Efficience énergétique cherche politiques plus efficaces

CHRONIQUE DU "CONTRARIAN" OPTIMISTE. L'une des pistes à développer pour réduire les émissions de CO2 est d'améliorer l'efficience énergétique de nos économies, autrement dit, faire la même action ou le même produit avec moins d'énergie. Si des efforts ont été faits par nombre de pays, l'année 2020 a marqué le pas, rendant plus que jamais nécessaire de relancer des politiques favorisant ces potentielles économies d'énergie.
Robert Jules
(Crédits : Eric Gaillard)

Lors de la présentation de son plan "France 2030", le président Emmanuel Macron avait été critiqué par la CFDT qui lui reprochait d'avoir oublié d'intégrer un volet "efficience énergétique". L'efficience (ou l'efficacité) énergétique signifie une moindre utilisation d'énergie pour effectuer la même tâche, autrement dit, il s'agit de réduire au maximum le gaspillage d'énergie.

Cela représente plusieurs avantages : réduire le coût pour les ménages (donc augmenter leur pouvoir d'achat) et pour les entreprises (donc les rendre plus compétitives), réduire également les émissions de gaz à effet de serre (indispensable dans l'objectif d'une activité net zéro carbone), et pour un pays, abaisser les importations.

Le moyen le moins cher

Surtout, l'efficience est le moyen le moins cher, le plus simple et le plus rapide pour réduire l'utilisation des combustibles fossiles. Pour un particulier, rationaliser l'utilisation de sa voiture en remplaçant certains déplacements par le transport en commun ou le vélo, prendre plutôt une douche qu'un bain, veiller à éviter de laisser les portes ouvertes en hiver lorsque le chauffage est au maximum.

A l'échelle d'un pays, il existe un grand nombre de possibilités d'amélioration de l'efficience énergétique dans pratiquement tous les secteurs de l'économie : le bâtiment, les transports, l'industrie, les appareils électriques et électroniques, l'énergie elle-même en ayant par exemple recours au solaire ou à l'éolien, etc. Des initiatives qui peuvent faire une politique à l'échelle d'un pays.

C'est ce que font d'ailleurs la plupart d'entre eux à travers le monde avec des résultats encourageants. Cette semaine, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a publié un rapport sur le sujet.

1.500 TWh économisés en 2018

Une analyse portant sur 9 pays montrent que l'application de normes d'efficience a permis d'éviter de consommer 1.500 TWh en 2018, ce qui équivaut à toute la production solaire et éolienne cumulée de ces 9 pays en 2018. Et près de cinq fois la production nucléaire française et ses 56 réacteurs. Plus précisément, les Etats-Unis ont été les plus performants, avec près de 16% d'électricité économisée, suivis de l'Union européenne (15%) et de l'Australie (7%). La Chine (5%) et l'Inde (plus de 4%) ont des progrès à faire tout comme l'Afrique du Sud (un peu plus de 2%) et la Malaisie (moins de 1%). Les meilleures performances sont liées, souligne l'Agence, à l'implémentation de programmes de longue durée, par exemple par l'imposition de normes à tout un ensemble de produits.

Toutefois, note l'AIE, la crise sanitaire a ralenti le développement de cette efficience. Si l'on prend en compte l'intensité énergétique, qui correspond au rapport entre la consommation d'énergie et le PIB. Elle s'était améliorée d'un peu plus de 2% en moyenne annuelle sur la période 2011-2016, puis s'était réduite avant de revenir à 2% en 2019. En 2020, période des confinements, elle n'a été que de 0,5%, en raison de la chute de la demande d'énergie et de la faiblesse des prix. Cette année, elle devrait revenir à près de 2%, selon les calculs des experts de l'agence. Or pour tenir compte des objectifs de l'accord de Paris sur le climat, il faudrait que ce taux soit de plus de 4% en moyenne annuelle sur la période 2020-2030. On en est loin.

300 milliards de dollars d'investissement en 2021

Pourtant, l'agence se montre optimiste. "Les tendances à la hausse des investissements, l'augmentation des dépenses publiques en matière d'efficience contenues dans les plans de relance mis en place pour répondre à la crise du Covid-19 (...) offrent des signaux encourageants", souligne le rapport. Ces investissements ont augmenté au total de 10% cette année, pour atteindre 300 milliards de dollars, dont une large part concentrée en Europe. Et il faudra faire davantage d'efforts pour atteindre la neutralité carbone en 2050.

Or, imposer des normes d'efficience énergétique aux constructeurs prend du temps. D'une part, cela renchérit le prix de production d'un appareil, ce qui peut dissuader une partie des consommateurs, et d'autre part, l'entreprise doit écouler son stock existant qui n'est pas aux normes. L'AIE recommande que des mesures d'incitations financières soient prises pour pousser les consommateurs à changer plus rapidement leurs appareils énergivores pour de nouveaux modèles plus efficients, d'autant que, souligne l'agence, le coût de la mise aux normes tend à décroître et permettra in fine des économies.

Parmi les différents secteurs concernés, la climatisation a un potentiel d'économie important. Si elle permet aujourd'hui à l'échelle mondiale d'économiser 12%, les pays qui adoptent des programmes de long terme se rapprochent eux d'un taux de 85% d'économie d'énergie. Pour les appareils électroniques, ces taux sont respectivement de 38% et 80%.

Améliorer le bilan énergétique des logements

L'AIE évoque l'exemple de l'habitat résidentiel dans l'Union européenne (UE). Il représente une valeur estimée à 17.000 milliards d'euros, soit la moitié de la richesse des ménages européens, et constitue le logement de 220 millions de ménages. Or, souligne l'Agence, quelque 75% de ces bâtiments ne sont pas efficients en matière d'énergie. Et 90% d'entre eux seront toujours là en 2050, année où l'on est censé atteindre la neutralité carbone. Une initiative européenne en matière d'énergie efficiente vise à la création d'un crédit hypothécaire vert incitant les acheteurs de logements à améliorer leur efficacité énergétique ou à acquérir des biens aux normes optimales d'économie d'énergie grâce à des conditions attractives d'un crédit hypothécaire.

Toutes ces initiatives vont dans le bon sens, mais elles doivent aussi relever de la volonté politique. Sur ce point, Emmanuel Macron - qui ne s'est pas encore déclaré candidat - pourra reprendre son programme de campagne présidentielle de 2017 qui contenait la proposition suivante : ​​"Demain, nous engagerons une rupture profonde avec le modèle productif existant largement fondé sur la consommation d'énergies fossiles. Ces ambitions devront trouver leur place dans tous les secteurs : industrie, mobilité, aménagement et habitat... Pour cela, nous porterons une volonté de sobriété et d'efficacité énergétique". La proposition sera toujours valable pour 2022. Et il est concurrencé sur ce terrain par Yannick Jadot, le candidat EELV, mais aussi par Jean-Luc Mélenchon qui justifient par la sobriété énergétique leur choix en faveur des renouvelables plutôt que le nucléaire.

Robert Jules
Commentaires 2
à écrit le 19/11/2021 à 15:53
Signaler
Pour économiser du courant électrique, on peut déjà regarder, quand on en a une, combien la VMC consomme (en partant en vacances, quand le frigo / congél etc sont coupés, on relève le compteur avant de partir et au retour = la conso de la VMC). En re...

le 20/11/2021 à 9:55
Signaler
Un moteur solaire pour une VMC devrait suffire au besoin quand au solaire thermique (600 à 800 W/m2) il reste le grand absent.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.