![La façade de la Banque de France.](https://static.latribune.fr/full_width/2372551/banque-de-france.jpg)
Les indicateurs économiques connaissent une petite embellie. Après une fin d'année 2023 tourmentée, la croissance du produit intérieur brut (PIB) serait en « légère hausse », selon la dernière enquête mensuelle de conjoncture dévoilée ce mardi. Au premier trimestre, elle a d'ailleurs augmenté plus vite que prévu (0,2% au lieu de 0,1% prévu par l'Insee). Pour rappel, l'exécutif prévoit désormais une croissance de 1% en 2024 contre 1,4% auparavant.
Cette enquête de la Banque de France risque d'être particulièrement scrutée dans les milieux économiques et financiers. À deux semaines de la décision cruciale de l'agence Standard and Poor's (S&P) prévue le 31 mai prochain, le gouvernement est sous pression. Certes, l'exécutif a échappé aux couperets des agences Fitch Ratings et Moody's fin avril mais la France n'est pas à l'abri d'une nouvelle sanction ou d'une note assortie d'une perspective négative.
Une nouvelle dégradation serait un très mauvais signal pour le camp macroniste actuellement loin derrière le Rassemblement national (RN) dans les enquêtes d'opinion. En effet, les chiffres meilleurs que prévus sur l'emploi ou la croissance n'ont pas complètement relégué au second plan la polémique sur les dérapages des finances publiques. Sous le feu des critiques, le gouvernement est toujours confronté à la menace d'une motion de censure à l'Assemblée nationale faute d'un budget rectificatif.
Une prévision entourée d'incertitudes
La banque centrale n'a toutefois pas donné d'estimation chiffrée pour le second trimestre compte tenu des incertitudes. D'autant que parmi les grandes incertitudes citées par l'institution, figure notamment la révision des comptes nationaux de l'Insee le 31 mai prochain. Cette modification pourrait avoir un impact sur le calcul de l'activité lors des précédents trimestres et in fine, amener la Banque de France à réviser légèrement ses chiffres sur l'évolution de la croissance.
En outre, « les résultats sont très contrastés entre avril et mai. En avril, les soldes d'opinion dans tous les secteurs sont nettement positifs et au-dessus de leur moyenne sur longue période », a détaillé Olivier Garnier, directeur général à la Banque de France, lors d'un point presse avec des journalistes. À l'inverse, « au mois de mai, les soldes d'opinion sont négatifs dans la construction et le bâtiment et l'activité pourrait stagner dans les services », a-t-il poursuivi.
Néanmoins, pour l'heure, en avril et mai, les services tirent la croissance économique vers le haut. Compte tenu du poids des services dans le produit intérieur brut (PIB) tricolore, ce dynamisme permet de compenser le ralentissement dans les autres secteurs, dont l'industrie et le bâtiment.
« En mai, il y a habituellement des jours fériés, mais il y a eu sans doute plus de fermetures et de congés avec l'enchaînement du 8 et 9 mai, a expliqué Olivier Garnier. Certains secteurs ont sans doute pu bénéficier des jours fériés comme l'hébergement, la restauration ou la location de véhicules ». Mais ce n'est pas forcément le cas dans la construction ou l'industrie. En effet, beaucoup de chantiers ou de lignes de production ont pu être mis sur pause.
Des carnets de commandes toujours dans le rouge
Côté demande, les indicateurs sont dans le rouge. Les soldes d'opinion dans l'industrie et le bâtiment restent à la baisse et bien en deçà de leur moyenne de long terme. Frappés par la crise énergétique et l'envolée des prix des matériaux et des matières premières, ces deux secteurs ont subi de plein fouet les effets dévastateurs de la guerre en Ukraine.
À cela s'est ajouté le durcissement de la politique monétaire de la BCE depuis l'été 2022 qui a considérablement pesé sur la consommation des ménages et l'investissement ces deux dernières années. La désinflation et la future baisse des taux prévue en juin par la BCE européenne devraient redonner du souffle à la demande encore morose.
L'inflation sous-jacente devrait frôler les 2% d'ici peu
De son côté, l'indice des prix à la consommation devrait encore ralentir en avril. L'Insee doit d'ailleurs donner sa seconde estimation de l'inflation pour le mois d'avril le 15 mai pour l'instant calculée à 2,2% après 2,3% en mars. « Le mois d'avril pourrait marquer le retour de l'inflation sous-jacente (selon la définition de l'Insee) vers le seuil des 2% », souligne l'économiste de BNP-Paribas Stéphane Colliac dans une note. Elle pourrait atteindre ce niveau pour « la première fois » depuis janvier 2022.
Dans l'industrie et l'agroalimentaire, les prix à la consommation ont considérablement marqué le pas. Ce qui signifie que l'inflation rejoint la cible de la Banque centrale européenne fixée à 2%. « La baisse de l'inflation sous-jacente signifie que la désinflation se diffuse », indique, en effet, Stéphane Colliac. Une désinflation attendue de pied ferme.