Ce fut un des moments les plus chahutés du discours d'Elisabeth Borne devant les députés. Lorsque la première ministre a évoqué la nécessité d'une réforme des retraites, les députés de l'union de la gauche ont manifesté leur mécontentement. Elisabeth Borne a toutefois confirmé que ce chantier serait bien ouvert, même avec une majorité relative à l'Assemblée nationale.
Aucune précision sur l'âge de report
La première ministre a soigneusement évité de mentionner un âge de départ, pour ne pas faire polémique. Pas question d'évoquer un report de 62 ans - âge légal aujourd'hui- à 64 ou 65 ans, comme l'avait annoncé Emmanuel Macron pendant la campagne. Elisabeth Borne s'en est tenu à la nécessité de travailler plus longtemps: « Notre système de retraite est une exception, on part plus tard chez nos voisins européens. Oui, nous devrons travailler progressivement un peu plus longtemps ». Mais, même ce progressivement n'a pas suffit à calmer l'agitation dans l'assistance. Ni même la promesse d'Elisabeth Borne de mener une concertation. « Cette réforme n'est pas ficelée. Elle ne sera pas à prendre ou à laisser. Mais elle est indispensable », a insisté la locataire de Matignon.
Une réforme au-delà du seul équilibre du système de retraites
Et pour se justifier, Elisabeth Borne est allée bien au-delà du seul besoin de financement du régime de répartition des retraites, alors même que le déficit représente chaque année plus de 10 milliards d'euros par an, selon le COR, le conseil d'orientation des retraites. « Cette réforme est nécessaire pour bâtir de nouveaux progrès sociaux », a-t-elle insisté. La réforme de retraite doit, donc, pour le gouvernement, permettre de financer la dépendance, mais aussi le modèle social français.
La question du financement reste toutefois source de polémiques. Le conseil d'orientation des retraites a choisi de repousser ses projections, attendues au départ à fin juin. Le COR pourrait les transmettre très vite, - dès cette semaine- ce qui ne manquera pas de faire débat. Avec l'inflation et le retour à une croissance molle, celles-ci pourraient être bien plus mauvaises que prévues.
Mais une réforme qui cristallise les oppositions
Au-delà du sujet du financement, la question des modalités promet aussi d'être le sujet d'une âpre bataille. « Notre pays a besoin d'une réforme de son système de retraite, qui prendra en compte les carrières longues et la pénibilité », a ainsi promis Elisabeth Borne. Si la première ministre choisit de souligner les carrières longues et la pénibilité, c'est parce que ce sont les deux sésames de la CFDT. Le premier dispositif est une grande victoire du premier syndicat de France, au moment où François Chérèque était aux manettes, et la pénibilité, la CFDT, en a aussi fait son cheval de bataille dans les années 2015.
Pas sûr toutefois que ces appels du pied de l'exécutif ne suffisent à « embarquer » le syndicat avec lui. Lors de son dernier congrès, en juin dernier, la CFDT a bien signifié à Laurent Berger son leader, son refus de reculer l'âge de départ. Quant aux autres syndicats, ils sont tous vent debout contre cette réforme.
Dans ce contexte, le gouvernement aura bien du mal à trouver des alliés. Surtout que l'opinion publique est très partagée sur le sujet, et le risque social très élevé. Dans l'hémicycle, comme l'ont montré les contestations, ce mercredi 6 juillet, le gouvernement aura du mal à convaincre.