L'économie française devrait marquer le pas au dernier trimestre

Par Grégoire Normand  |   |  922  mots
Dans l'industrie, les chefs d'entreprise anticipent une baisse de l'activité au mois de novembre. (Crédits : Vincent Kessler)
La croissance économique française devrait atteindre 0,2% au quatrième trimestre, soit un niveau légèrement inférieur au rythme de 0,3% par trimestre observé depuis le début de l'année, selon une première estimation dévoilée mardi par la Banque de France

L'économie française devrait s'essouffler en fin d'année. Selon le dernier bulletin de la Banque de France publié ce mardi 12 novembre, la croissance du produit intérieur brut (PIB) progresserait de 0,2% au quatrième trimestre selon une première estimation. C'est un niveau légèrement inférieur à celui enregistré au trimestre précédent (0,3%).

Vers un ralentissement dans l'industrie

L'enquête mensuelle de la Banque centrale montre que l'indice du climat des affaires dans le secteur industriel s'est établie à 98 au mois d'octobre contre 96 en septembre. Après cette légère embellie, la croissance de la production industrielle pourrait se tasser en novembre. Les chefs d'entreprise anticipent un coup de frein de l'activité dans l'automobile actuellement en proie à des difficultés.

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Dans les bâtiment, les entreprises sont guère optimistes. Si l'activité est restée soutenue au mois d'octobre, dans le gros oeuvre et le second oeuvre notamment, l'activité serait moins forte en fin d'année selon les dirigeants interrogés par l'institution bancaire.

Dans les services, l'activité a progressé "modérément" au mois d'octobre. Les chefs d'entreprise interrogés anticipent une poursuite de la croissance au même rythme entre octobre et novembre. Cette stabilisation devrait permettre de limiter les dégâts alors que les deux premiers secteurs sont en perte de vitesse.

1,3% de croissance sur l'année

En dépit de cette légère révision à la baisse, la croissance de la richesse produite en France devrait s'établir à 1,3% cette année. Dans ses dernières perspectives macroéconomiques annuelles dévoilées fin septembre, l'établissement bancaire envisageait une stabilité de l'activité entre 2019 et 2020. Les investissements publics et privés ont particulièrement soutenu l'économie française en 2019. En période préélectorale, les collectivité ont tendance à multiplier les investissements, ce qui permet de soutenir la demande intérieure.

La consommation peut décevoir

En revanche, si les mesures d'urgence économiques et sociales décidées à la suite de la crise des "gilets jaunes" et du grand débat ont permis de doper le pouvoir d'achat des Français, les effets sur la consommation tardent à se faire sentir.

"Pour l'année 2019, l'Insee s'attend à une progression du pouvoir d'achat des ménages de 2,3% sur l'année 2019. Par unité de consommation, c'est une progression de 1,8%.  C'est la variation de pouvoir d'achat la plus élevée depuis 12 ans. Ce dynamisme de pouvoir d'achat ne se transmet pour l'instant que partiellement à la consommation. Ce dynamisme a sans doute tout de même contribué à soutenir la consommation des ménages", a indiqué récemment à La Tribune Julien Pouget, directeur du département de la conjoncture à l'institut de statistiques. "La consommation des ménages a progressé à un rythme relativement modéré, mais tout de même régulier au cours des trois premiers trimestre de 2019 : 0,4% au premier trimestre, 0,2% au second trimestre et 0,3% au troisième trimestre".

Malgré cette consommation modérée, les chiffres pourraient repartir à la hausse au cours des prochains mois. "En général, en cas de choc positif ou négatif sur le pouvoir d'achat, la consommation met quelques trimestres à s'ajuster" poursuit l'économiste.

L'appétit des Français pour l'épargne

En attendant, les Français ont privilégié l'épargne cette année avec un taux supérieur à 15%, frôlant un record. Si le mouvement des "gilets jaunes" s'est apaisé et que la confiance des ménages a clairement retrouvé des couleurs depuis le point bas de décembre 2018, un tel engouement pour l'épargne alors que les revenus sont en hausse reste difficile à expliquer pour les économistes interrogés. Le directeur adjoint du département "analyse et prévision" de l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) Mathieu Plane déclarait récemment à La Tribune.

"La grande question est de savoir si les ménages vont reprendre des comportements plus en phase avec leurs revenus. Le troisième trimestre 2019 montre que la consommation a été encore assez peu dynamique par rapport au pouvoir d'achat. La question est de savoir si le cycle de consommation va être plus en lien avec les niveaux de revenus".

Outre l'instabilité de la situation internationale, un ensemble de facteurs peuvent favoriser cet appétit pour l'épargne. L'économiste du laboratoire rattaché à Sciences-Po Paris avance plusieurs hypothèses. "Le mouvement des gilets jaunes a eu un impact sur la crédibilité de la parole politique. Beaucoup de Français ne croient pas aux baisses d'impôt même si elles ont été votées. Il y a une forme de défiance généralisée". La multiplication des réformes telles que la transformation en profondeur de l'assurance-chômage ou les débats sur la refonte du système de retraite peuvent avoir des répercussions sur certains comportements.

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"La politique fiscale du gouvernement est un mécanisme complexe avec beaucoup de transferts. Avant d'adopter des comportements, les retraités peuvent attendre de savoir si les retraités sont vraiment gagnants ou pas avec les mesures qui montent en charge comme la taxe d'habitation sur trois ans, la baisse d'impôt sur le revenu, le prélèvement à la source. Ces mesures peuvent créer un flou."

Beaucoup d'instituts de prévisions économiques anticipent une stabilisation de l'épargne et un renfort de la consommation pour soutenir la croissance l'année prochaine.