Combattre le changement climatique peut rapporter gros

Par Dominique Pialot  |   |  545  mots
L'agriculture et l'usage des sols sont parmi les principaux leviers vers une économie décarbonée (Crédits : iStock)
La Commission mondiale pour l’économie et le climat – co-présidée par l’économiste Nicholas Stern - publie un nouveau rapport. Remis ce 5 septembre au secrétaire général des Nations Unies, ce manifeste évalue les gigantesques bénéfices économiques qui résulteraient d’une lutte volontariste contre le changement climatique et fait parfaitement écho au discours du tout nouveau ministre français de la Transition écologique, François de Rugy, qui ambitionne de réconcilier économie et écologie.

D'après la Commission mondiale pour l'économie et le climat, les bénéfices économiques d'une action volontariste contre le changement climatique sont largement sous-estimés. Publié ce 5 septembre par l'équipe dédiée à l'initiative de « New climate economy », un rapport - qualifié de « Manifeste » par ses auteurs - les évalue à 26.000 milliards de dollars et 65 millions d'emplois créés d'ici à 2030.

Ces conclusions se fondent sur les immenses progrès accomplis sur le front de la technologie et de l'organisation des marchés qui rendent plus facile et abordable la bascule vers une économie décarbonée.

Carlos Lopez, professeur à l'Université de Cape Town en Afrique du Sud et membre de la Commission, évoque la révolution du solaire à l'œuvre sur le continent, mais aussi des innovations dans le transport public ou l'assurance contre le risque climatique.

Nicholas Stern, ancien économiste en chef de la Banque mondiale qui co-préside la Commission avec, notamment, Paul Polman, PDG du géant de l'agro-alimentaire Unliver, évoque parmi les leviers de ces retombées positives l'apprentissage par l'action et les économies d'échelle, et déplore l'incapacité des modèles actuels à tirer profit de ce nouveau contexte favorable.

Veiller à une transition juste

Selon les auteurs de ce rapport, les retombées économiques sont essentiellement à trouver dans les secteurs de l'énergie, de la ville, de l'alimentation et de l'usage des sols et de l'eau ainsi que dans l'industrie.

La présidente de la Banque mondiale Kristalina Georgieva souligne pour sa part les effets positifs qu'aurait par ailleurs une lutte active contre le changement climatique en termes de développement et de santé : pas moins de 700.000 décès prématurés évités par an, sachant que l'on évolue aujourd'hui à quelque 9 millions chaque année les morts liées à la pollution dans le monde.

Pour accélérer la bascule vers une économie décarbonée, la Commission appelle les États, les entreprises et le secteur financier à prendre rapidement (dans les deux à trois prochaines années) des mesures en matière de tarification du carbone et d'investissements dans les infrastructures durables. Elle préconise également d'exploiter au mieux la puissance du secteur privé, de libérer l'innovation et de construire une transition juste, fondée sur une approche mettant les citoyens au centre et garantissant un partage équitable des bénéfices.

Selon les quelque 200 experts qui ont participé à ces travaux, une réforme des subventions octroyées aux différentes énergies et du prix du carbone permettrait notamment de renflouer les finances publiques de 2.800 milliards de dollars par an en 2030.

Principal levier de croissance du 21e siècle

Pour Caio Koch-Weser, économiste allemand président de la European Climate Foundation, « L'histoire du climat est fondamentalement une histoire d'économie. »

Il appelle notamment les ministres des Finances à accorder l'attention qu'il mérite à un message fort : « La lutte contre le changement climatique est le principal levier de croissance du 21e siècle. »

Mais le temps presse. Si les auteurs reconnaissent une mobilisation générale rassemblant tout à la fois les villes, les gouvernements, les entreprises, les investisseurs et les citoyens, ils sont clairs sur le sujet : celle-ci doit s'accélérer encore pour parvenir à décarboner suffisamment rapidement l'économie mondiale, eu égard à l'emballement du changement climatique.