La France insoumise (LFI), forte des 22% de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, est en passe de réunir ses anciens concurrents pour les scrutins des 12 et 19 juin. L'alliance historique à gauche est en effet sur le point d'aboutir.
Après une semaine de négociations, Insoumis et socialistes se sont accordés dans la nuit de mardi à mercredi, pour annoncer dans l'après-midi avoir réglé l'épineux dossier des circonscriptions, et avoir trouvé un chemin commun pour mener la bataille des légilslatives tant sur la stratégie que sur le programme. Lequel texte doit encore être soumis à l'approbation interne des socialistes demain jeudi.
"Nous voulons faire élire des députés dans une majorité de circonscriptions, pour empêcher Emmanuel Macron de poursuivre sa politique injuste et brutale (RSA sous condition de travail gratuit et retraite à 65 ans) et battre l'extrême-droite", déclarent les deux formations dans un communiqué commun.
Cet accord intervient après celui trouvé dimanche soir avec EELV, et mardi avec le PCF.
Mais l'accord LFI-PS n'est pas encore tout à fait effectif: le Conseil national sera convoqué pour jeudi soir par le bureau national, c'est-à-dire l'exécutif du PS, qui, lui, se réunira ce mercredi à 18H30. Car Olivier Faure, premier secrétaire du PS, veut prendre le temps de convaincre ses 300 membres.
La négo des circonscriptions (et des sièges à l'Assemblée)
Selon l'accord entre LFI et EELV, quelque 100 circonscriptions, sur un total de 577, seraient réservées à EELV, sans concurrence de LFI (ni du PS ou du PCF), et dont environ 30 seraient gagnables. L'idée étant de permettre à EELV d'arriver à constituer un groupe d'au moins 15 députés à l'Assemblée. Dans un communiqué commun, les deux formations avaient annoncé la création d'une "bannière commune", baptisée Nouvelle Union populaire écologique et sociale, pas un nouveau parti, juste un étendard pour faire législatives communes.
L'accord entre LFI et le PC était signé mardi 3 mai, et l'on pouvait lire la liste des points communs sur le site du PCF, comme notamment "la hausse immédiate du SMIC à 1400 euros net et des salaires, le retour à la retraite à 60 ans pour toutes et tous, la garantie d'autonomie pour les jeunes, le blocage des prix sur les produits de première nécessité et l'éradication de la pauvreté". LFI et PC se sont mis d'accord sur 50 circonscriptions aux communistes dont 16 sont dites "gagnables".
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Lors des négociations PS-LFI, les socialistes ont obtenu 70 circonscriptions, a indiqué la direction du PS à l'AFP, sans préciser combien étaient gagnables. Un nombre inférieur à la centaine obtenue par EELV (dont une trentaine gagnables), mais supérieur aux 50 accordées aux communistes (dont 16 gagnables).
LFI a fait preuve de générosité (Quatennens)
Le coordinateur de LFI Adrien Quatennens a jugé ce mercredi sur franceinfo que sa formation avait fait preuve de générosité, ayant proposé plus que la proportionnelle des scores à la présidentielle: «Parce que nous souhaitions qu'il y ait un accord qui embarque tout le monde, nous avons tenu compte de l'implantation territoriale des différentes formations politiques.»
En échange, "le PS a fait des pas essentiels sur le bilan de Hollande, l'abrogation de la loi El Khomri, la retraite à 60 ans, le non-respect de certaines règles européennes", a salué l'eurodéputée Manon Aubry (LFI) sur Europe 1.
Un accord inespéré pour le PS, mais une âpre bataille à Paris
La direction du PS se félicite que les "1,7% de la présidentielle (soit le score d'Anne Hidalgo) se soient transformés en 70 circonscriptions, une prouesse".
Elle déplore en revanche la bataille perdue pour Lamia El Aaraje dans la 15e circonscription de Paris, où va être investie l'insoumise historique Danielle Simonnet. "Les négociateurs ont bataillé mais LFI a refusé de la considérer comme sortante", car son élection en 2021 a été invalidée par le Conseil constitutionnel en janvier.
Mécontente pour cette protégée d'Anne Hidalgo, la fédération PS de Paris va probablement appeler ses représentants au Conseil national à voter contre l'accord, a indiqué Rémi Féraud, chef de la majorité socialiste au Conseil de Paris, à l'AFP.
"Un accord avec la LFI ? Pas pour moi", a tweeté le maire PS de Paris Centre, Ariel Weil.
Anne Hidalgo, elle, n'a pas l'intention de sortir de son silence, préférant "se concentrer sur Paris", selon son entourage à l'AFP.
Hollande, Cazeneuve et Le Foll... tentés par une fronde
Le secrétaire général du PS, Olivier Faure, doit néanmoins composer avec la fronde d'un courant minoritaire et de figures historiques du parti, comme l'ancien président François Hollande et l'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve qui menace de partir.
Son ancien ministre de l'Agriculture, le maire du Mans Stéphane Le Foll, s'est dit sur France 2 prêt à "conduire la campagne" des dissidents, "tous ceux qui vont être candidats quand même parce qu'ils n'accepteront pas l'accord".
"Hollande et Cazeneuve ne peuvent pas avoir un droit de veto sur ce qu'il se passe à gauche et qui est une renaissance", a répondu l'écologiste Sandrine Rousseau (EELV), qui sera candidate dans la 9e circonscription de Paris, sur Public Sénat.
Parallèlement, des discussions se poursuivent avec le petit parti trotskiste NPA, enthousiaste au départ, mais désormais rebuté par l'alliance avec le PS, avatar selon lui du "social-libéralisme".
(avec AFP)