Allemagne : accord à l'arraché sur des hausses de salaires dans l'industrie, inférieures à l'inflation

Patronat et syndicat en Allemagne ont annoncé en fin de semaine un accord sur des augmentations de salaires de 8,5% au total pour près de 4 millions de salariés de l'électrométallurgie, écartant tout risque de grèves dures dans un contexte d'inflation au sommet.
Cette hausse réclamée de longue date ne va pas permettre de compenser les effets délétères de l'inflation sur le pouvoir d'achat des ouvriers allemands.
Cette hausse réclamée de longue date ne va pas permettre de compenser les effets délétères de l'inflation sur le pouvoir d'achat des ouvriers allemands. (Crédits : Reuters)

Le bras de fer entre le patronat et les syndicats a finalement débouché sur un accord. Près de 4 millions de salariés allemands des secteurs industriels clés, comme l'automobile, ont décroché en fin de semaine une hausse de salaires de 8,5% sur deux ans. L'accord scellé avec le patronat écarte le risque de grèves dures dans un contexte d'inflation record. IG Metall portait les revendications des 3,9 millions de salariés de l'électrométallurgie, un secteur stratégique qui comprend les milliers d'entreprises de l'automobile, de l'électronique ou encore des machines-outil, pilier du modèle industriel allemand.

L'accord pilote, conclu dans le Bade-Wurtemberg (sud) et qui devrait valoir dans les autres régions allemandes, prévoit que cette hausse interviendra en deux étapes en 2023 puis en 2024. Une « prime inflation » défiscalisée de 3.000 euros a également été obtenue.

L'impasse des premières semaines de négociations, puis des débrayages organisés dans des centaines d'entreprises du pays, menaçait de tourner au conflit social d'ampleur. Et de dégrader encore le climat dans une première économie européenne au bord de la récession.

Lire aussiAllemagne : le principal syndicat industriel exige 8% de hausse des salaires

La pilule est cependant difficile à avaler pour le patronat: l'accord est « absolument à la limite » du supportable pour les entreprises, a estimé le négociateur patronal, Harald Marquardt. « Nos entreprises subissent une pression extrême, accablées par la pandémie, les problèmes sur les chaînes d'approvisionnement, cette terrible guerre en Ukraine et les prix de l'énergie qui sont un sujet extrêmement stressant », a affirmé Stefan Wolf, président de l'organisation patronale Gesamtmetall. Le syndicat réclamait initialement une augmentation de 8% de salaire sur douze mois, sa plus forte revendication depuis 2008.

Montée en pression

Les salariés avaient fait monter la pression en Allemagne: d'abord par des manifestations depuis plusieurs semaines, puis, depuis le 29 octobre par des « grèves d'avertissement », arrêts de travail à durée limitée qui accompagnent souvent les négociations salariales dans ce pays.

Si patronat et syndicat n'étaient pas parvenus à s'entendre, des grèves plus dures de 24 heures menaçaient le pays. Les représentants du patronat, qui jugeaient initialement irréaliste le niveau de hausse de salaire, ont estimé que le risque était trop grand.

« Des grèves de 24h coûtent de l'argent et dans la situation actuelle, surtout si nous sommes confrontés l'an prochain à une récession, il aurait été irresponsable et inutile de gaspiller de l'argent », a expliqué Stephan Wolf. Une première hausse de salaire de 5,2% interviendra en juin 2023, suivie par une hausse de 3,3% au 1er mai 2024.

Cet accord pourrait envoyer un signal aux autres branches qui négocient ou vont entamer des négociations sur les salaires, comme le secteur de la fonction publique. Pour les quelque 2,5 millions d'employés de ce secteur, le syndicat Verdi demande 10,5% de hausse. Ce bras de fer s'est déroulé alors que l'inflation a dépassé les 10% en octobre en Allemagne, du jamais vu depuis le début des années 1950, en raison de la cherté de l'énergie provoquée par la guerre russe en Ukraine.

Une hausse encore loin du niveau de l'inflation

La question des hausses de salaire est sensible dans le pays comme chez ses voisins de l'UE: le risque d'une « boucle prix-salaire » rendant l'inflation incontrôlable est souvent évoqué par le patronat.

L'accord conclu vendredi est loin de la définition d'une telle spirale, a estimé Frédéric Ducrozet, chef économiste chez Pictet Wealth Management: compte-tenu de l'inflation, la croissance des salaires réels sera bien inférieure à 8,5% et n'évitera pas aux salariés allemands « une perte massive de pouvoir d'achat ». De son côté, Eric Mengus, professeur associé à HEC rappelait lors d'un récent point presse que « en Europe, la dynamique des salaires est bien plus lente qu'aux Etats-Unis. Même si la BCE anticipe 4% de hausse de salaires, cela n'est pas 10% ».

L'Allemagne s'attend à de prochains mois difficiles: Berlin table sur une baisse du Produit intérieur brut (PIB) de 0,4% et sur une inflation de 7% en 2023, selon les dernières prévisions du gouvernement.

Lire aussiInflation en hausse et faible croissance : la zone euro glisse vers la récession

Commentaires 4
à écrit le 20/11/2022 à 23:01
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En clair 8% en 2 ans + 1 prime de 3000€ Defiscalisée … on en est où en France Mr Lemaire et le patronat … c est vrai que les salariés français -privé comme public - dont tellement individualistes qui ne sont pas capable comme les Allemands de se réu...

à écrit le 20/11/2022 à 23:00
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En clair 8% en 2 ans + 1 prime de 3000€ Defiscalisée … on en est où en France Mr Lemaire et le patronat … c est vrai que les salariés français -privé comme public - dont tellement individualistes qui ne sont pas capable comme les Allemands de réunir...

à écrit le 20/11/2022 à 21:31
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bon, la boucle prix salaires est enclenchee, il faut d'urgence que la BCE mette les taux d'interets a 15% pour stopper ca, ca va envoyer du lourd

le 21/11/2022 à 9:52
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Que proposez-vous pour éviter l'appauvrissement des travailleurs?

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