Politique économique : la popularité de Macron plonge

Par Grégoire Normand  |   |  1247  mots
"L’indicateur de qualité perçue de la politique économique du gouvernement atteint son plus bas niveau dans l’opinion" souligne BVA. (Crédits : PASCAL ROSSIGNOL)
La politique économique menée par Emmanuel Macron est jugée insatisfaisante par 69% des Français selon la dernière enquête mensuelle BVA/La Tribune. Les capacités du gouvernement à obtenir des résultats en matière de pouvoir d'achat ou de réduction du déficit public sont fortement remises en question.

La fin d'année s'annonce compliquée pour le chef de l'État. Selon la dernière enquête mensuelle d'opinion BVA/La Tribune sur "les questions de l'économie", les réformes engagées par le gouvernement sur le plan économique sont jugées défavorablement par une large majorité de Français. Et malgré la nomination de nouveaux ministres lors du récent remaniement, le mécontentement est loin de s'apaiser.

Sur le front économique, deux tiers des répondants (65%) considèrent que la composition du ministère de l'Économie et des Finances est insatisfaisante. Au plus bas dans les sondages, l'exécutif compte encore mener des réformes au pas de charge dans les mois à venir mais les résultats économiques décevants du premier semestre 2018 pourraient encore compliquer la tâche du couple Macron-Philippe.

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Macron au plus bas

Selon les résultats de l'institut de sondages, 69% des Français estiment que la politique économique du gouvernement est mauvaise. Au regard des enquêtes précédentes, c'est un record depuis octobre 2017. À l'opposé, la part des Français qui expriment un jugement favorable est au plus bas à 30%. Les Français les plus critiques à l'égard du gouvernement sont les moins de 35 ans avec 75% de répondants à émettre un jugement d'insatisfaction. Ils sont 73% chez les 50-64 ans. Les plus de 65 ans sont à l'inverse les moins critiques (57%).

Par catégorie professionnelle, ce sont les ouvriers et les employés qui se déclarent en forte majorité mécontents (81%). Chez les cadres, ils ne sont (que) 53% et chez les retraités, ce taux s'élève 62%. Mais cette déception pourrait encore s'amplifier dans les mois à venir. Après avoir encore manifesté leur colère ce jeudi 18 octobre, les retraités pourraient recommencer dans un avenir proche. En effet, l'exécutif a déjà suscité de vifs débats en présentant les contours de sa future réforme des retraites il y a quelques jours et les mesures socio-fiscales présentées dans le budget 2019 pourraient venir pénaliser le pouvoir d'achat des plus de 65 ans, selon les économistes de l'institut des politiques publiques.

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Du côté des forces politiques, les sympathisants de la France insoumise et ceux du Rassemblement national (ex-FN) sont ceux qui expriment le plus de réprobation à l'égard du gouvernement. À l'inverse, ils sont 92% chez la République en marche à se déclarer favorables.

Peu de confiance pour la baisse du chômage

La réduction du chômage demeure un immense défi pour les gouvernements successifs. Malgré une croissance très favorable en 2017 (2,3%) et des créations d'emplois au plus haut (340.000), le taux de chômage au sens du bureau international du travail (BIT) reste bien supérieur à la moyenne européenne. Pour tenter de combler ce retard, le gouvernement a multiplié les réformes en assouplissant le code du travail et s'apprête à transformer le CICE en baisse de cotisations pour favoriser les embauches. Mais ces mesures semblent peu convaincantes aux yeux des Français interrogés. En effet, 69% indiquent que la stratégie économique menée par Emmanuel Macron et le gouvernement ne permettra pas d'obtenir de résultats.

Ils sont encore plus sévères en ce qui concerne la question du pouvoir d'achat (75%). Les mesures intervenues en fin d'année 2017 comme la baisse des APL et celles mises en place en 2018 comme la fiscalité indirecte sur le tabac ou sur les carburants ont sans doute contribué à alimenter ce sentiment. Et les choses ne devraient pas s'arranger, même si plusieurs minimas sociaux vont être revalorisés à partir du premier novembre (allocation aux adultes handicapés, par exemple), la désindexation des pensions de retraites, des prestations familiales, et des allocations logement prévues dans le budget 2019 pourrait amplifier cette colère.

En matière de dépense publique et de réduction du déficit, la crédibilité du gouvernement est remise en cause. Parmi l'ensemble des interrogés, 36% seulement pensent que la politique menée par le gouvernement permettrait de réduire le déficit. Ils sont 81% chez la République en marche à accorder leur confiance, 54% chez les sympathisants du Parti socialiste mais seulement 28% chez les proches des Républicains et 10% au Rassemblement national.

Les Français peu satisfaits de Le Maire et Darmanin

Après le départ de l'ancien ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, le gouvernement a suscité de vives interrogations dans l'opinion publique et sur la scène médiatique. Le délai pour annoncer la nouvelle composition du gouvernement a réveillé des crispations chez l'opposition et dans les rangs de la majorité. Plus de deux semaines après le départ du locataire de la place Beauvau, l'Élysée a annoncé l'arrivée de plusieurs ministres le 16 octobre dernier. Si certains ministères ont connu de véritables changements, d'autres comme celui du ministère de l'Economie n'ont pas subi de transformation majeure.

En effet, Bruno Le Maire est resté à la tête de Bercy tandis que Gérald Darmanin est toujours responsable des comptes publics. Le changement notable est l'arrivée de la nouvelle secrétaire d'État Agnès Pannier Runacher qui est venue remplacer Delphine Gény-Stephann. Par ailleurs, le secrétaire d'État Mounir Mahjoubi a changé de ministère de tutelle en s'installant à Bercy.

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Sur les deux principaux ministres testés par l'organisme de sondages, à savoir Bruno Le Maire et Gérald Darmanin, les Français sont en légère majorité (52%) à avoir déclarer une mauvaise opinion. En revanche, les autres secrétaires d'État bénéficient plutôt d'une opinion favorable d'après les résultats de l'enquête. L'institut rappelle néanmoins pour le cas de Mounir Mahjoubi que seuls 50% des interrogés connaissent suffisamment le secrétaire d'État.

"Les deux autres secrétaires d'État pâtissent d'une notoriété plus réduite, 62% des Français déclarent ne pas connaître suffisamment Olivier Dussopt pour donner leur avis et qu'ils sont, logiquement, 67% à mal connaître Agnès Pannier-Runacher entrée au gouvernement le 16 octobre." Ce qui tend à relativiser les derniers résultats.

Dans le détail, 33% des Français ont une bonne opinion de Bruno Le Maire. La popularité du ministre de l'Économie et des Finances est extrêmement élevée auprès des sympathisants LREM (89%) et supérieure à la moyenne nationale auprès des sympathisants LR (41%) alors qu'elle est plus limitée chez les sympathisants PS (29%), RN (13%) et LFI (11%). Du côté du ministère des comptes publics, 28% des interrogés ont une bonne opinion de Gérald Darmanin. Si Édouard Philippe et Emmanuel Macron ont renouvelé leur confiance aux deux principaux ministres en charge de l'économie, les Français sont très loin d'être du même avis.

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Méthode : enquête réalisée auprès d'un échantillon de Français interrogés par Internet du 16 au 17 octobre 2018. L'échantillon est composé de 1.004 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l'échantillon a été assurée grâce à la méthode des quotas appliquée aux variables suivantes : sexe, âge, CSP du chef de famille et de la personne interrogée, après stratification par région et catégorie d'agglomération.