujours un indicateur moins élevé (89 points) que celui des entreprises de taille plus importante (score de 99 points, + 6 points également) ».

Cette lente remontée se retrouve dans la confiance exprimée par les chefs d'entreprise à l'égard de leurs sociétés pour les 12 prochains mois (76%,7 points). En revanche, ils sont peu confiants pour les projections au niveau de l'économie mondiale (29%) et de l'économie française. Récemment, la plupart des instituts de conjoncture ont révisé à la baisse leurs prévisions de croissance planétaire.

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Méthode : Étude réalisée auprès d'un échantillon de 609 dirigeants d'entreprise interrogé par téléphone. Les interviews ont été réalisées du jeudi 17 au jeudi 24 janvier 2019. La représentativité de l'échantillon a été assurée par un redressement selon le secteur d'activité et la taille, après stratification par région d'implantation.

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